Les rues de Kumo pouvaient bien être plus dangereuses une fois le soleil tombé, Aiji trouvait que sous le clair de lune, le village semblait baigner dans une totale sérénité. Le shinobi se doutait bien que les vices étaient assouvis à huis clos, mais en ces temps troubles que connaissait le Pays de la Foudre, le calme apparent de la nuit était presque une bénédiction. Pourtant, une question tourmentait l’esprit d’Aiji : pourquoi n’avait-il pas encore été tué ? Son secret avait été découvert. Son père n’avait jamais pourtant cessé de l’avertir, depuis l’enfance : la vérité peut languir, mais non périr. Mais que faire quand c’est justement votre géniteur, votre « protecteur », qui vous pousse dans la plus grande scélératesse ? Le fils comme le père étaient des masques rouges. Les ennemis publics du moment. Ceux que le pouvoir rêvait de voir mourir dans les pires souffrances. Pourtant, c’était ce même pouvoir qu’était venu à la rencontre du jeune homme. Il aurait bien pu être exécuté sur le champ, mais apparemment il avait le droit à un sursis.
Bien qu’il aurait pu profiter de ces deux jours de répit pour s’enfuir ou se donner lui-même la mort (ce qui lui aurait éviter d’éventuelles tortures), il n’en fit rien. Il était bien trop intrigué par la jeune femme qu’était venue à sa rencontre. De quoi voulait-elle bien lui parler ? Il était certes un terroriste comme son père, mais il ne partageait pas ses convictions. Il n’était personne dans l’organisation et il avait toujours fait en sorte de ne connaître que le strict minimum pour ne pas dévoiler ses positions. Pourtant, il était aujourd’hui démasqué. C’était fâcheux certes, mais ce n’était pas dans sa nature d’être soucieux. Il se disait que c’était la vie...
Alors qu’Aiji pénétra dans la ruelle quelques minutes après l’heures prévue, il fut surpris de voir que l’intendante de Kumo l’attendait déjà. Il n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche qu’elle se lança déjà dans un monologue.
« Je vois que vous avez fait vos devoirs. Je ne suis pas surpris pour une femme de votre trempe. »
En effet, l'intendante semblait avoir percé la carapace d'Aiji. Ils ne s'étaient jamais réellement parlé, et pourtant, il avait l'impression qu'elle connaissait tout de lui. Lui mentir ne servirait à rien.
« Vous avez raison : les querelles des grands de ce village ne m'intéressent pas. Que ce soit Masashi ou un autre à la tête du pays ne me fait ni chaud ni froid. Ce que je désire vraiment, c'est le goût du risque, l'excitation que nous procure l'aventure. Je ne supporte pas l'immobilité.
C'est avec un certain plaisir que j'ai participé à ces attentats. Je ne veux plus m'en cacher.. De toute façon, c'est trop tard. »
Il avait beau considérer la politique politicienne comme futile, si il y avait bien une chose à laquelle il croyait, c'était l'expansion de ce que certains surnommaient encore « l’empire foudroyant ». Comme beaucoup, il estimait que la guerre était fondamentale au ninja. Sans elle, il n'était rien et ne servait à rien. Il ne comprenait donc pas pourquoi le Raikage préférait s'isoler à l'intérieur de ses frontières.
« Je n'ai qu'à faire de mon père, en effet. Vous pouvez le tuer, je ne m'y opposerai pas. Cela fait bien longtemps que je ne le considère plus comme un membre de mon clan, et encore moins de ma famille. Mais je pense que vous ne lui rendrez pas plus grand service en l'assassinant. Il est tellement obsédé par cette lutte de pouvoir que mourir des mains de « l'ennemi » serait pour lui un honneur. »
Malgré tout cela, Aiji n'avait toujours pas la réponse à la question qui le turlupinait déjà depuis deux jours : qu'allait-il advenir de lui ?
« Si je peux me permettre une question : pourquoi ne pas m'avoir tué tout de suite ? Vous devez bien savoir que je ne suis qu'un pion sur cet échiquier. Je ne vous apporterai rien d'essentiel. Au contraire, m'exécuter serait plus pratique.
Pourtant, je me tiens debout devant vous... Vous semblez avoir des desseins pour moi. »