Les marais, lieu lugubre ou peu de personnes s'aventuraient. La joie de ne pas savoir ou marcher, la peur de s'embourber et de ne jamais pouvoir en sortir, là était une raison plaisante pour ce faire discrète. A vrai dire, je ne savais pas pourquoi, mais quelque chose me disait que je devais me trouver ici. L'odeur était assez désagréable, comme si la putréfaction avait envahi les lieux. Le paysage, lui, était tout aussi affreux. J'avais beau avoir de l'âge, jamais de mémoire je ne m'étais rendue ici. Je m'arrangeais toujours pour contourner le plus gros de ces marais putrides. De plus, cet endroit n'avait rien de la classe qui était la mienne. J'avais l'impression de me retrouver dans certains villages ou certaines habitations perdus au milieu de nul part que j'avais pu voir dans un passé lointain.
Une brume avait même commencé à s'élever recouvrant les peu de chemins existants ce qui rendait la traversée encore plus compliquée. C'est intérieurement que je rigolais, pensant à un voyageur qui pourrait me voir déambuler dans cette purée de pois. A coup sûr, il pourrait penser que j'étais un fantôme et il n'aurait pas tout à fait tort. Une vieille âme qui parcourt le monde au fil des siècles, voyant les civilisations se faire et se défaire. Combien de personnes que j'avais rencontrées ne sont plus à ce jour ? Le compte était tout bonnement astronomique.
Perdu dans mes pensées, je n'avais pas remarqué que j'avais quitté ma trajectoire, manquant de tomber dans cette mélasse puante. J'avais vraiment horreur de cet endroit. Néanmoins, je remarquais une ombre qui traversait les bois. Une personne ici ? Qui pouvait donc bien être ce fou ? Surtout dans le noir le plus complet qui plus est. Pas une torche, pas un feu, rien pour s'éclairer. A moins que ce soit un fantôme, cette personne était peut-être perdue.
*Un repas ici ?*
C'était une situation hilarante, jamais je n'aurais pensé pouvoir avoir un repas gratuit dans ce trou perdu. Je m'approchais lentement, à travers les troncs qui semblaient tout aussi vieux que moi. Plus je m'approchais, plus ma proie serait à ma portée, prête à être savourer. Mon seul espoir était qu'il ou elle soit goutu. Quelques mètres me séparaient et je remarquais que c'était un homme. Une apparence un peu sale et puis surtout qui avait une partie des jambes dans ce qui semblait de la vase.
« Qui est là ? Qui êtes-vous ? Montrez-vous, je sais que vous êtes là ! »
De l'inquiétude ? De la peur ? ou un peu des deux. Je n'étais pas en mesure d'arriver à le savoir. Chose étonnante, car il m'était possible de le savoir et ça m'aidait grandement pour jouer avec mes cibles. Les rassurés, ou leur faire prendre confiance, pour ensuite les croquer. Ça rendait le sang un peu plus mangeable et la chair plus tendre. Les nerfs, les muscles, j'en avais vraiment horreur. C'était énervant pour planter les dents.
« Oh oui ! Je suis là. Vous avez peur ? Il ne faut pas, voyons. Allons, allons. »
Il avait réussi à s'extirper de sa prison vaseuse et était droit sur deux jambes. je sortais de l'obscurité, me montrant face à lui.
« Ouh, vous avez une sacré balafre dites moi. C'est pas trop douloureux ? Mirya, enchantée. Comment m'avez -vous remarqué ? »
Je jouais les niaises et c'était bien la première fois que j'employais un faux nom. D'une certaine manière, je ressentais un malaise avec cet homme. Suffisant pour protéger mon identité. C'était un sentiment que je n'aimais pas du tout. J'essayais de me montrer douce et inoffensive. Mon cerveau me dictait la prudence, mon instinct également. Cet instinct qui, jamais, ne m'avait fait défaut.
« Que faites vous ici, en pleine nuit, seul et sans lumière ? Vous aussi, vous vous êtes perdu ? A la base, je cherchais la route du nord pour rejoindre les terres désolées, mais je ne connais pas trop et je me suis perdu. Je ne sors pas souvent, vous voyez ? La faute à mes parents qui m'ont enfermé des lustres. Résultat, j'ai fuie et HOP ! Je suis ici. Ça m'apprendra. »
Mensonges et appel aux sentiments envers la femme en détresse. C'était un piège qui avait déjà fait ses preuves. Je le regardais de mon petit minois, l'air inoffensif pour le tromper et lui faire baisser la garde.