L'avènement du clan Kitto

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Quelques minutes auparavant...

Seijuro et Keisan s'était donné rendez-vous un peu plus tôt dans la journée au niveau de la grande place centrale du village. Le sabreur avait proposé au borgne de se rejoindre au niveau d'un restaurant qui proposait des breuvages. L'endroit était de bonne fortune sans être pour autant insalubre. Les employés portaient une tenue similaire entre eux, et chaque entrée était suivi d'un "irrashaimase" en terme de bienvenue. L'ambiance se voulait légèrement festive, tandis que le service proposé se montrait plutôt mécanique. Les serveuses en tenue courte étaient toutes de jolies filles, probablement recrutées pour la majorité sur des critères physiques plutôt que pour des compétences véritables et individuelles. Elles se voulaient cependant respectueuses et souriantes. Les garçons de service ornaient tous leur chef par un bandeau où était écrit "炊事" qui se prononçait Suiji, à savoir l'art de cuisiner. Ces derniers étaient plutôt refourgués aux tâches de préparation, avec pour chacun un plan de travail, et un outillage complet. La panoplie de couteau de cuisine présente ici était impressionnante, et il était difficile de douter de la qualité des préparations, bien que la qualité des ingrédients n'était pas la plus estimable.

Seijuro s'était assis à une table, en attendant que son vieil ami le rejoigne. Il regardait l'endroit qui s'épousait d'une vie active, les clients affluaient puis repartaient avec le sourire aux lèvres. La scène se passait juste après le discours d'avènement du nouvel Hokage, Shinji Kitto. Et tout portait à croire que le village entier commençait à cicatriser ses plaies. Il y avait dans cette journée, un sentiment latent réchauffant le bourgeon d'un nouvel espoir...
Pour autant, le danger était réellement encore présent, et les responsables du malheur du village étaient encore tous les deux en liberté. Depuis la nuit du massacre, chacun avait tenté de reconstruire avec ses propres forces le village, mais le drame était resté impuni. Le clan des Kitto s'était scindé suite au tragique événement, bon nombre des membres du clan avait suivi la Prêtresse de Konoha pour partir vers d'autres terres, des terres où les querelles de pouvoir et où les génocides n'existent pas. Tous ceux qui suivirent la Prêtresse étaient aux yeux de Seijuro des fuyards, des traîtres à leur patrie, n'ayant pas même la conviction de soigner les maux d'un village blessé à son essence. Pour autant, le Jônin de Konoha éprouvait encore le plus grand des respects pour cette dernière, cette icône qui n'était désormais plus qu'un souvenir.

Les deux hommes ne s'étaient pas côtoyés depuis un moment. Pour autant, il était vraisemblable pour Seijuro de juger l'homme comme son plus fidèle allié, comme le plus sincère ami qu'il possédait au sein de l'enceinte du village. Le temps n'était pas un problème, même éloignés depuis des mois, les sentiments demeuraient inchangés, et la sincérité de pensée avait perduré.
Dernièrement, beaucoup de choses avaient changé pour Seijuro, il ne souhaitait toujours pas être mis sous le feu des projecteurs, mais il se savait être un élément important, un élément qui serait amené à dicter une foule d'homme, à entraîner les esprits et à diriger les troupes. Ses convictions s'étaient renforcées avec le temps, il avait gagné en maturité et il avait décidé de mettre un terme à un pacifisme exacerbé, à des agissements illusoires, uniquement basés sur des pensées profondes. Désormais, il était un homme aguerri, un fier shinobi avoué pour le village, un ninja dévoué à la cause de la stabilité et de la grandeur de Konoha.
Shinji venait de faire son discours, et il était important que les deux hommes puissent en parler, qu'ils puissent partager leurs opinions respectives. Les Kitto restants n'étaient pas nombreux, mais il fallait que l'union de leur voix puisse compter. Les sections n'existaient plus réellement... Keisan était toujours légitimement le chef du clan Kitto...



Seijuro venait de repérer son acolyte, il lui fit un bref signe.
Qu'était-il devenu depuis ce temps ? Que faisait-il désormais ? Les questions seraient nombreuses, mais l'échange serait sans doute à l'instar de tous les anciens, passionnant.

Les deux Kitto s’étaient croisés sur la grande place centrale du village. Cela faisait un certain moment qu’ils s’étaient perdu de vue. Le régent de Konoha avait été occupé à faire élire les chefs Uzumaki et Chikara et à donner une ligne directrice au village de la feuille. Par la suite, le conseil des trois avait choisi Kitto Shinji comme représentant ultime. Il s’était écoulé plusieurs jours ainsi, pour solidifier la nouvelle organisation mise en place, et conforter le Hokage. Après quoi, le dirigeant du clan Kitto s’était absenté pour le domaine où s’étaient reclus la Prêtresse et ses fidéles. Le borgne avait tenté des négociations en présentant ce qu’il appelait la IIIe République, en vain.

Les deux amis avaient décidé de se voir dans un de ces restaurants de bonnes apparences. A son entrée, Keisan fut accueilli par une serveuse enjouée exécutant son salut oral. Aussitôt, la voix du jeune à l’éloquence inavouée avait franchie le tympan de l’ancien mercenaire, qui le chercha alors du regard. La main levée de Seijuro lui fut d’une grande aide afin de le discerner, à travers toutes les tables chargées de monde. Se frayant un chemin, il s'installa sur la chaise juste en face. Sa mine fatiguée mais folâtre signifiait bien des choses, mais surtout de sa réjouissance à revoir l’homme d’esprit. Un bâillement s’étouffait quand ses lèvres bougeaient, les mots remportant cette bataille :



En effet le lieu était visiblement propice à la discussion, alors qu’ils n’avaient échangés que quelques mots sur la grande place.

Keisan n'avait pas changé. A son arrivée, le borgne semblait légèrement déconcerté par la fréquentation massive des lieux. Il ne lui fallut que quelques instants avant d'apercevoir son acolyte lui faisant signe. A proximité, le jônin distingua une fatigue affichée qui semblait pourtant se masquer au profit d'une réjouissance empreinte sur le visage de l'ancien mercenaire.



Seijuro estimait l'homme comme aucun autre. D'une rencontre hasardeuse, les deux compagnons s'étaient voués de respect rapidement. Leurs différentes discussions les avaient poussé à des confrontations idéologiques à plusieurs reprises, bien que de nombreuses convergences eurent à contrario, tendance à les unifier. En somme de toutes, une voie se dessina progressivement pour le renouveau d'un pacifisme à enterrer pour le clan Kitto. Il y avait dans les réflexions et dans les mots de ce barbu, une profondeur respectable, une forme de paternalisme séduisante. Pour ces raisons, Seijuro voyait en Keisan toutes les caractéristiques d'un bon leader, que ce soit d'un point de vue clanique, mais également à plus large spectre.
Bientôt, une serveuse amena les cartes des menus proposées par le restaurant. S'effaçant poliment dans le dessin d'un sourire et dans la manifestation d'une courbette, Seijuro attrapa un menu qu'il tendit à son compagnon.



Les yeux du jônin scrutait les lignes du menu. Il se savait coupable du manque de nouvelles échangées en partie. Il avait passé ces derniers mois à enquêter sur les agissements de Shimazu Uzumaki, ainsi qu'à parfaire une nouvelle caractéristique de son éventail de techniques. Le sabreur en était resté à un état d'esprit où il se voudrait être le promoteur de la capture des deux fugitifs. Sa conversation avec Shinji quelques mois auparavant en avait renforcé la conviction.
Ses mains, abîmées par la souffrance extrême de ses entraînements répétées, témoignaient à elles-seules d'une volonté de ne pas retomber dans une inactivité meurtrière. Seijuro souhaitait construire un futur nouveau, mais il ne souhaitait pas le faire sur un terrain en ruine. A ses yeux, il fallait d'abord déblayer un passé entaché de noirceur avant tout. Les deux hommes travaillaient de concert, mais leurs activités s'étaient établies sur des plans différents.

Le quarantenaire ne pouvait qu'acquiescer quand Seijuro parlait des nombreux efforts requis afin de faire tourner la grande machine de la IIIe République. C’est d’ailleurs ce qu’il fit à l’aide d’un placide hochement de la tête. Tout en saisissant le menu du restaurant qui lui était tendu, Keisan écoutait son jeune ami.



Une expiration lourde faisait ressentir toute la déception du borgne à ce dernier propos. L’homme savait le tribun suffisamment à l’aise avec les mots, assez cultivé pour lire entre les lignes et assez doué pour interpréter les signes extérieurs pour en déduire qu’il rentrait donc du voyage. En survolant le menu, une chose attira visiblement l’attention de l’ancien mercenaire. Levant la main pour commander, une serveuse se glissait jusqu’à eux.



Attendant que son confrère de pensée en fasse de même et que la serveuse se retire pour un peu plus d’intimité - sentiment étrange lorsque une piéce est rempli de monde mais qui trouve néanmoins sa réponse dans le brouhaha ambiant - Keisan rebondit sur ce qui lui était arrivé dans les oreilles un peu plus tôt.