Qu'est-ce que cela faisait du bien, de pouvoir discuter comme ça avec lui. Au final, Kano ne regrettait pas un seul instant de ne jamais avoir abandonné, puisque son état de ce jour était la plus belle des récompenses qu'il aurait pu espérer. Le sourire, la bonne humeur, le tout était revenu. Et il croyait désormais en l'avenir, ils avaient fini par réussir à lui montrer qu'il pouvait encore avancer, et emprunter un nouveau chemin qui lui rendrait sa vie d'auparavant. Mieux encore, il en ressortirait grandi, tout comme le Chikara.
Il écoutait son ami, souriant, puis détourna légèrement le regard. Son côté taquin était également de retour, et il ne s'en privait pas pour mettre mal à l'aise le jeune adolescent. Lui, modeste ? Il abusait. Il était encore bien loin de pouvoir prétendre au titre de futur médecin légendaire de Konoha, ou bien de l'un des deux meilleurs médecins de la planète. D'ailleurs, il ne cherchait même pas à pouvoir prétendre un si grand titre. Tout ce qu'il voulait, c'était être suffisamment talentueux pour venir en aide à son meilleur ami, mais aussi à son village, et tous ceux qui seront dans le besoin. Pour cela, il n'avait pas besoin d'être le meilleur.
Kano passait sa main dans ses cheveux d'or, gêné.
« Tu... Eh, c'est toi qui exagères ! Le mérite revient principalement à Kazami-senseï, moi je me suis seulement plus impliqué qu'un autre médecin sur ton cas, voilà tout... ! »
Il y avait du vrai dans le lot, mais Kano ne reconnaissait pas non plus avoir énormément progressé ces derniers temps, plus même qu'il ne le pensait. Mais de là à prétendre être le meilleur... il y avait tout de même un monde.
« C'est plutôt ton genre à toi de prétendre à tout va que tu vas devenir le meilleur épéiste du monde. Haha... Mais oui, je serai là, et je suis rassuré de savoir que tu es confiant. Ça me motive à donner le meilleur de moi-même ! »
Il se reprit, riant un peu, mais le garçon fut une nouvelle fois désemparé par ses paroles. Son espièglerie reprit le dessus, avec une blague plus ou moins douteuse. Prendre une photo, avec son coeur dans la main ?
En entendant le rire de son ami, celui-ci se ressaisit, et lui lançait à son tour une réplique, mais avec un air beaucoup plus sérieux.
« Ne me donnes pas d'idées comme ça, ça pourrait me tenter. Tu n'as pas envie de voir une photo de ton cœur ? »
Il restait sérieux quelques secondes, avant de rire aux éclats avec lui. Qu'il faisait bon de pouvoir recommencer à rire avec lui. Mais alors qu'ils riaient, ils s'approchaient de la tombe de leur défunte Hokage. Kano, ignorant toujours ce qu'il voulait lui dire, restait silencieux à partir de ce moment, effectuant une discrète mais respectueuse révérence en l'hommage en la Kirishitan, puis se mit légèrement sur le côté en observant Seitô.
À l'écoute de son ami, il écoutait ce qu'il avait à lui raconter, lui contant finalement l'histoire de Risako, ce qu'elle lui avait enseigné durant l'échange qu'ils avaient eu. Jamais Kano n'avait su ce qu'il s'était dit ce jour-là, il savait simplement que la Kirishitan lui avait légué son histoire, son héritage, dans l'espoir de le voir se relever de cette dure et difficile épreuve. Et maintenant, il commençait à comprendre. Une trahison lui avait coûté la vue, l'handicapant à vie de par le manque de ce sens si important et vital. Elle qui était une grande guerrière, avait été condamnée à dépendre des autres, et de ne plus pouvoir vivre par elle-même. La forme différait, mais le fond était en tout point similaire à ce qui est arrivé à Seitô.
Et pourtant, malgré la haine et la colère qu'elle avait pu ressentir, elle avait su se relever, et devenir la grande kunoichi qu'elle était devenue, en prenant conscience de ce que c'était, d'être un ninja. C'est ainsi qu'elle était devenue Hokage.
Un discours inspirant, une histoire poignante, expliquant mieux pourquoi et comment l'Uzumaki s'était autant identifié à elle. Elle avait traversé les mêmes épreuves, mais s'était relevée. Un exemple, une idole pour lui, voilà ce qu'elle était devenue. En entendant ses paroles, comparant sa vie à son épée, Kano comprit à quel point cette simple métaphore avait de l'importance pour lui. Il esquissait un petit sourire. Si elle était toujours en vie, aujourd'hui, il serait allé la remercier. Sans elle, il n'en serait peut-être pas là...
La suite, il la connaissait. Ou du moins, pas complètement. Il comprenait mieux pourquoi Seitô avait autant été ébranlé par sa mort. Donner une raison de vivre à quelqu'un, et mourir juste après, lorsqu'on s'est comparé à cette personne... cela avait un air de mauvaise blague, de farce du destin. Et pourtant, c'était malheureusement la triste réalité. À ce moment-là, Kano craignait que son ami ne se relève jamais, et c'était difficile pour lui. D'autant qu'il en apprit finalement plus... faisant enfin le lien entre tout ça. Seitô avait voulu... mourir ? Mettre fin à ses jours ? En entendant ses paroles, il se figea. Même s'il savait qu'il avait, autrefois, complètement abandonné... c'était vraiment à ce point ? Mais alors, si ce jour-là il ne l'avait pas suivi, et que Kimino ne les avait pas intercepté, est-ce qu'il n'aurait pas... ?
Le Chikara le regardait avec un certain malaise. Son meilleur ami voulait mettre fin à ses jours, et il n'avait... rien vu ? À tout moment, le drame aurait pu arriver. Kano était partagé, son coeur lui faisait souffrir. Il voulait le réprimander, se lyncher, mais se fut sans compter par la fin de sa phrase. Ce qui l'a fait hésiter, et ralenti... ?
« N-Non... ? C'est quoi ? »
Seitô pleurait, et se terra dans un silence qui lui semblait éternel. Et la suite, il ne fut pas prêt. Le rouquin le regardait avec un sourire, malgré les larmes qui coulaient le long de ses joues. Et il lança littéralement une bombe... C'était lui, Kano ? Ses mots étaient puissants, et heurtaient le Chikara de plein fouet. Il était la raison du pourquoi il n'était pas parti, il voulait qu'il se relève, sans lui. Entendre cela était complètement déstabilisant... Si jamais Kano avait baissé les bras, Seitô serait mort. Et fort heureusement, ce n'était pas le cas. Et aujourd'hui, pour être resté, et ne pas l'avoir laissé partir, il le remerciait, et s'excusait. Un héros... Son héros ? Cette parole le renvoyait bien des mois auparavant, la première fois où il lui avait dit qu'il était un héros. Ce jour-là, il lui avait dit qu'il n'avait rien fait pour mériter ça... mais maintenant ? Les choses étaient différentes...
Le Chikara ravalait sa salive, et ses yeux devinrent rapidement rouges et larmoyants. C'était trop. Depuis le début de ce cauchemar, il avait fait en sorte de ne pas craquer, de ne pas pleurer devant lui. Il tenait à ce qu'il ait une image forte de lui, mais maintenant, il ne pouvait retenir ses larmes, suite à ses paroles. Un énorme poids venait de s'envoler... Kano s'avançait vers lui, en le regardant dans les yeux, larmoyant, et le prit dans ses bras, le serrant fort contre lui. Suite à quoi il éclatait en sanglots.
« Ne... Ne refais jamais ça... J'avais si peur de te perdre, de te voir souffrir encore longtemps, cette vision m'était insupportable... Et je suis désolé, je n'ai pas su voir que tu pensais mettre fin à tes jours... J'aurais pu t'aider, te montrer que ce n'était pas le bon chemin à prendre... J'ai été aveugle sur ça, je m'en veux terriblement... Tu... tu as du affronter cette pensée seul... »
Il essayait de reprendre son souffle, mais avait du mal à parler de manière très claire et sensée, disant ce qu'il lui passait à l'esprit.
« Je ne veux plus que ça arrive, la prochaine fois je... je ferai plus attention, afin que tu ne prennes plus jamais de coup comme ça... ou je te guérirai tout de suite... autrefois je n'en étais pas capable, mais maintenant je pourrais peut-être... Enfin, je... je ne te laisserai plus jamais vivre un tel calvaire... Moi qui pensais te comprendre, j'étais à côté de la plaque... je suis désolé... désolé de ne pas t'avoir compris... »
Il le serrait un peu plus, sans pour autant lui faire mal.
« Mais ne t'imagines plus que je puisse continuer sans toi... ! On forme un duo tous les deux, et je ne reviendrais pas là-dessus. Tu as toujours été là pour moi, alors c'est de mon devoir de te rendre la pareille... jamais je ne fuirai face à l'un de tes problèmes. Je serai resté à tes côtés, même si j'aurais du attendre des années avant de trouver une solution pour toi, je ne serai jamais parti, tu sais... Et si jamais c'est à refaire, de devoir t'aider de la sorte, je le ferai. »
Suite à quoi, il se détachait de lui, avec un petit sourire, les larmes coulant à flots sur ses joues.
« Depuis qu'on s'est rencontré, c'est toi qui étais mon héros. Sans toi, j'ignore ce que je serai devenu, ma vie n'avait aucun sens auparavant. Et depuis ce jour, j'en ai trouvé un ; tu m'as tendu ta main, et m'a tiré de ce gouffre, en donnant une raison à mon existence. Et encore aujourd'hui, tu l'es toujours, mon héros. C'est, j'imagine... un juste retour des choses, n'est-ce pas ? J'ai enfin pu faire amende honorable de tout ce que tu m'as offert, Seitô. »
Il lui souriait, essuyant les larmes qui coulaient.
« Merci de m'avoir fait confiance, et de ne pas m'avoir abandonné... La vie sans toi aurait été... insoutenable, et inimaginable. »
Un énième coup de manche sur ses joues, et il le regardait, d'un air gêné. Le voir sourire était la meilleure des récompenses ? Seitô venait de lui prouver le contraire, en lui offrant plus qu'un sourire. La glace s'était finalement brisée, et il s'était confié à lui. Il le comprenait enfin.