Solitude

Je n'ai pas trouvé d'autres refuges que cette vieille grotte miteuse. Il y faisait sombre et je ne passais pas une nuit sans ressentir le froid de l'automne. C'est pourquoi j'avais décidé de récolter suffisamment de bois pour produire différentes sources de chaleur dans les différents coins de la grotte. Une grotte où j'ai élu domicile alors que je m'étais promis de quitter ces plages qui me conduisaient de nouveau vers une solitude des plus dangereuses. Je sentais ma folie se décuplait et plus les jours passaient, plus je l'entendais me donner des ordres. J'agissais pour elle, plus que je ne le faisais pour moi. Seul face à moi-même, je trouvais du réconfort à l'entendre me parler.

C'est pourquoi je ne pouvais pas la laisser mourir de froid. J'étais en train de construire de petites cheminées avec des rochers, du bois et quelques brindilles d'herbes. Je n'étais pas très doué pour allumer un feu, c'était donc un véritable challenge pour moi. Une chose est sûr, je devrais être vigilant pour ne pas les perdre et devoir tout recommencer.

Cette grotte, bien moins miteuse après y avoir élu domicile depuis un an, se composait d'un lit et de meubles de fortunes construit avec les moyens du bord. Les plages noires ne permettent pas de vivre correctement et je remercie ma condition de vampire pour avoir réussi à survivre une année de plus.







Une claque vint me frapper en plein visage. De façon incontrôlable, je venais de me porter ce coup comme s'il s'agissait de lui. Cette voix. Qui était-il ? Pourquoi s'acharnait-il ?

Doucement, je quitte ma maison de fortune pour voir apparaître les premiers rayons de soleil. Il faisait si sombre à l'intérieur de la grotte que je fus presque aveuglé par la lumière qui jaillissait du soleil. D'un pas lent et fatigué, je marchais sur le sable noir de la plage à la recherche d'une forêt et j'espérais y trouver de quoi manger... mais j'étais bien loin d'imaginer ce qui m'attendait.

Voilà des heures que je marche seule sur l'immensité des plages noires tout au nord du monde connu. C'est la première fois que mon destin m'emmène dans ce désert austère et humide et j'ai bien l'impression de m'être perdue. A perte de vue, s'étend sous mes yeux une longue bande de sable noir, bordée par une falaise abrupte. Le relief en ces lieux y est agressif, tout comme le climat qui, aidé d'un vent humide et violent vient transpercer mon âme de froid. Mes longs cheveux nacrés clappent dans les bourrasques et viennent de temps à autres fouetter mon visage endolorit par le froid. Des heures que j'arpente cet endroit à la recherche d'un lieux ou je puisse y prendre une pause bien méritée, me réchauffer et peut être dormir un instant, mais rien ici n'est fait pour venir en aide aux âmes perdues. Tout n'est que désolation et solitude.

Après des heures et des heures de vagabondage, la nuit, délicatement se retire peu à peu et emporte avec elle le silencieux et sombre manteau dont elle s'était parée. Les rayons du soleil viennent réchauffer ma peau et mon corps et m'apportent une sensation de réconfort bienvenue au petit matin. La douce lumière de l'aube vient dessiner les reliefs du bord de mer et ma vision s'améliore peu à peu. Au loin je distingue un trou dans la roche duquel semble s'échapper de la lumière. Les ombres sur les murs de la paroi de pierres virevoltent comme si des flammes éclairaient ce qui m'apparaît comme une grotte.

M'approchant avec prudence, je passe la tête pour évaluer la situation. La grottes est peu profonde, mais ce que j'y vois me confirme qu'elle est habitée. De vieux meubles de fortune trônent ici et là, n'attendant qu'un courant d'air pour s'effondrer. Et au milieu, un foyer de pierres ou y brûle un petit feu sur le déclin. La grotte est vide, mais le propriétaire n'a quitté les lieux que très récemment. Malheureusement le vent et les vagues sont venus effacer les traces de l'homme laissées dans le sable.

Ni une ni deux, je m'accole au foyer et souffle pour le raviver dans l'urgence. La chaleur du feu est une bénédiction pour mon corps qui attendait du réconfort depuis si longtemps. Une fois la flamme repartie, je dispose des morceaux de bois entreposés dans la caverne pour entretenir le feu. Je sais que je ne dois m'accorder qu'une légère et bref pause afin de repartir avant que le propriétaire des lieux ne revienne de sa promenade. Sans quoi notre rencontre pourrait être violente. Enfin tout dépendra de sa réaction, mais je préférai éviter ce type de déconvenue. Mes sens en alerte, je guette le moindre bruit, le moindre mouvement suspect afin de profiter de ma pause en toute sécurité.

L'automne était froid. Nous approchions dangereusement de l'hiver et ce n'était vraiment pas à mon avantage. J'avais quitté ma grotte dans l'espoir de trouver de la nourriture, mais je savais que mon escapade de durait pas longtemps. Je ne peux pas risquer de perdre mon feu. D'ailleurs, je devrais songer à en créer un deuxième. Peut-être que mon nouvel habitat deviendra beaucoup plus vivable.

Faiblement, je rejoignais une petite forêt d'à peine quelques kilomètres. Elle se situait sur une énorme dune et m'offrait, depuis cette longue année, la nourriture dont j'avais besoin. C'était essentiellement des animaux. Si j'étais chanceux, j'obtenais un festin, si la malchance me guettait, je me contentais de sang d'insectes... moi qui pense avoir connu le pire avec du sang de porc, j'avais atteint le summum sur ces plages. Heureusement, cette journée sera plus fructueuse que la veille. Aussitôt rentré dans la forêt, un lapin se hâte de quitter un buisson à ma vue. Sans réfléchir, je m'élance vers ce dernier. La chasse n'avait pas duré bien longtemps, ce petit être était sans défense face à démon tel que moi. D'une main de fer, je lui saisis le coup que je broie sous ma force. Sans vie, je l'approche délicatement de mes crocs que je plante férocement.

Malheureusement, le plaisir fut de courte durée. Un lapin n'offrait que peu de sang. J'étais à peine reput, mais la situation exigeait de se contenter d'un petit repas.





J'enrageais de l'entendre me parler de cette manière. Pourtant, je continuais à l'écouter. J'étais habitué et il était ma seul compagnie. Jetant le lapin au-dessus de mon épaule, je rejoins la grotte très bruyamment. Suffisamment pour être entendu par mon nouveau visiteur. Je n'en étais pas sûr, mais quelque chose me paraissait bizarre. Comme si mon habitation venait d'être souillé. C'est alors que je découvre cette femme aux cheveux blanchâtres. Je tape subitement dans mes mains pour attirer son attention.







J'étais fou, mais je savais réfléchir. Cette femme, qui utilisait le feu pour se réchauffer, ne ressemblait pas à une ennemie. D'ailleurs, j'étais incapable de savoir ce qu'elle était. Ses cheveux blancs pourraient faire croire à une Gaikotsu, mais je les connaissais trop bien. Ce n'était pas le cas. Une Kaguya ne serait pas forcément mieux... eux qui ont longtemps vécu avec nos pires ennemis. Je devais me méfier. Une main dans le dos, mes ongles grandissaient petit à petit pour former de longues lames de sang. Je ne comptais pas l'attaquer, j'assurais mes arrières.





Le regard vers le bas, je continuais à me parler à moi-même, un débat s'étant installé sur notre façon d'agir face à cette visite... inattendue.

Au fur et à mesure la chaleur du feu fait son office. Mes muscles se détendent petit à petit et mon corps se réchauffe. Une sensation bienvenue à l'approche de l'hiver glacial qui règle au nord du monde. Les terres arides que j'arpente depuis de nombreux jours ont eu raison de ma volonté et ce léger réconfort apporté par les flammes me libère un peu l'esprit. Je tends mes mains vers le feu afin de les réchauffer d'avantage.

A l'extérieur de la caverne, des bruits de pas se font entendre et résonnent à l'intérieur des pierres. Quelqu'un approche, surement le propriétaire des lieux qui est de retour de sa petite balade matinale. Sur mes gardes j'approche la main a l'arrière de ma ceinture et plonge cette dernière dans le petit sac qui contient mes armes. J'empoigne un kunai et me relève pour me mettre sur mes appuis, prête à agir selon les circonstances.

Ce que je vois apparaitre devant la grotte me rassure un peu. Un homme frêle à la peau très pâle se dresse à l'entrée, un lapin décédé sur l'épaule, il revient surement de la chasse. Je ne peux prévoir ses réactions maintenant qu'il m'a vu à l'intérieur de ce qui semble être son habitation. Je ne fais aucun geste brusques pour ne pas retranscrire d'agressivité au travers de mes mouvements. Lui également ne semble pas vouloir attaquer, et parait plus surprit qu'autres choses.

Cependant quelque chose cloche. L'homme n'est pas claire dans ses propos. Il parle, il hurle, il chuchote. Tout es confus et je n'arrive pas bien à le cerner. La folie semble s'être emparée de lui. Si il vit seul dans ces grottes depuis plus de temps que je ne peux l'imaginer, je devine aisément qu'il ait pu tourner la carte en attendant la mort qui tarde à venir le chercher.



Lui lançait-je en retirant la main de mon sac après y avoir lâché mon Kunai. Je lui présente mes mains, face à lui pour lui montrer que je ne suis pas armée et que je n'envisage pas de passer à l'offensive. Mais je ne suis pas folle, je reste fortement sur mes gardes, prête à bondir au moindre geste suspect du propriétaire des lieux.



Je fais signe à l'homme de rentrer dans sa grotte pour se rapprocher du feu et venir réchauffer son corps qui doit-être comme le mien juste avant, congelé par le froid glacial du matin.

Au premier regard, cette rencontre ne m'était pas de bon augure. Perdu dans ma solitude depuis des années, je n'étais plus aussi habitué aux contacts humains. Ma rencontre avec Makoto en était la preuve parfaite. Sortant de mon ombre petit à petit, la jeune femme se dévoilait et montrait une silhouette parfaite et des cheveux d'un blanc étincelant. Son visage était doux, mais trompeur. Tout autant que moi, elle devenait méfiante à mesure que nous nous découvrions.

Il faut avouer que je n'ai pas été très accueillant. Cette maison est la mienne et je n'ai pas pour habitude de la partager. Seul cette voix à l'intérieur de moi est acceptable... pourtant cette solitude me ronge. Elle me détruit à petit feu. Finalement, ma colère et ma folie étaient remplacés par de la sérénité et de la courtoisie. Une attitude qui avait nettement amélioré les tensions qui venaient de s'installer. Après tout, elle ne paraissait pas agressive et ce n'est pas une main dans le dos qui montrerait le contraire. Qui suis-je pour lui reprocher sa méfiance ?

Je continuais ce débat interminable avec moi-même lorsqu'elle pris la parole pour la première fois. Je ne sais pas si je dois lui faire confiance et il a peut-être raison de me demander de la chasser de mes terres. Finalement, ses gestes accompagnaient ses paroles et je ne pouvais que me résoudre à la croire. D'un geste brusque, je balance ma proie sur le sol. C'était peine perdue, j'avais mis trop de temps à rentrée, son sang est déjà avarié.





Tremblant, coléreux, je ne supportais plus ses remarques douteuses. Ma lutte permanente se reflétait à la fois sur mon visage et mes gestes. Les poings serrés, le regard dans le vide, il était clair que je montrais des signes de lutte intérieure. Tout à coup, la raison me revient et je désigne du doigt le lapin près du feu.



Profitant de ma lucidité, je réfléchissais déjà à un moyen de trouver le chemin qu'elle recherchait.



Je ris subitement de folie.



M'approchant du feu et de ma nouvelle compagnie. Toujours méfiant, je restais sur mes gardes en prenant soin d'amasser suffisamment d'énergie pour me protéger.

Les tensions s'apaisent au fur et à mesure que notre discussion avance. Je peux voir subrepticement que son visage s'adoucit et que ses muscles se détendent. Visiblement ma volonté de lui montrer que je ne suis pas hostile fonctionne et qu'il est réceptif à mes actes volontairement pacifistes et calme. J'ai volontairement employé des mots directs et durs pour lui signifier qu'à la moindre intention néfaste de sa part je serais en mesure d'agir et de me défendre. Il ne m'effraie pas plus que ça et il est important pour moi de lui montrer que nous devons discuter d'égal à égal.



L'homme balance la victime de sa chasse sur le sol. cette pauvre bête à moitié décharnée gît à présent sur le sol. De son point de vue l'animal n'est plus comestible. Il apparait donc qu'il ne compte pas en manger la chaire, mais bien le sang. J'ai donc à faire à un vampire affamé. Cette situation n'est pas sans me rappeler de nombreux souvenirs que j'ai vécu avec cet Akamane. Intérieurement j'enrage à me remémorer mon passé commun avec cet homme. Lui qui à fait de moi la bête sauvage que je suis devenue, celui qui à volé ma vie et mon insouciance. Qu'est-il devenu aujourd'hui ? A vrai dire, je ne préfère pas le croiser à nouveau. Arriverai-je si cela se produisait à contenir mes élans meurtriers. Moi qui rêve depuis tant d'année de voir son corps mort, gisant à mes pieds, éventré par mon kunai Vengeur.



A ce moment là, un frisson parcourt mon corps. Mes muscles se raidissent à nouveau. Le souvenir douloureux qui embaume mon âme a cet instant brule en moi. Je me souviens ce dont le vampire que j'ai fréquenté par le passé était capable. Une véritable bête enragée, dénuée de sens commun et de contrôle qui ne vivait que pour le sang de ses victimes. Intérieurement je lutte pour ne pas faire d'amalgame. Le vampire qui se tient devant moi n'est pas Akamane, et j'ai bon espoir qu'il ne soit pas la bête sanguinaire que j'ai connu. Inutile pour le moment d'agir à son encontre. Je décide de lui laisser une chance et espère que celui ci sera bien différent de mon fantôme du passé. Je retire la bande de tissu sur mon avant droit, et découvre ma peau, laissant apparaître une grande cicatrice de quelques centimètre de long.



De la main gauche j'attrape une petite coupelle qui se trouve dans la poche de voyage pendue à ma ceinture, puis la pose au sol, face à moi. Dans un second temps j'attrape le Kunai. Celui là même qui m'a déjà servi à sauver puis laisser pour un mort un vampire par le passé. Doucement la lame s'enfonce dans ma peau. Je perfore ma chaire à l'endroit même de l'autre cicatrice. Tout en gardant un oeil sur le propriétaire hémophile de la grotte, je mordille ma lève inférieur pour canaliser ma douleur. Mon avant bras se recouvre de sang, qui ,longeant ma peau, s'agglomère en grosses gouttes tombant et remplissant la petite coupelle. Je récupère cette dernière, noyée dans le sang rouge et écarlate de mon corps, et la pose devant mon acolyte. En faisant un point de pression pour stopper l'hémorragie je lui dis :



Depuis le début je sens l'homme tiraillé par une guerre intérieur. Comme si ses pensées s'entrechoquaient dans un lutte intestine contre elles mêmes. La folie l'a-t-elle gagné. Est-ce que tous les vampires sont sujets à devenir des bêtes incontrôlables dénuées de tout sens commun. Ou bien est-ce la solitude qui a rongé son âme, laissant son enveloppe charnelle à la merci de ses démons intérieurs. Difficile à dire. Pourtant son visage marqué ne s'arrête pas de se contorsionner, comme si l'homme combattait pour faire taire en lui une voix supérieure qu'il ne déniait écouter. Je fais le tour du foyer de chaleur pour attraper le lapin. Deux entailles rapide au niveau des tendons à l'arrière des pattes, je lui retire le pelage qui le recouvrait. Pauvre bête, tu n'est pas morte un vain. La tête retirée, les entrailles vidées sur le sol, je le perfore d'un ton bâton et le place au dessus du feu. Il sera mon repas de ce soir.

Un Kenketsu par obligation. Je profitais des pouvoirs que me procurer ce clan, mais ce n'était pas par choix. Il m'arrive de regretter ma vie d'autrefois, même si je peine à me remémorer ce que j'étais réellement. Ce que je n'oublierais jamais, c'est cette personne qui m'a transformé et anéantie ma vie pour l'éternité. Est-elle morte ? Est-elle toujours vivante ? Ce qui est sûr, c'est que si nos chemins se recroisent, je ne périrais pas tant que je ne l'aurais pas détruite. Si je suis incapable de lui apporter une mort définitive, je ferais de sa vie un enfer et la folie sera son quotidien. Cette même folie qui est apparue à cause d'elle.

Je pouvais ressentir les frissons de cette Kaguya. Je n'étais pas sûr de moi, mais elle confirmait mes doutes sur sa connaissance des vampires.



Quelle ironie que de les définir comme des monstres abjectes lorsque l'on sait que j'étais une bête sanguinaire pendant mes cent premières années. Des années terribles à vivre la persécution de mon propre clan. Des années à être assoiffé de sang et effrayé par le soleil. Je me suis enfui et à quel prix ?





Je ne me sentais pas confiant, pas encore. Le moindre geste était une attaques potentielle dont je devrais me protéger. Cependant, quelle surprise que de découvrir cette longue cicatrice de plusieurs centimètres. Fasciné, intrigué. Les paroles qui suivaient ce geste ne laissait plus de place à aucun doute. Je m'apprêtais à saisir ce bras, les yeux rêveurs. Néanmoins, ma lutte intérieure et incessante portait ses fruits. Je tenais le coup et c'était une bonne chose à l'écoute des menaces de la Kaguya. La situation devenait de plus en plus insoutenable, à genoux, ma tête entre mes mains, je m'arrachais les cheveux. C'était un supplice de voir ce sang couler après que cette lame se soit enfoncé dans sa chair. Pourquoi faisait-elle ça ? Était-elle l'une de ces personnes à profiter de la faiblesse des gens ?

Cette voix dans ma tête, elle ne cessait de me le répéter. « Tue-là ! ». Non ! Pas encore, je ne veux pas, pas maintenant. Pourquoi refusait-il de croire que je puisse trouver des alliés ? FERME-LA !

Le sang coulait à grosse goûte dans une coupelle de fortune récupérée dans ma grotte. En quelques secondes, la coupelle débordait de sang humain. Les yeux écarquillaient, mon regard se balançait entre la coupelle et la Kaguya. Je ne saurais me souvenir quand j'ai connu une telle gentillesse. Doucement, cette voix intérieure s'adoucissait et pour la première fois, nous étions d'accord.

dit-il calmement. Lui aussi avait faim.

Très vite alors qu'elle affirmait que je pouvais me nourrir, j'ingurgitais la totalité de la coupelle. Prenant soin de nettoyer mon visage, je ne pouvais plus que constater la plaie qu'avait provoqué ce geste de bonté.



Le bras dirigé vers une sorte d'étagère en bois, je désignais un petit coffret remplit de matériel pouvant être utilisé à des fins médicales. C'était très rudimentaire, mais cela avait le mérite d'être là.



Je n'avais pas prononcé ce mot depuis très longtemps. Ma méfiance s'apaisait. Tout le monde n'était pas si mauvais...

Je la regardais préparer son repas à son tour. La vue des entrailles de cet animal me donnait la nausée.



Après tout, cette grotte, c'est chez moi ?

Le repas en pleine cuisson, j'apprenais un peu plus de choses sur les raisons de sa présence.





Ces gens... pour qui elle travaillait, m'intriguait grandement. J'espérais pouvoir en savoir un peu plus en prenant part à ses recherches. Qui sait, peut-être que cette rencontre m'emmènera loin de ces plages... encore faut-il que cette rencontre ne soit pas à l'image de celle avec Makoto.

Peu à peu la tension retombe à l'intérieur de cette grotte. Les différentes animosité s'apaisent, la méfiance laisse place au doute et le doute laisse place à un semblant de sérénité. Jamais je ne baisse ma garde, surtout face à un vampire. J'en ai déjà bien trop souffert par le passé, et c'est une erreur à laquelle on ne me prendra pas deux fois. Je ne sais que trop bien la folie qui les anime et les démons qui les possèdent. Bien que superficiellement civilisés et éduqués, ils n'en restent pas moins des bêtes primaires, assoiffés de chaire et de sang. En témoigne le regard de mon hôte quand je me suis ouvert le bras pour le nourrir. J'ai pu lire sur son visage la lutte intestine entre m'abattre pour me boire, ou faire le simple effort d'attendre pour obtenir sa nourriture sans violence. La tête prise en étau à l'intérieur de ses mains, il combat le mal qui le ronge surement depuis trop longtemps déjà et pourtant, pour le moment il arrive à maintenir le contrôle, à prendre le dessus sur la partie bestiale de son âme. Tout peut déraper, d'un instant à l'autre. Je suis prête à agir, et à donne la mort si il le faut.



J'entend la chaire de mon repas qui commence à crépiter au bout de mon bâton noircit par les flammes. La viande commence à brunir et à griller à certains endroit. Le sang s'est calcifié et durcit, et l'odeur de la bidoche envahit à présent l'ensemble de la maison de pierre, par courant mes narines d'une humeur bienvenue. Voilà bien trop longtemps que j'attend un repas chaud, dans un endroit à l'abri de la pluie et du vent qui cisaille ces plages. J'espère pouvoir trouver un peu de répit au fond de ce trou de granit perdu dans les confins du monde connu. Je retire délicatement l'animal cuit du bout de mon bâton et commence a séparer la chaire du reste. Les os de la pauvre bête craque à tout va. assez facilement j'arrive à séparer un petit tas comestible et entame mon repas.



Au fil de mes pérégrinations a travers le monde, il est rare que l'occasion de raconter mon histoire se présente, à tel point que parfois je semble en oublier les morceaux. Comme si mon passé devenait souvenirs, souvenirs devenaient réminiscences avant de disparaitre dans le monde onirique du fantasme et des mensonges. Plus j'avance plus je me perds, qui suis-je réellement. Cette histoire qui me définit et que pourtant j'oublie causera surement la fin de mon identité. Pourtant j'essaye, chaque jour, je me rappeler et de me souvenir ! Ce sont d'abord des détails qui échappent à ma mémoire, puis des visages et parfois même des moments, souvent sans importance mais quelques fois capitaux.



Au fil de on discours je dévore sans m'en rendre compte l'intégralité de mon repas. La faim est si pressante qu'elle me sépare de ma réalité. Jusqu'à ronger les os, j'ingurgite tout ce qu'il est possible de manger et pourtant j'en veux encore. D'un pas assuré je me dirige vers le petit coffre désigné par le vampire pour y récupérer un bandage. Ce que je vois ne me réconforte pas vraiment, a part de vieille guenilles tachées par le temps et l'humidité rien de tout ce qui se trouve à l'intérieur ne pourra faire office de bandage. Pour aujourd'hui au moins ça fera l'affaire.



L'avant bras recouvert d'un bout de tissu, l'hémorragie commence à m'atténuer. Le continu malgré tout à faire un point de pression pour contenir les dernières coulées qui pourrait survenir, afin de ne pas tenter la bête sanguinaire qui me fait face. Je retourne près du feu à ma position initiale et reprend le fil de notre conversation.