« Refuser les ordres pour dire ce que l'on pense au chef. Quelle idée ! Je pourrais tout aussi bien me broyer le bras dans une des roues de mon char ! »
Travailler pour des criminels contenait son lot d'ennuis, comme ce genre de mission sanguinaires, mais possédait aussi de nombreuses qualités : habituellement, le rôle de Kingu était de traquer les mauvais payeurs et les voleurs trop gênants pour le clan. Il se retrouvait alors souvent sur les routes, à camper et à profiter du vaste monde. Ce qui n'était pas pour lui déplaire.
Très souvent, il s'arrêtait dans les villages afin de se restaurer et obtenir des informations sur la politique du monde et quelquefois, il lui arrivait de jouer aux jeux de stratégies en compagnie de quidams qu'il ne reverrait sans doute jamais.
Yuko lui annonçait leur arrêt pour la nuit. Les deux Abura à leurs côtés étaient quasiment des inconnus : ils ne s'étaient rencontrés qu'une ou deux fois et ne s'étaient jamais échangés de mot. Taciturnes, ils n'en décrochaient guère plus pendant cette chasse. Ils avaient le visage buriné, laid et huileux, des cheveux malpropres et leurs vêtements empestaient la viande faisandée. Même d'après les critères de la famille, ces hommes étaient affreux.
Quand ils s'arrêtèrent, Kingu fit de même, attrapa son baluchon et en extirpa une gourde qu'il s'empressa de porter à la bouche, avant de s'essuyer grossièrement la bouche, battant du même mouvement ses cheveux graisseux, mais coiffés.
« Dis-moi, Yuko. J'ai oublié, quel est notre lien de parenté, exactement ? Cousins éloignés ? Ou bien es-tu peut-être une sorte de tante, un peu jeune ? Avec autant de personnes dans le clan, je m'y perds... »
Cette question n'avait en réalité que peu d'intérêt, elle venait juste de lui traverser l'esprit. Ce qui justifiait, pour lui, le besoin pressant de la poser.
« D'accord pour "la bourse ou la vie", de toutes manières c'est un peu le job... En revanche, aurais-tu un plan d'approche ? Tu voudrais peut-être que je fasse diversion avec quelques flèches ? »