Vestige du passé

Kako No Uta

Le silence dans la maison était presque trop parfait.

Dans cette rue fermée de Shinsekai, chaque chose semblait tenir sa place avec une précision presque chirurgicale : les pierres du chemin parfaitement lavées, les arbres taillés au millimètre, les bruits étouffés par l’épaisseur des murs et des protocoles. Dans l’une de ces maisons mitoyennes, au second étage donnant sur un jardin sec, c'est désormais ici que vivait Mai.

Elle ne voyait pas la lumière traverser les cloisons de papier, mais elle en sentait la chaleur fine sur ses mains. Son masque, création impériale, aussi élégante qu’intrusive, dessinait pour elle les formes du monde, traçant des contours rouges et blancs autour des choses vivantes. Une technologie précieuse offerte par l’Empire en échange de... tout le reste.

Un choix de vie que la Gaikotsu acceptait. Préférant de loi celle qu'elle avait vécu à Konoha avant tout les évènements tragiques qui s'y sont produits. Cette immense solitude d'autrefois lui avait rongé son coeur petit à petit, cette incompréhension de son nouveau don l'avait jadis poussé à la folie. Mais contre toute attente après un exil forcé par les civils et les quelques shinobis restants, la voilà enfin qui trouvait sa place.

L'accueil de l'Empire avait réussi à la... transformer là où les chants de ses ancêtres ont échoués. L'homme en tête de tout cela avait trouvé la solution à son problème, l'aidant ainsi à bien mieux contrôler ce pouvoir étrange. Elle ne faisait plus qu'un avec désormais. Un pouvoir appartenant au vestige d'un passé très lointain et dont peu de gens en connaissait l'existence maintenant. Une femme fragilisée par le court du temps, mais qui désormais était devenue plus forte et croyait en de nouvelles doctrines.

Une vibration discrète, un froissement contre la porte d’entrée. Elle descendit, chaque pas résonnant doucement sur les tatamis. Elle récitait à voix hautes les versets du Code du Juste Pouvoir avant d'ouvrir la porte. Un messager venait lui transmettre un message codé que seule Mai pouvait comprendre.

Dialogue de personnage
« Passez le bonjour à vous savez qui. »

Demandait-elle à l'inconnu. Refermant avec douceur la porte d'une main et serrant le message dans l'autre. L'enveloppe cachetée, lisse, était encore tiède. Mai resta un moment sans l’ouvrir. Ce n’était pas du suspense. C’était de la fatigue. De cette fatigue particulière de ceux qu’on utilise trop et qu’on ne considère jamais tout à fait guéris.

Elle finissait par remonter, puis elle s’assit. Le jardin intérieur, calme, offrait l’illusion d’un monde en paix. Lentement, le sceau impérial se brisa sous ses doigts. À l’intérieur, une missive brève et impersonnelle... Elle ne sourit pas. Elle ne pleurait plus depuis longtemps non plus. Il n’était jamais question de confiance, ni de pardon. Seulement de service.

Elle rangea la lettre, ajusta les sangles de son masque, et se leva.

Dialogue de personnage
« Encore une fois... Le masque voit. Les hommes ferment les yeux. Et moi, je me salis entre les deux. »

Publié il y a moins d'un mois

Kako No Uta

Le message était clair, même dans sa froideur bureaucratique : Discrétion, élimination autorisée et aucun témoin. Une cible à identifier au-delà des murs qui protégeait la ville de Kinchū et le silence comme unique récompense. Elle en connaissait les règles désormais et savait à qui elle donnait sa vie. Mais ce que l’Empire ne disait jamais à voix haute, c’est pourquoi on l’envoyait, elle, à la nuit tombée.

Son pouvoir s’était éveillé à la douleur, puis nourri du rejet. Le Meiton. Un mot ancien, effacé des textes officiels, encore chuchoté dans certains cercles comme une chose qu’on préférait croire disparue. On disait que ceux qui le maniaient ne contrôlaient pas seulement le vide : ils le devenaient. Ce n’était pas un feu qu’on invoquait, ni un vent qu’on dirigeait. Le Meiton, c’était l’absence. L’annulation. Une extension de soi dans l’ombre, un pouvoir qui enveloppait, qui noyait, qui étouffait. Il ne brillait jamais. Il dévorait la lumière. Il ne frappait pas fort ; il effaçait. Un pouvoir lié à l’instinct, à la traque. Parfait pour suivre les traces d’un traître.

Au fil des années, Mai avait appris à s’y fondre, à ne faire qu’un avec l’obscurité. Les ombres réagissaient à sa présence comme une seconde peau. La nuit, elle voyait sans voir. Elle se déplaçait là où les regards ne portaient plus. Parfois, elle pouvait même désolidariser sa propre silhouette, glisser une part d’elle-même à travers un mur, un interstice, une faille. Une archère invisible dans la nuit et une prédatrice que l’Empire gardait dans l’ombre.

Elle n’y pensait plus vraiment. Ni au regard des autres, ni au sien. Elle ajusta le carquois sur son dos, gestes silencieux, précis, maîtrisés. Elle en avait l’habitude. Elle n’était plus tout à fait une femme aux yeux de ceux qui l’envoyaient. Le mot absence étai ce qui pouvait au mieux la définir désormais. Un instrument direct du Gouverneur, déployé sans détours pour faire appliquer la volonté de l’Empire. Ce même Code du Juste Pouvoir qu'elle se répétait sans arrêt.

Le Meiton que possédait Mai, n’était pas une arme secrète, ni une ruse. C’était un pouvoir qu’on exhibait, une force brute que l’Empire brandissait pour écraser toute opposition, pour traquer sans relâche ceux qu’il voulait chasser: les shinobis, les traîtres, les insoumis.

Pour la trentenaire, tout cela n'était plus un ni don, ni une malédiction. Elle était un outil, une extension froide et tranchante de la loi, une méthode brutale mais efficace pour traquer ce que l'Empire voulait effacer.

Dialogue de personnage
« Il est temps. »

Se répétait-elle en franchissant le seuil, abandonnant derrière elle le calme illusoire de son refuge pour entrer pleinement dans le jeu brutal qui l’attendait.

Publié il y a 22 heure(s)