Décidément, journée après journée, rien ne s'arrangeait. Était-ce une punition pour ce qu'il avait fait quelques jours auparavant à ce rouquin ? Ou par pure jalousie, tout simplement. Toujours est-il qu'aujourd'hui, et jusqu'à ce que quelqu'un d'autre vienne le relever, Nakatsu se retrouvait là, planté dans cet endroit poisseux où le soleil n'avait jamais dû illuminer les lieux ne serait-ce qu'une fois dans sa vie d'astre solaire, à attendre. À garder, plus précisément. Gardien de prison, vous parlez d'un boulot gratifiant. Séquestré et avec pour seule occupation la séquestration d'autres malchanceux dans son genre ou des personnes plus malveillantes. Néanmoins, Nakatsu avait réussi à obtenir un semblant de silence. Il faut dire qu'après avoir pété les dents d'un prisonnier qui lui proposait quelques trucs salaces en hurlant comme un goret, le silence était assez vite retombé. Fallait pas le faire chier, le Chikara. Surtout pas quand il n'était pas dans son bon jour et que vous n'étiez pas dans ses bonnes fréquentations.
Des bruits de pas le sortirent de sa torpeur. Tout de suite, son corps entier se réveilla et se désengourdit. Un seul mot lui venait à la bouche : la relève, la relève. Une silhouette se découpait dans la pénombre des lieux, brisant très vite tout espoir de sortie. Car non, ce n'était pas la relève. Bien qu'il faisait sombre, reconnaître l'arrivant ne fut pas bien difficile. Et pour cause, c'était l'un des chefs du village ! Rien que ça ! Nakatsu ne put réprimer un air entre la déception et la surprise. Qu'est-ce qu'il pouvait bien faire là ?
Sa question eut bien vite une réponse car il remarqua derrière le grand homme un corps qui se déambulait tant bien que mal, apparemment en assez mauvais état.
Son corps claqua sur la pierre froide qui constituait le sol dans un brui sourd d'os.
« Je m'attendais à voir n'importe quoi passer cette porte. N'importe quoi sauf vous.
Le B714, hm ? On va s'en occuper de suite. »
À ces mots, il ajouta un sifflement distinctif dont le seul but était d'appeler son collègue qui lui aussi moisissait dans un couloir adjacent. Pendant ce temps, son pied vint s'écraser sur la carcasse de ce pauvre et malveillant criminel pour s'assurer que celui ne cherche pas à se faufiler discrètement avant de prendre ses pieds à son cou lachement.
« B714, isoloir, c'est pour toi ! »
Après quoi il reposa ses yeux azurés sur le seul qu'il acceptait de nommer par le titre de Kage. Parce que l'autre rouquin, ce n'était qu'un imposteur. Ni plus, ni moins.