Pendant un instant bref, les deux hommes retournèrent à un jeu aussi vieux que leur relation complexe. Ils étaient, brièvement, retombés dans les âges fougueux, qui avaient pour éternel moteur la passion qui pouvait les animer. Amusé par la réaction de son amant, le Bellâtre se posa sur la rambarde, avant de se laisser simplement glisser jusqu’en bas de l’escalier. Agile, il était. Le Miwaku était un piètre combattant, mais il avait l’agilité et la grâce d’un oiseau. L’éphèbe avait aussi à cœur d’entretenir son corps, afin de conserver longévité le plus longtemps qui lui était possible.
Une fois en bas de l’escalier, l’Androgyne posa pieds au sol, et reprit sa marche avec autant de grâce qu’il était possible. Élégante démarche, suffisamment lente pour susciter le désir, suffisamment rapide pour ne pas être frustrante et étrange, il arriva au niveau du Hattori, avant de se percher juste en dessous de son visage, en plein cœur de son espace vital. À découvert, affichant un sourire taquin, il murmura.
Puis, dans un rire cristallin et amusé, le Bellâtre se faufila jusque dans son dos, avant de s’échapper définitivement, pour se retrouver de nouveau derrière le comptoir.
« Alors, cette sonnette ? »
Puis, le voilà, le fameux chef d’œuvre. L’oiseau bleu observait l’objet convoité, et précieux, d’un regard minutieux. Le topaze ne lui échappa pas, et la qualité des finitions du métal non plus, malgré quelques imperfections. On reconnaissait alors les marques d’un travail minutieux, mais sommes toutes loin d’être l’œuvre d’un maître. Il fit un sourire, c’était un travail de longue haleine, précis, et probablement avec un investissement bien trop important pour une simple sonnette. Un travail du cœur. Alors, à voix basse, il annonça son verdict.
« Douce originalité. Bleu comme la nuit, et le topaze or comme la lumière… Comme la lueur d’une flamme de bougie, dans une chambre au cœur de la nuit. »
Son regard se fixa de nouveau vers le Hattori, et il s’approcha pour se placer juste en dessous de lui. Il avait murmuré tout haut
« Merci… Je ne regrette pas mon autre sonnette. »
En privée, seul dans le hall, le Bellâtre s’autorisa à déposer un doux baiser sur la joue du Hattori. Puis il murmure à son oreille.
« Je suis curieux de savoir… »
Vivement, et sans prévenir, il quitta cette position intime pour rejoindre son emplacement originel. Puis, avec son bras drapé de soie, il se cacha avant de demander d’un sourire mi-camouflé.
« Qui est l’auteur d’une telle œuvre ? J’aimerais beaucoup avoir son adresse. J’aime cet aspect travaillé et investis, ce soin des détails, même pour une chose aussi grossière qu’une sonnette… »
Il fixa la sonnette.
« Si belle, et pourtant qui n’a pour unique but de servir sans être chéri ou contemplé. Quel cruel destin… Même pour un simple objet. »
Un énième sous-entendu. La sonnette était aux couleurs du Miwaku, derrière son kimono de soie brodé d’or et ses bijoux.
D'une beauté saisissante, presque fascinante, mais condamné à servir dans l’obscurité.