La Zélée comprenait soudainement un peu mieux les conséquences de la mort de la Kirishitan. C’était elle, sur ses solides épaules, que subsistait l’unification des Kirishitan. L’implosion des Kirishitan était un danger de plus sur sa longue liste de problématique. Malheureusement pour elle, elle ne pouvait plus reculer. Elle en avait trop dit pour simplement s’en arrêter là.
La suite était familièrement douloureuse. Finalement, elle réalisa à quel point ils se ressemblait tout deux. À la différence près qu’elle n’avait jamais connu la perte d’un enfant. Ou presque. Une douleur qu’elle connaissait, et qu’elle savait inimaginable. Seitô l’avait mise dans un terrible état d’anxiété, comme si sa vie dépendait de chacun de ses souffles.
La Dame observait la cicatrice du Kirishitan. Ceci expliquait cela. Un vétéran de la guerre. Comme elle. Il avait eu de la chance, comme elle. À la différence près qu’elle cachait les siennes via un habile sceau et du maquillage pour que personne ne puisse remarquer le prix qu’elle avait dû payé. C’était son jardin intime. Ces cicatrices étaient son histoire. Son sacrifice.
« Les enfants… Ils ne comprennent pas toujours le véritable sens de nos actes. Un génocide n’est que la conséquence d’une victoire écrasante d’un parti sur un autre. L’auteur est un héros s’il gagne pour avoir éliminé la menace, et un paria s’il n’y arrive pas. J’imagine que c’est dans la nature des enfants de se rebeller de leurs parents. Un acte marquant l’indépendance. Quant à la guerre… C’est notre lot à tous, en tant que Shinobi. J’espère œuvrer pour que l’avenir soit plus clément. »
Et pourtant, au fond d’elle, quelque chose lui disait qu’elle œuvrait pour préparer la venue d’un terrible conflit. Dépassant la menace que représentait Gekido. Le monde était calme. Trop calme. Et qui souhaitait la paix, devait constamment se préparer à la guerre.
« Je suis désolée Seth… J’ai failli perdre un fils… Une douleur terrible… Je n’ose imaginer ce que j’aurais pu faire s’il était décédé…. »
La Dame de Fer posa une douce main sur l’épaule du géant.
« J’espère que ta fille te reviendra. »
Seth apporta le plat principal, alors que la zélée restait le regard plongé dans son verre de vin. Elle fut rapidement servie, et goûta le plat. Il était excellent. Elle était bonne cuisinière, mais il fallait reconnaître que son hôte n’avait rien à lui envier.
« C’est excellent Seth. Encore deux verres et quatre bouchées, et je tomberai presque sous le charme. »
La Dame de Fer souriait. Il s’agissait bien évidemment d’une blague, mais qui avait un fond de vérité. Elle le reconnaissait : cet homme savait s’y prendre avec les femmes.
« Non, je suis veuve. Cela va faire cinq ans maintenant. »
Le souvenir était douloureux, mais la Dame de Fer avait fait son deuil.
« Si l’histoire de la redoutable Mako Uzumaki, l’impitoyable Dame de Fer t’intéresse, je pense que tu risques d’être déçue. Ma réputation est surfaite. »
L’Uzumaki ricanait. Son histoire n’avait malheureusement rien d’exceptionnel dans le monde Shinobi.
« Je suis née hors des murs. J’ai appris très tôt à me battre. On m’a même enseignée des techniques aujourd’hui totalement proscrites. Mais dehors, il fallait défendre les siens. Des bêtes sauvages, des bandits, de la maladie, des proxénètes, des marchands d’esclaves… Les menaces étaient nombreuses. J’ai fait ce que j’avais à faire pour protéger les miens. C’est à cause de mon sens de la discipline et de mon fort caractère, et parce que j’ai rejeté un garçon que cet idiot m’a surnommé la Dame de Fer ! »
La Dame de Fer plongea son regard dans le vin, comme si elle pouvait y voir son passé.
« J’y ai perdu des amis, mon premier amour… Ma famille. Tout cela car nous étions hors de ces foutus murs pour un conflit datant de presque un demi-siècle à l’époque. Certes, les Chikara avaient vendu les miens, mais était-ce une situation plus enviable que de mourir à petit feu ? Shido, mon défunt mari, avait la même vision. Nous nous sommes juré de n’avoir d’enfant que lorsque nous pourrions les élever. »
Elle riait de nouveau.
« Mais nous étions jeunes, et fougueux. Et un jour, je suis tombée enceinte. Et par coup du hasard, ou heureux destin, Kenzô, mon aîné, est né l’année même du retour des Uzumaki à Konoha. Ce jour-là, la République m’avait offert un lieu sécurisé pour élever mon fils. Et je lui ai juré de la servir au péril de ma vie. Un juste retour. C’est là que j’ai décidé d’offrir une chance aux Chikara. Cette génération n’avait rien fait de mal. On devait pardonner, pour survivre, pour avancer sereinement. »
Elle mangea un peu de nouveau. Les saveurs étaient étonnantes.
« Je suis devenue Chûnin, puis Jônin. Comme tout les couples, j’ai eu des moments difficiles. Comme toutes les familles, j’ai été heureuse, et attristé. J’ai vécu une vie de mère de famille, et de Shinobi de la feuille. Et j’ai eu un magnifique second fils, Seitô. Un vrai petit démon d’énergie. Mais avec une sens aiguë de la justice et de l’héroïsme… Un vrai chevalier des temps modernes. »
Elle affichait un sourire mélancolique.
« Lorsque les choses devinrent compliquées, Shido et moi-même avons essayé de calmer les tensions. Et lors de cette nuit funeste…. »
La Zélée s’arrêta un moment.
« J’avais fait mon choix. Shido également. Le Génocide d’un clan de la République n’était pas une option. Nous avons combattu auprès des Chikara. Shido est mort cette nuit-là. Suite à quoi, j’ai décidé de me retirer de la vie de Shinobi pour m’occuper de mes enfants, en tant que jeune veuve. Seitô n’avait que 10 ans, Kenzô 14. Ils avaient besoins de moi. »
La Dame de Fer prit une gorgée de vin. Comme si elle cherchait à se justifier.
« Suite à l’incident de l’été dernier, j’ai repris du service pour rendre justice moi-même. La suite, tu la connais. »
La Dame de Fer fit un sourire à Seth.
« Désolée, je me suis égarée… Mais je sais pas... J'en ressentais l'envie, le besoin. Au moins, quelqu’un pourra se targuer de connaître les passifs de la Dame de Fer, l’impitoyable régente de Konoha ! »
Encore une fois, la rouquine lâcha un petit rire. Décidemment, l’alcool lui montait à la tête.
« Enfin, pour répondre plus simplement à ta question : Non, je n’ai personne qui partage ma vie. Mis à part mes deux fils. Mais personne n’avait eu l’audace de m’inviter de nouveau à dîner. Du moins, jusqu’à aujourd’hui… »
La Dame de Fer fit un sourire. Les assiettes étaient vides.
« C’était excellent Seth. Dis-moi, que dois-je savoir d’autre sur le clan Kirishitan ? Est-ce que ce vin te plaît, au moins ? »
La Dame de Fer se décala de la table, le repas étant finis, pour se rapprocher de l’homme. De manière naturelle, sans même s’en rendre compte. La conversation était intime, officieuse. Et puis, elle en avait tout simplement envie.