Le résultat est tombé et Takumi reste on ne peut plus statique devant son nom affiché pour représenter les Chikara. Il était heureux d'obtenir ce poste et se rassure de voir que ses petites escapades des dernières semaines n'étaient pas passées inaperçues. Les gens avaient l'air d'avoir confiance en lui pour prendre le flambeau et il ne voulait pas les décevoir. Il prend le temps de rentrer chez lui et de faire les cent pas pour réfléchir à comment prendre la parole devant son clan. Il ne pouvait décemment pas simplement prendre les voies et partir comme un voleur. Il voulait les remercier de cette chance qu'ils lui donnaient. Lui qui est d'un naturel calme et passif avait décidé de passer à l'action du jour au lendemain. Entre un caprice et une prise de conscience, agir dans l'ombre ne suffisait plus pour faire avancer les choses et il se sentait obligé de faire quelque chose pour que le clan puisse bâtir un avenir meilleur.
La nuit passe, il ne dort pas, car il préfère passer du temps sur son bureau à écrire ce qui pourrait s'apparenter à un discours. Il n'était pas vraiment un homme à prévoir ce qu'il allait dire et préférait la spontanéité aux discours pompeux que réserve la politique et ne peut s'empêcher de se moquer de lui en écrivant. C'est au bout d'une heure qu'il s'arrête et déchire le papier avant d'enlever son bandeau et d'aller se coucher en se disant qu'il fera comme à son habitude et qu'il improvisera. Les gens qui le connaissent n'attendent probablement pas de lui qu'il se transforme en bon petit politicien du jour au lendemain. Il ne dormira que d'une oreille cette nuit, l'impatience d'être à l'heure du discours de remerciement le rendit nerveux, mais il finit par tomber dans les bras de Morphée. Il ne fallait pas plus qu'un rayon de soleil pour le réveiller. Il se lève sans attendre et se prépare. Il fait l'effort de ne pas s'habiller comme un ado en pleine crise, c'est probablement la seule chose qui changera de sa personne au final.
Le voilà affublé d'une de ses tenues entièrement noire avec un col haut. Il ne la sortait qu'en cas de mission officielle et cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas mis les pieds hors du village. Elle était donc intacte et sans un pli. Il se regarde dans le miroir et met le bandeau sur ses yeux avant de prendre une grande inspiration et de sortir de chez lui. Il était encore tôt et le village dormait encore, il ne croise personne et seuls quelques travailleurs matinaux sont de sortie, mais trop occupée à accomplir leur tâche quotidienne pour percevoir le nouveau Dono. Il était discret de nature et passait facilement inaperçu, ça ne l'étonnait pas plus que ça. Une fois la place Chikara traversé, il se dirige vers le bâtiment ou toute la paperasse se fait. Il s'y présente et est conduit dans un bureau qui sera désormais le sien. Un peu austère pour l'instant, mais il fera en sorte de modifier la décoration plus tard. La jeune femme lui indique que le discours aura lieu à midi. Il ne lui reste plus qu'à attendre.
Le temps passe et il tourne en rond dans la petite pièce avant d’entendre les bruits de pas de la femme de tout à l’heure qui lui indique que les gens sont enfin réunis sur la place du quartier Chikara. Il prend une grande inspiration et sautille comme un sportif sur le point de faire une performance. Autant dire qu’il n’est pas très à l’aise, mais il avance en suivant la jeune femme. Il est amené sur une petite estrade. Il constate qu’il y a du monde et fait bonne figure en souriant comme il a l'habitude de le faire. Il se racle la gorge tout simplement avant de prendre la parole.
« Bien le bonjour à tous ! Ceux qui me connaissent doivent se poser une seule et unique question ! “Est-ce que c’est une blague ?”! »
Sa petite boutade avait pour but de détendre l'atmosphère générale, mais aussi sa propre angoisse. Il reprend avec un air plus sérieux.
« Blague à part, merci à tous de m’apporter votre confiance ! Je sais que les derniers événements ont secoué le village de bien des manières. La perte de confiance des hautes sphères, la frustration de ne pas pouvoir agir, la peur de revoir se produire les événements de la nuit maudite… »
Le silence fait place et il reste silencieux à peine trois secondes, mais elles semblaient si longues.
« J’ai longuement été transparent dans le village et j’ai pu parler à certains d’entre vous et me faire une idée de ce qui ne va pas. Un problème qui perdure depuis déjà bien trop longtemps est celui de vouloir notre village s’unir une bonne fois pour toute. Les vieux conflits referont toujours surface si on reste les bras croisés. Je ferai en sorte que le passé reste au passé. Je ferai de mon mieux pour porter votre voix et montrer ce qu'est réellement le clan Chikara. »
Il prend appui sur le pupitre devant lui et regarde le monde.
« C'est avec les Uzumaki et le Kitto que nous avons bâti Konoha, c'est avec eux que nous continuerons de le faire exister ! Le clan Kirishitan pourra nous apporter plus encore. Ne perdons pas espoir de voir Konoha grandir et avancer pour devenir cette puissance de cohésion. Je sais que cette vision ne fait pas plaisir à tout le monde, mais je ferai au mieux pour convaincre aussi ceux qui doutent.
»
Il prend une grande inspiration.
« Merci, encore une fois ! Je ferai tout mon possible pour ne pas vous décevoir et me montrer digne de cette confiance qui m'est accordée. »
Il fait un pas en arrière et recule simplement du pupitre avant de se décaler et se mettre véritablement au bord de l'estrade et de faire une révérence des plus solennelle. Il reste pendant une dizaine de secondes les oreilles bourdonnantes de stress, il n'entend pas les applaudissements et se redresse pour constater que le clan acclamait. Du moins une partie, il savait qu'il n'avait pas l'unanimité, mais il prend le positif pour le moment. Il recule en continuant de saluer les gens et rentre dans le bâtiment, il retourne à son bureau et une fois la porte fermée, il prend le temps d'aller s'asseoir avant de complètement lâcher la pression. Il est enfoncé dans son siège le cœur battant, il enlève son bandeau, mais ferme les yeux et finit par s'assoupir.