Haine et travail

Je suis enfin arriver. Le terrain d'entraînement. Lieu sacré de tout bon ninja qui se respect, me voici. Je ne savais pas quel heure il était mais à voir ce soleil éblouissant me narguer dans son royaume de bleu, j'en conclus que l'on était en début d'après midi.
Plissant les yeux pour me protéger de la poussière, je me mets en marche vers un terrain désolé, à l'abris des regards. Je n'aime pas la compagnie et encore moins celle de d'autre ninja, ils n'ont que l'honneur à la bouche et leurs petits intérêts personnels.

Il m'arrive d'en croiser parfois en petit groupe discuter de bon train de leurs dernières missions ou entraînements. Alors je capte des brides de leurs conversations : "[…] tu te rappelle comment on l'a défoncé ?"; "[…]je suis trop fort !" ou encore "[…] je deviendrais le meilleur ninja du village !". Et là je cries intérieurement laissant place à mes émotions les plus noirs : "IDIOTS !!! N'oubliez pas que vous mourrez tous un jour! N'oubliez pas que le seul maître ici c'est le destin ! ".
Mon père me traite souvent de rabat-joie. C'est peut être pour cela…

Arrivé au terrain, je dépose le peu d'affaire à même au sol. Une bouteille d'eau et un paquet de biscuit volé à l'étalage. Ma lourde robe noir me couvrant tout le corps y compris les bras et jambes n'allé pas faciliter mon entraînement. Mais avais je le choix ? Je ne voulais pas qu'en plus d'être un incompris d'être aussi pris pour un monstre. Avant de débuter sérieusement mon entraînement, je décide de m'échauffer. Un bon entraînement ne l'est pas sans un minimum d'échauffement je ne sais plus trop d'où vient cette phrase et qui l'en ai le propriétaire. Machinalement, je trottine jusqu'au centre terrain, enlève mon gant droit et c'est bon, je m'en souvient parfaitement. C'est mon père. C'est lui qui a dit ça.

Je ressent toute de suite du dégout. C'est cet homme que je hais tant qui en ai l'auteur. Les mots que je trouvais harmonieusement bien assemblés et dont la signification me paraissait digne d'un ninja me frappe de plein fouet. Etourdit je tombe à genoux. Ma vision se brouille et je sens les muscles de mon corps se contracté. Non aujourd'hui il n'y aura pas d'échauffement. Uniquement de la haine et du travail.

Je ne sens plus les membres de mon corps. Ma tête ruisselant de sueur comme l'eau sur la roche des hautes montagnes de Tetsu, je me relève non sans difficulté pour rejoindre mes affaires que j'avais déposé auparavant sur le sol.
Voilà deux heures que je m'étais entraîné sans relâche et la nuit commençait à tomber. J'ai épuisé tout mon Chakra et je sens déjà les effets du non échauffement : mes articulations craquent au moindre mouvement, mon cœur bat à la chamade, ma tête tourne tel un globe terrestre aux mains de petits enfants … la cata quoi …

Pourtant je ne regrette à aucun moment mon choix et si je devais le refaire alors je le referais. J'avais vaincu cette haine qui me noyait en redoublant d'effort et cela se voyait. En parcourant 30 tours de terrains soit au total 21.5 km j'avais renforcé ma maitrise du déplacement de ninja qui était beaucoup trop incertaine avant. Sans me vanter, je pense être maintenant capable maintenant de faire des pointes à 38~39 km/h ce qui est relativement bien pour un Genin….enfin je crois. Ne côtoyant aucun Genin c'est compliqué pour moi de me comparer aux autres. Que dis-je...? Je ne côtois personne d'autre que ma solitude. Silencieuse auprès de moi, j'écoute son doux silence qui m'accompagne au long de cette sombre aventure qui est ma vie.

Prenant une longue gorgé d'eau et croquant dans un biscuit qui est d'ailleurs devenu tout mou à cause de la chaleur de l'après midi; je me demande où vais-je passer la nuit. Je sais très bien qu'un lit chaud m'attend chez moi mais la perspective de revoir mon père et de subir une fois de plus notre relation orageuse m'en empêche. La faim ne me tenaille pas particulièrement sitôt que je fais le choix de quitter le terrain et d'aller faire un tour au temple des prières. Même si je suis plus un athéiste qu'un agnostique j'apprécie la tranquillité qu'offre le temple et le silence des prières. Et puis j'en profiterai pour trouver un petit banc en espérant que les bras de morphées arrache la conscience de mon corps.