Le prélude d'une grande carrière

Aujourd'hui était un grand jour, car la naine avait reçu une convocation tout à fait spéciale.
En effet, sa formation commençait, ou tout du moins on l'avait placé sous les ordres d'un membre de son clan afin de développer ses talents, et peut-être un jour, lui permettre de devenir une espionne de première catégorie. La discrétion avait toujours été son fort – Pas seulement parce qu'elle était petite, mais c'était comme une seconde nature chez elle. Mais la nature seule ne fait pas le shinobi, et avant de se risquer en territoire ennemi il lui fallait élargir son panel de compétences si elle ne voulait pas se faire exécuter en un rien de temps. Après tout, elle aspirait à un type de carrière qui ne pardonnait aucune erreur...

Dix heures tapantes. C'était l'heure à laquelle Nimue avait rendez-vous chez son futur sensei.
Peu encline à le mettre en rogne, elle était venue en avance, et par crainte de paraître trop procédurière, elle avait même attendu discrètement dans le quartier que les minutes passent jusqu'au moment fatidique, faisant mine de tout juste arriver ! Toquant trois fois à la porte, elle masqua instinctivement un certain stress puis se posa au pas de la porte, prête à recevoir le fameux protagoniste comme si c'est elle qui l'invitait.

Elle avait bien pensé à entrer par effraction chez ce dernier afin de faire forte impression, mais l'excès de zèle n'était en revanche pas son fort. Tout comme faire forte impression en fait. Elle était quasiment invisible à Kumo, et même le clan la connaissait à peine... Peut-être qu'on la prenait encore pour une gamine du village. Sans doute en fait, ça expliquerait certainement pourquoi les gens lui posaient régulièrement la main sur la tête pour l'ébouriffer et que les femmes lui proposaient tout le temps des chouquettes. Enfin, autres histoires. Elle tendit l'oreille ; Il approchait certainement.

Une fois son entretien avec Masashi terminé, le récent maître des armées fraîchement nominé avait assigné à un de ses nouveaux subordonnés la tâche d'informer Gareki de sa prochaine mission et de convoquer Nimue. Ainsi, agenouillé dans son dojo personnel et peignant paisiblement, l'Hattori accueillit avec le sourire sa nouvelle élève. Elle était plus jeune qu'il l'avait pensé et possédait une étrange façon d'avaler certaines syllabes. Elle ne devait certainement pas descendre d'une grande lignée.



Il leva son pinceau quelques secondes, profitant de ce laps de temps pour plonger son regard dans celui de la demoiselle. Était-elle gênée par la cicatrice qui marquait le visage du Junin ?



Ce ne serait pas une mission des plus mouvementées, mais elle permettrait à Shinichi de se rapprocher de Gareki.

Il avait l'air terrifiant.
Ou du moins, cette cicatrice n'inspirait pas confiance, ni ce visage quelque peu famélique ; Nimue respira un coup, satisfaite de sa ponctualité après avoir constaté un sourire chez son nouveau sensei. C'est qu'elle était du genre nerveuse malgré ses aspirations. Peut-être que c'était une mauvaise chose vu le sang froid que demanderait ses aspirations futures, mais en y repensant, c'était aussi tout ce stress qui la poussait à éviter les erreurs ou tout du moins faire des efforts afin de ne pas commettre d'erreurs. Elle releva le visage, tâchant de paraître aussi sérieuse que son interlocuteur.



Répondait-elle au tac au tac, tenant – difficilement – le regard comme si on venait de lui lancer un défi. Cela dit, la question suivante laissa place à un léger blanc, donnant l'impression qu'elle hésitait. Ses yeux se portaient sur le pinceau quelques secondes, puis croisaient de nouveau le regard « adverse ».



Sans doute ne s'en rendait-elle pas compte, mais son regard ne cessait de jongler entre le pinceau, le parquet et le visage de Shinichi. D'ailleurs ses joues étaient un peu pourpres, comme si elle craignait le jugement d'un « grand guerrier » de son clan face à ses convictions qui pouvaient paraître naïves. Elle était rarement prise au sérieux de toute façon... Certainement à cause de sa façon de parler et de sa petite taille.



Rajouta t-elle, quelque peu exagérément.

Shinichi s'autorisa un sourire ; décidément, cette jeune femme était pleine de surprises. Malgré son apparence fragile, elle semblait posséder une grande détermination qui rappela à notre maître des armées le début de son adolescence, avant les missions périlleuses, avant l'accident.



Penché vers sa toile, après avoir trempé son pinceau dans un flacon contenant de la peinture verte, il commença à ajouter des feuilles à la masse marron déjà peinte.



De l'espionnage à la récolte d'informations en passant par l'assassinat, le Junin comptait offrir à la demoiselle une formation des plus complètes. Évidemment, les missions qu'ils allaient effectuer seraient bien différentes de celles qu'elle avait bien pu accomplir dans le passé, mais elles aideraient à la forger.



Les mots du shinobi n'étaient pas à prendre à la légère.

Voilà qu'elle se rabaissait un peu. Il est vrai que jusqu'à présent, elle n'était jamais sortie du lot. Son profil n'était pas celui d'une grande conquérante et son parcours était passé inaperçu contrairement à des Hattori plus fiers et fidèles aux stéréotypes du clan. Sa décision de passer dans une autre catégorie et de tenter le tout pour le tout avait visiblement plu à la hiérarchie, désormais, c'était à elle de faire en sorte de faire ses preuves.

Son sensei semblait plus coopératif qu'elle ne l'avait pensé au premier coup d’œil, et d'une certaine manière, cela la rassurait. Elle acquiesçait à tout, jusqu'à ce qu'une incroyable question lui tombe dessus ; décontenancée, elle marmonna.



Fuyant le regard de Shinichi, elle observait la toile d'un regard vide pendant quelques secondes. Puis soudain.

La motivation était présente, mais la demoiselle manquait clairement de confiance en soi, ce qui pouvait s'avérer problématique si elle venait un jour à devoir faire un choix important lors d'une mission périlleuse.
Toutefois, les dernières paroles de la jeune femme surprirent le Maître des armées.



En effet, si Nimue souhaitait se tenir aux côtés du Junin, elle devait consentir à le protéger corps et âme.

Elle inspira puis expira lentement, articulant ensuite de sa petite voix claire ;



Baissant la tête en signe de respect, elle attendait une réponse. Nimue était loin de connaître toutes les réalités du terrain et sa bonne volonté pouvait aisément être contestée par quelqu'un d'expérimenté. Toutefois, elle pouvait lui affirmer une chose : Pour lui, elle serait malléable. C'était qui plus est un Hattori connu et respecté, en le servant elle servait Kumogakure et son clan, elle n'en demandait pas plus. Consacrer sa vie à cet homme était donc déjà une réussite en soi.

De plus, il lui offrait déjà l'occasion de sortir du village. De quoi éveiller en elle une motivation certaine, Shinichi la conduisait au cœur de l'action et une obéissance sans failles s'avérait certainement être l'option la plus adaptée pour ne pas commettre d'erreurs.

Le maître des armées sourit, une chose plutôt rare chez un assassin. Il attendait de la jeune femme la même dévotion et soumission qu'il avait lui-même pour le Raikage. Les promesses n'étaient peut-être que des paroles, mais pour le Junin, c'était un véritable engagement.



Posant délicatement son pinceau sur le côté, il plongea sa main de nouveau libre à l'intérieur de son kimono. Il y sortit un parchemin scellé qu'il tendit à la demoiselle.



Il reprit entre ses doigts le pinceau qu'il venait de déposer et s'attaqua à la représentation sur sa peinture d'un ciel nuageux.

Se saisissant du parchemin pour y jeter un premier coup d’œil rapide, elle tâcha d'en retenir le contenu puis le cacha dans sa cape.



Nimue baissa aussitôt le regard, se demandant si ses questions risquaient d'ennuyer son nouveau Sensei. Peut-être qu'elle devrait se dépêcher de multiplier les tenues et les artifices avant de s'habituer à quitter Kumo, quoiqu'il en soit, ce serait certainement plus sage.



Ajouta t-elle tout en observant fixement la toile, ne semblant plus regarder son interlocuteur dans les yeux tant que celui-ci ne s'adressait pas directement à elle.

Ainsi, les deux Chunin ne se connaissait pas. Un point positif, pensa le maître des armées, qui permettrait à la jeune fille d'éviter d'être sous l'emprise de ses sentiments si la mission venait à mal tourner.



D'un geste délicat de la main, il demanda à une de ses servantes qui passaient devant la porte de leur ramener thé. Cette discussion l'avait assoiffé et quelques rafraîchissements ne seraient pas du luxe.



Il marqua une pause afin d'écouter la réponse de son interlocutrice, puis reprit.

Une ombre minuscule, en revanche.
Une fois la servante de retour, Nimue attrapa ensuite sa tasse de thé qu'elle apporta un peu trop précipitamment à ses lèvres, grimaçant après s'être brûlée la langue.



Dans un flot de paroles, elle venait de résumer brièvement ses compétences actuelles afin de permettre à son Sensei de prendre conscience du travail à accomplir. La kumojin devinait que pour atteindre son objectif il lui faudrait grandement se diversifier, une tâche plutôt difficile. Shinichi avait l'air perfectionniste, peut-être qu'il se montrerait encore plus critique que les autres vis à vis de ses atouts, mais elle se disait qu'il ne valait mieux pas lui cacher la modeste vérité pour mieux se mettre en avant sur le moment si elle souhaitait qu'il lui apprenne tout ce dont elle allait avoir besoin.

Elle se permit un coup d’œil vers ce dernier afin de voir s'il grimaçait en apprenant les maigres conditions de sa nouvelle élève, puis bu une nouvelle gorgée de thé brûlant.

La servante vint servir les tasses de thé, et tout t'en approchant délicatement le verre de ses lèvres, Shinichi sourit face à la perspective d'enseigner l'art qu'il maîtrisait le mieux à une jeune femme aussi optimiste que l'était Nimue.



En effet, le Junin maîtrisait lui-même le ninjutsu et le genjutsu, et s'employait à avoir une bonne condition physique. On ne pouvait jamais savoir sur quel type d'ennemi on pouvait tomber.



Une fois la dernière gorgée terminée, il déposa la tasse de nouveau vide sur le plateau que la servante avait apporté.