Mardi
6h00
Tu as toujours autant de mal à te lever, mais finalement, tu arrives à l’heure devant les portes de l’hôpital. Malgré le fait que tu t’es couché à 18 h 00, tu te sens toujours autant vidé d’énergie et tes bras et jambes n’arrivent pas à se remettre de la journée d’hier. Journée dont tu espères ne pas répéter aujourd’hui. Inspirant un grand coup et profitant encore de la nuit qui recouvre de son voile un ciel sans étoiles, tu rentres dans l’établissement.
Contrairement à hier, les lumières sont bien allumées. Le dôno avait donc raison en disant que le problème serait vite réglé. Plissant tes yeux cernés face à l’éclairage projeté par les néons, tu vois que le hall d’entrée a repris ses gesticulations habituelles. Les patients sont de nouveaux là, les infirmières et médecins courent dans tous les sens, et même si cela ne te réjouit pas Ume-San et sagement assis à l’accueil, un journal à la main et un paquet de chouquettes dans l’autre. Espérant lui échapper, tu marches la tête basse en faisant attention d’échapper à son regard. Tu ne lui a toujours pas pardonné pour la dernière fois et de toute façon, tu n’as pas envie de perdre du temps sur ton planning. Même si tu avais fait le sale boulot hier (oui, déboucher les toilettes est un sale boulot), il te reste néanmoins du travail. Essayant de te faufiler vers le placard où sont rangées tes affaires de nettoyage tu entends alors une vieille voix que tu ne connais que trop bien.
« Et bien alors mon garçon ? Tu essaies de m’esquiver ? »
Que lui répondre ? Pris au dépourvu, tu mets ta main dans tes cheveux et d’un sourire gêné tu lui réponds :
« Oh… Bonjour….. Non…non… Je suis juste pressé…Vous savez les toilettes…tout ça…tout ça…Quoi… »
Tu parais ridicule et tournant les talons avec l’intention de partir d’ici le plus vite, tu entends les pas lourd de l’ancêtre se rapprocher de toi. Tu la vois faire le tour de son bureau, pour sortir de l’accueil et las, tu te dis qu’elle va encore venir te chercher des ennuis. Décidément, cette vieille peau n’en a pas fini avec toi… Soupirant, tu la vois s’arrêter à un mètre de toi et te tendre son paquet de chouquettes. Dépassé par la situation, tu ne sais pas trop comment réagir, était-ce un piège de sa part ? Que te voulait-elle ? Essaie-t-elle de t’empoisonner ? Toujours méfiant, tu lui demandes ; intrigué de ce geste si peu attendu :
Hochant la tête et te souriant, elle te répond sagement :
« Évidemment mon garçon ! Tu es tout pâle et maigrichon ! Ne sois pas bête et prend des forces ou sinon tu vas finir comme un légume ! »
Secouant son sac de chouquettes, elle rajoute :
« Rassure-toi, elles ne sont pas empoisonnées hi…hi…hi… Allez prend les et va te faire un café avant de commencer ta journée. Un jeune homme comme toi doit prendre des forces avant d’aller travailler ! »
Bouche bée, tu la vois repartir dans la direction inverse, et retrouver son journal. Ton sac de chouquette dans les mains, tu restes longtemps comme ça, le regard vide, hagard. Tu ne saurais pas expliquer le comportement de la vieille dame, mais tu ne peux qu’lui en être reconnaissant.
Prenant tes affaires rangées dans le placard, tu t’introduis dans la salle de pause et te fais couler, dans le vacarme de la machine, un café. Déposant la tasse sur la table qui au passage te brûle quelques doigts, tu plonges ta main pour en ressortir une chouquette. Croquant dedans, tu constates avec amusement qu’elles ne sont effectivement pas empoisonnées. Non, à vrai dire, elles sont même délicieuses. Tu ne sais pas si c’est parce que tu n’as pas pris de petit-déjeuner qu’elles te paraissent aussi bonne mais tu as vite fait d’engloutir la dizaine de pâtisseries. Puis tu ingurgites doucement ton aigre boisson dont le goût bien qu’immonde a pour effet de te réveiller. C’est bon ! Tu es fin prêt pour le travail !
12h00
Comme tu l’avais espéré, la matinée fut moins chargée que celle d’hier. Tu n’avais pas eu cette fois-ci recours à ta ventouse, mais juste à des lingettes et ton balai. Tu avais vaguement fait connaissance avec certaines infirmières dans les couloirs sans pour autant essayer de les draguer. Même si tu n’y croyais qu’à moitié, tu prenais les conseils de ton dôno au sérieux. Ils valaient mieux se contenter d’établir une relation amicale avec ces demoiselles et tu avais dû prendre sur toi pour ne mater les magnifiques postérieurs que certaines pouvaient avoir. Allons bref…il est 12 h 00 c’est ta pause. Comme pour hier, tu n’as pas ramené de repas par souci d’économies, tu espérais rembourser les degâts de le vitre avant la fin de la semaine. Une fois acquitté de cette dette, tu pourrais enfin dormir sur tes deux oreilles, mais pas avant. C’est donc le ventre gargouillant et tes affaires de ménages sous le bras que tu te balades dans les couloirs de l’hôpital sans objectif particulier.
12h30
Tu ne sais plus trop où tu es. Tu as dévalé pas mal d’escalier, ouvert pas mal de portes et te voilà maintenant perdu. Ton plan aurait pu te servir si tu savais au moins où tu étais, mais là… Nada… Rien… Néant. Les couloirs se ressemblant tous, tu as vaguement l’impression d’être déjà venu ici. Que vas-tu faire maintenant ? Si tu as un peu de chance te dis tu, tu trouveras bien une infirmière ou un médecin pour t’indiquer le chemin, malheureusement, la plupart sont en pause et tu sais qu’il est rare de les croiser entre 12h00 et 13h00. Continuant à marcher dans le couloir, tu vois au fond une porte s’entrouvrir…. Ça y est tu sauvés penses-tu ! Trottinant en direction de ton sauveur, tu lâches d’une voix portante de peur que ce dernier referme la porte.