~18h00~
Malgré la fin de l'hiver, le froid se faisait toujours ressentir. C'est ainsi que, les mains dans les poches, tu sortais enfin de l'hôpital. Tu puais le produit d'entretien, mais tu t'en foutais. Tout comme le café, cette odeur t'était devenu familière et tu avais appris à vivre avec au quotidien .
Marchant dans les rues éclairées de Konoha, tu te demandais ce que tu allais faire. Tu avais du temps à tuer avant de rentrer chez toi, là où il te faudrait préparer le repas pour toi et ton ivrogne de père. Ces derniers temps, tu passais le plus clair de ton temps à dessiner ou à peindre. Tes conquêtes se faisant rares, tu avais finalement retrouvé goût aux dessins et il t'arrivait de passer plusieurs heures consécutives sur une toile. C'était pour toi l'occasion d'exprimer tes sentiments et tes désirs les plus chers sans avoir à parler. Seul avec ce grand papier blanc, tu te confiais comme jamais tu le ferais avec quelqu'un.
Seulement, il arrivait comme ce soir-là que tu n'ais rien à confier. Tes journées se ressemblaient tous et monotone, tu rentrais dans un cycle de "réveil, "travail", "dodo". Les jeux entre amis, les farces et les amours d'adolescent te manquaient. N'était ce pas ça d'ailleurs le but de ta punition ? Te faire oublier ta notion de bonheur pour t'en instaurer une nouvelle plus proche de l'idéologie de Konoha ? Pourtant, tu restais partagé. Depuis ton arrivée à l'hôpital, ton dôno avait été gentil et clément envers toi. Malgré ces nombreuses remarques et son attitude parfois lourdes, il avait su jouer ce rôle de père manquant tout en gardant son statut de supérieur. Grâce à lui, tu mangeais maintenant à ta faim et comprenais enfin ce qu'était le travail. D'une certaine manière, il te donnait l'éducation inexistante que ton père aurait dû te donner, il y a des lustres. Tu ne savais pas s'il le faisait pour ton bien ou s'il agissait pour les intérêts des hauts dirigeants, mais bien malgré toi, tu éprouvais une once de sympathie pour cet homme à la simple vue de ce dernier. En vérité, c’était plus que de la sympathie. C’était un sentiment indescriptible que seuls tes crayons pouvaient exprimer. Ce même sentiment qui faisait de toi un prisonnier et qui te décrédibiliser en tant que prôneur de la liberté. Rejoignant le quartier Chikara, tu te questionnais sur ton existence. Tu avais toujours affirmé haut et fort qu’aucune chaîne ne te retenait, mais en y réfléchissant bien ta vie entière était enchaînée. Tu vivais de l’amour des filles et de la désobéissance des règles. Tu étais en fait le prisonnier de tout cela. Les filles n’avaient pas besoin de ton amour, tu avais besoin du leurs. Tu étais insolent, car tu avais constamment envie de montrer aux autres que tu n’étais pas un mouton et que tu étais plus heureux qu’eux. Mais au fond, l’étais tu vraiment plus qu’eux ? Quand tu voyais les divers Shinobis en petit groupe, il n’avait pas l’air si malheureux Peut-être n’était ce qu’une façade que
nous humain appelons plus communément hypocrisie… Mais tu savais que tu n’essayais que de te rassurer. Tu n’aimais pas mentir, mais tu te mentais à toi-même. Cela n’avait aucun sens tout comme ta vie. 15 années étaient passées et qu’étais tu pour ce village ? Rien. Tu croyais tirer les ficelles de village, mais tu n’étais qu’un vulgaire pantin mis de côté.
Pensif, tu ne vis pas la fille qui courait dans ta direction. La percutant de plein fouet, tu l’as vis tombé lamentablement par terre. Ne sachant pas si tu étais le fautif ou non tu vins t’agenouiller près d’elle
D’un regard noir, elle te répondit :
« J’ai l’air d’aller bien ? »
Son visage barbouillé par la poussière, tu ne saurais quel âge lui donner. Donnant tel un gentleman ta main pour l’aider à se relever, tu fus interrompu par une voix grossière.
Tu reconnaissais très bien cette voix. C’était celle du barman de l’avenue principal. Un gros bonhomme bien avides à la moustache et au cheveux gras que tu n’appréciais guère. De son embonpoint présent, tu le vis s’approcher en courant. Pointant ton propre doigt vers toi, un peu étonné de cette entrée en manière, tu lui répondis.
Essoufflé, mais surtout le visage empourpré, il fit un mouvement du menton en direction de la fille :
Te tournant vers cette dernière, tu te demandas ce qu’elle avait bien pu faire pour s’attiser la foudre du barman. Elle te paraissait si fragile et si innocente. D’un regard noir, tu lui demandas :
« Ce ne sont pas tes oignons, mais si tu veux savoir, cette gamine a volé sur mon établi ! »
Enjambant les quelques mètres qui vous séparaient, il ajouta doucement :
« Laisse-moi récupérer ce qui m’appartient et j’en profiterai pour lui infliger la correction qu’elle mérite. »
Tu ne savais plus trop où tu devais te placer. Le barman, mentait-il ? Probablement pas. Mais d’un côté, la fille te paraissait innocente et tu ne connaissais pas sa condition de vie. Peut-être avait-elle volé par faim… Te mettant tel un obstacle entre l’homme et ton protégée, tu lui demandas d’une voix suppliante :
« Vous êtes vraiment obligé d’en arriver là ? Il doit bien avoir une raison à son acte…. »
Secouant la tête en signe de refus, il tenta de te pousser :
« Allez houste maintenant ! Je n'ai pas que ça à faire de ma journée ! »
Tes méninges tournaient à fond. Le barman n’était pas en tort, elle avait volé et elle devait en assumer les conséquences. Mais c’était une fille et tu ne pouvais qu’avoir un faible pour elle. Ton devoir de beau charmeur t’obligeait à intervenir pour l’aider. Peu importe qu’elle en était la raison, tu savais qu’elle te serait redevante. Et une fille redevante, il n’y a rien de mieux pour un garçon comme toi…. Ta décision était prise.
C’est d’un coup habile que tu viens assener ta paume de mains dans le gros bidon du barman. Le coup n’était pas puissant et son intention n’était pas de blesser. Juste de le distraire le temps que tu puisses t’emparer du bras de l’inconnue et que tu fuisses avec elle.
Rigolant de vive voix, tu t’engageas dans la rue principale du quartier Chikara. Il y avait encore pas mal de monde à cette heure-là et la foule serait un bon moyen de ne pas être aperçu. Tu n’étais d’ailleurs pas sûr que le barman ai tenté de vous poursuivre, mais tu ne voulais pas prendre de risques. Certes, il aurait très bien pu aller voir la police, mais sans nom ni prénom la requête n’aurait abouti à rien.
C’est ainsi que l’esprit tranquille, tu rentras après un dernier coup d’œil derrière toi, dans une taverne bon marché. Elle ne payait pas de mine, mais les prix n’étaient pas chers. De toute façon, tu ne comptais pas dépenser ton argent, mais juste discuter un peu avec la fille. Jusqu’à maintenant, elle n’avait pas bronché et tu te demandais presque si elle n’était pas muette. T’installant au comptoir, tu l’invitas donc à s’asseoir à côté de toi. Puis interpellant, le serveur, tu commandas deux sirops à la grenadine bien malgré toi. Les nouvelles lois pour ce printemps étaient tombées. L’alcool était interdit pour les moins de 21 ans à ton plus grand déplaisir. Tu n’avais que 16 ans et cela te paraissait presque impossible d’attendre encore 5 ans avant de ne serait-ce, poser ta langue sur ce merveilleux liquide.
Ainsi, en attendant la commande, tu t’attardas sur le visage de ton invitée. Débarrassé de la poussière, tu lui aurais donné un âge similaire au tien. Ses cheveux, couleurs brun, coupé court, étaient en désordre et paraissait bien gras. Tu l’aurais volontiers poussé à la douche et passer un bon coup de peigne sur sa chevelure. Cependant, son visage était bien plus angélique et soigné que sa coiffure. Quelques taches de rousseur le parsemé, ses lèvres fines et bien tracé sous son nez fin ajoutait de l’élégance à cette peau blanche qui équivalait la couleur des neiges éternelles.
« Alors ! Dis, moi tout ! Dans quel pétrin tu t’es fourré ? »
Se tournant à 90 degrés sur son tabouret elle te fixa d’un regard étrange. La fixant toi aussi, un peu décontenancé, tu compris que ce n’était pas son regard qui était bizarre, mais plutôt ses pupilles. L’une était bleue et l’autre était brune. C’était assez étrange et plongé dans ses yeux si uniques, tu n'en entendis presque pas sa réponse.
« Ça ne te regarde pas. »
Vos sirops arrivant, tu gardas le silence bien que tu sois contrariée. Tu l’aurais pensé un peu plus bavard et un peu plus reconnaissant. Tu lui avais tout de même sauvé la vie non ?! Tu n’attendais pas d’elle de l’argent ou quoi que ce soit d’autre, mais au moins un peu de gratitude. Buvant une longue gorgée, tu t’essuyas la bouche du revers de la main.
« Sans moi, tu aurais passé un mauvais quart d’heure avec ce barman. J’ai tout de même le droit à un merci non ? »
D’un petit grognement que tu trouvais à ton goût sensuelle, elle te répondit :
Satisfait tu tenta d’engager une conversation :
« Puis-je connaître ton nom ? »
« Je m’appelle Seiji pour ma part. J’ai 16 ans. Puis-je connaître ton âge ? »
« Tu fais quoi dans la vie ? »
« Ça ne te regarde pas. Arrête de me poser des questions, tu le veux bien ? Toi que fais-tu dans la vie ? »
Ne sachant pas si elle s’intéressait vraiment à toi ou ce n’était qu’un moyen d’échapper à toutes tes questions, tu répondis tout de même, souriant.
« Je suis Shinobi, Genin plus précisément. J’accomplis des missions pour le bien du village ! »
Cela n’était qu’à moitié vrai. Tu n’étais plus Genin depuis que ton dôno t’avais confisqué ton bandeau. Et en ce qui concernait les missions, tu ne faisais acte de présence que qu’on en t’y obligeais. Mais le terme de Shinobi impressionné souvent les filles et tu n’hésitais pas à t’en vanter.
D’un regard amusé, la fille te dévisagea et te répondit, un sourire en coin :
« Toi Shinobi ? Pourquoi sens-tu le produit de nettoyage alors ? C’est comme ça que tu sauves le village (elle rit.) ? »
Un peu embarrassé qu’elle t’a démasqué, tu étais néanmoins content qu’elle ait le sens de l’humour. Tes joues rougissantes, tu rigolas doucement :
« J’étais Genin il est vrai. J’ai été puni à la suite d’une petite bêtise. »
Le coude sur le comptoir et sa tête maintenu par sa main gauche, elle avait l’air amusé de ta situation.
« Cela ne répond toujours pas à ma question : pourquoi sens tu le produit de nettoyage ? »
« Ma punition consiste tout simplement à nettoyer les chiottes de l’hôpital. Et à faire le ménage que ce soit dans les couloirs ou dans les chambres. Ah…oui, je dois aussi rembourser une vitre que j’ai cassée… »
Tu n’étais pas très fier de toi, mais au moins, cela faisait de toi un
bad boy . Les filles aimaient ça non ? Du moins cela avait l’air de plaire à Eleanor puisque cette dernière, se redressant, te demanda, intriguée :
« Et bien… Le montant s’élève à combien ? »
Content qu’elle s’intéresse à toi, ou du moins à ta punition, tu répondis enjoué :
« Assez pour que ça m’oblige à économiser. Mais ne t’en fais pas, j’ai réussi à rassembler l’argent pour pouvoir payer. Ce n’était pas une mince affaire, mais je pourrais remplir ma promesse faîte au dono. »
Finissant ton verre de sirop, tu la vis s’approcher de toi. Peut-être n’était ce que ton imagination, mais son attitude avait changé. Elle paraissait beaucoup plus intéressée et emprunt à te parler comme si le fait que tu te sois ouverte à elle avait joué dessus. Regardant la seule horloge de la taverne, tu déposas quelques pièces d’argent sur le comptoir :
« Il est temps d’y aller ! C’est moi qui paie ! »
Tu aurais voulu rester plus longtemps avec elle, mais tu devais préparer le repas pour ton père. Sans toi, cet incapable serait capable de se laisser mourir de faim. Te levant donc ta chaise, prêt à faire tes adieux, la jeune fille, toujours assis, te retenu gentiment par le bras.
« Tu ne veux pas rester encore un peu… »
Sa voix était suppliante, ses yeux si doux et puis ce contact peau à peau aura raison de toi. Eleanor était peut-être la future femme de ta vie qui sait ? Et puis cela faisait un bout de temps que tu n’avais pas touché une fille. Ta popularité étant en baisse, même les simples villageoises n’osaient plus t’approcher. Tu te rassis alors à contre cœur sur ton tabouret avec une petite pensée pour ton père. Habituellement soûl, il ne remarquerait pas ton absence avant demain matin. Et puis tout compte fait, cela t’importait peu qu’il rate un repas. Ça n’allait pas le tuer… Toutefois, tu n’étais pas très alaise…. Tes récentes pensées resurgissaient comme de vieux démons. Une fois de plus, tu agissais sous le coup des émotions. Un simple contact avec une fille te rendait addict et t’emprisonnais dans cette bulle fictive remplie d’amour. Cette même bulle, qui écartait toute conscience et tout raisonnement de ta part, certains été victime de la société, toi, tu étais victime de tes émotions. C’est donc une fois de plus que tu agis avec tes sentiments et non avec ta tête. Sur le coup, tu culpabilises et tu t’en veux un peu. Mais il ne suffit que de quelques questions d'Eleanor et de quelques caresses habile sur ta cuisse pour te faire tout oublier….
~7h15~
C’est une voix familière qui te réveillera. Émergeant de ton sommeil profond, tu ouvris lentement les yeux. Assis sur ton tabouret, la tête contre le comptoir, la vue brouillée, tu te redressas péniblement pour découvrir que le propriétaire de cette voix n’est autre que le serveur d'hier soir.
« Hum…. Qu’est-ce que vous faites chez moi ? »
Ta voix était rauque semblable à un lendemain de soirée trop arrosée. Le visage fermé, l’intéressé te regarda d’un mauvais œil.
« C’est plutôt à moi de vous demander ce que vous faites toujours ici. Vous êtes resté toute la nuit à dormir sur le comptoir. À voir votre état et à l’odeur que vous dégagez, je pense que vous avez bu un peu trop d’alcool. Ce qui est d’autant plus bizarre, car je ne vous en ai pas servi. Les lois sont pourtant strictes jeunes hommes, pas d’alcool avant 21 ans ! Vous m’en voyez désolé, mais je vais devoir en faire un rapport aux autorités compétentes. Mais avant cela, je vous demanderai de payer l’addition. Votre amie a dit que vous vous en chargerez. »
Tu ne comprenais pas grand-chose à ce qu’il te disait. Toi boire de l’alcool ? Tu n’avais pourtant commandé que du sirop… Et puis où était Eleanor ? Elle aurait au moins pu te réveiller la garce… Te tenant la tête, tu demandas à l’homme de comptoir :
« Quelle heure est-il ? »
« Il est 7 h 16 monsieur. Maintenant, je vous pries de payer, je dois fermer l’établissement. »
« Je vous dois combien ? »
« 120 ryos s’il vous plaît »
Tu manquas de t’étrangler.
« 120 ryos, regardez vous-même l’addition si vous mettez en doute ma parole. »
Prenant fébrilement, de la main moite, le papier que te tendait l’homme, tu constatas avec stupeur et horreur qu’il disait vrai. Sur le petit papier, étaient inscrits nombreuses boissons et plat tous plus chers les uns que les autres. Désespéré, tu tombas de ta chaise lourdement.
« Et bien monsieur que se passe-t-il ? »
Par terre, sur le dos, de grosses gouttelettes tombaient de ton front. Comment avais-tu pu acheter tout cela sans te le rappeler ? C’étaient toutes les économies pour la vitre cassée qui venait de partir en fumée. Blanchâtre, tu te relevas péniblement.
« Je dois prendre de l’argent chez moi, je reviens. »
Sans attendre de réponse, et faisant la sourde oreille face aux contestations du serveur, tu sortis de la taverne de tous tes malheurs. Prenant un gros bol d’air frais sur la rue principale, tu commenças à trottiner en direction de chez-toi. C’était une de tes astuces pour combattre la gueule de bois et malgré que cela n’ait jamais marché, tu persistais à l’utiliser. Mais ce n’était pas la seule raison pour laquelle tu te dépêchais de réduire la distance entre toi et ton domicile. En effet, la punition et les menaces concernant le retard de la part de ton dôno planait sur ta tête. Il était 7 h 20, tu avais mal à la tête, tu n’étais toujours pas prêt, tu n’avais pas encore déjeuner et pour couronner le tout, tu ne t’étais pas encore débarrassé de cette odeur d’alcool. Tant de choses à faire alors que tu étais sensé débuter le travail à 6 h 00… Et puis tu n’oubliais pas qu’il fallait que tu passes à la taverne pour régler ton dû… Tant d’argent dépensé en une seule soirée… Qu’allais tu dires à Takumi maintenant ? Comment réagirait-il surtout ? Sûrement mal… Très mal… Peut-être même qu’il te tuerait s’il apprenait que tu avais bu de l’alcool… Néanmoins, malgré l’appréhension qui t’habitait, tu ne comprenais toujours pas comment tu avais pu boire ce liquide interdit par la loi. Le serveur t’avais assurée ne pas t’en avoir servi alors comment avais tu pu finir avec une gueule de bois ? Tout comme la disparition d’Eleanor, cela restait un mystère…
Arrivant enfin devant chez-toi, le dos trempé de sueur, tu entamas la longue monté au 3e étage pour rejoindre le petit appartement que toi et ton père habitaient voilà quelques années. Votre condition de vie n’avait toujours pas été tel quelle, loin de là. Tu te souviens que quand maman était parmi vous, vous habitiez une vaste maison au jardin fleuri. Hélas, après son départ, papa et toi s’étiez appauvri, n’aviez pas pu payer le loyer et par conséquent endetté jusqu’au cou aviez du quitté ce foyer qui était pour toi le seul souvenir de cette famille unie que vous formiez, toi papa et maman. Aujourd’hui, la maison a été détruite pour laisser place à des immeubles plus récents et pouvant accueillir plus de monde. En soit cela te soulageais, ce souvenir douloureux disparaissait enfin, emportant avec lui par la même occasion les plus belle années de ta vie…
À bout de souffle, haletant comme un chien tu arrivas enfin devant la porte de chez-toi. Mettant la main dans ta poche en quête de ta clé, tu ne rencontras que le vide. Bon sang ! Il ne manquait plus que ça ! Pourquoi fallait-il que tout se passe si mal ? Ça commençait à en faire trop pour un petit homme comme toi. Tu n’étais pas le genre de personne à paniquer pour un rien, mais là, sur tes petites épaules s’abattait tout le poids de tes erreurs. Tu faisais chaque jour un métier de merde, tu te sentais mal, tu étais fauché, tu avais un père ingrat qui ne t’aimait pas et voilà que maintenant, tu avais perdu tes clés tout comme ta mère il y a quelques années. Désespéré, tu t’assis lourdement par terre, contre la porte de l’appartement. Ton père aurait pu t’ouvrir, mais il dormait sûrement profondément, à la limite du coma éthylique. Il n’y avait plus rien à faire qu’attendre sagement son réveil…
~10h07~
Tu ne sais plus trop depuis combien de temps, tu attends. Le sol dur et froid du palier te faisait mal aux fesses et tu commençais sérieusement à avoir mal au dos à force de garder la même position. Chaque 30 minute environ, tu avais vainement frappé contre la porte pour tenter de réveiller ton progéniteur, mais il semblait que ce fût peine perdue. Tu aurais pu te lever pour soulager cette douleur, mais tu n’en avais pas la force, que ce soit mental ou physique. Tu étais détruit, ravagé. Tu remettais toute ta vie en question : tes choix, tes décisions, ton comportement vis-à-vis d’autrui et plus tu avançais dans tes réflexions plus te constatais à quel point tu avais pu être un gros connard. N’était-ce pas le karma qui venait aujourd’hui frapper à ta porte comme tu le faisais si bien depuis 3 h 00 ? Tu n’eus pas à y répondre que cette dernière s’ouvrit brusquement derrière toi. Adossé à celle-ci, tu tombas à la renverse, te cognant alors durement la tête contre le genou de l’homme qui n’était autre que ton père. Il s’était rasé, sentait le parfum et était pour une fois bien habillé. Que lui arrivait-il ? Tu ne l’avais encore jamais vu comme ça. Il avait toujours été avec sa barbe sale et avec un tee-shirt puant l’alcool. Que lui valait ce changement soudain ?!
« Coucou fiston ? Tu n’as pas ta clé ? »
Sa manière, de parler avait aussi changé. Pas de « morveux », pas de mot vulgaires qui pourtant habités quotidiennement son langage. Bizarre…
D’un gémissement, tu vins frotter ta tête avec ta main puis préférant esquiver sa question, tu te relevas. Poussant doucement ton père qui te bloquait le chemin, tu te dirigeas vers ta chambre. Malgré qu’il soit tard, toujours était-il que tu devais payer l’homme de comptoir. Tu espérais que la patience de ce dernier avait été équivalente à la tienne et qu’il ne s’était pas directement rendu au poste de police. L’idée de d’avoir affronté les forces de l’ordre en plus de la colère de ton dôno ne te tentais pas plus que ça et il fallait donc que tu te dépêches de récupérer l’argent que tu cachais entre les lattes de ton lit. Une cachette qui avait fait ses preuves puisque ton père n’y avait pas mis les mains depuis un bon bout de temps. Fermant donc la porte de la petite chambre, tu soulevas ton matelas, déterminé à laver la dette de la taverne….
Qu’est-ce qui aurait pu t’arriver de pire dans ta situation actuelle ? Et bien, tu avais trouvé. L’argent que tu économisais, voilà des jours, était emmagasiné dans un petit sac en plastique. Ce même sac, qui coinçait entre deux lattes, était vide. Néant. Rien. Nada.
Ta bouche s’ouvrit pour lâcher un simple mot :
Tu devais faire erreur, il n’y avait aucun doute. Tu avais sûrement dû cacher l’argent quelques parts ailleurs et ce sachet n’était qu’un simple sachet de gâteaux. Oui, c’était sûr ! L’espoir fait vivre, disait-on…. Ce même espoir qui engendra en toi une totale frénésie te poussant alors à pousser meubles et bureau à la recherche de ton argent perdu. Cela dura 5 minutes durant lesquelles ta chambre fut saccagée. Les dessins étaient déchirés, les toiles pliées en quatre, les meubles retournait et tes vêtements volaient de part et d’autre de la pièce. Planté debout au milieu de cette pièce, tu avais perdu toutes capacités de raisonnement. Ton cœur battait à la chamade et fébrilement, tu commençais à te tirer les cheveux comme un forcené. Qui a fait ça ?! te disais-tu inlassablement. Mais seul le bruit de tes dernières affaires tombant au sol te répondait.
Vint alors ton père. Ouvrant la porte doucement, il pénétra dans la pièce. Voyant tout ce bordel, il lâcha :
« Oh…que se passe-t-il, mon fils ? Tu as des soucis, tu veux en parler ? »
Que te voulait-il ? Cet homme n’était pas le père d’autrefois que tu connaissais. C’était un autre homme. L’homme d’avant t’aurais crier de faire moins de bruit et t’aurais injurier pour te réconforter dans ta colère. L’homme d’avant été alcoolique et prêt à dépenser tout son argent dans du saké bon marché…. Minute…. D’un point rageur, tu l’abattis sur le mur de ta droite. Et d’une voix que tu avais du mal à contrôler, tu dis à l’homme qui te faisait face :
« C’est toi hein ? C’est toi qui m’a volé mon argent hein ?! Dis la vérité ! »
Le visage de ton père afficha alors un air étonné. Tu aurais pu en déduire qu’il n’était pas au courant, mais tu n’y croyais pas. Il te mentait. Ce ne pouvait-être que lui qui t’avait volé. Sinon qui d’autre ?! Levant ses mains en signe de soumission, il prit une voix réconfortante :
« Seiji, je ne sais absolument pas de quoi tu me parles, mais saches que je n’ai rien à voir avec cette histoire. »
Regardant machinalement les mains de ton père se soulever, un objet attira ton attention : une montre. Elle avait l’air neuve et le soleil tapait la vitre pour se refléter dans tes yeux. Dans ta tête, tout était clair. Aveuglé par la colère, tu te ruas sur lui. Retenant son bras de ta main gauche, tu le pris par col.
« Et c’est quoi ça hein ?! Allez ose moi me mentir une fois de plus ! Tu as volé mon argent pour t’acheter une montre ! »
« Fiston, je t’assure que ce n’est pas ce que tu crois, tu fais erre… »
Tu ne connus jamais la fin de la phrase. Ton poing s’était abattu contre sa tempe et face à la violence du coup, il était tombé par terre. Un peu de sang avait éclaboussé ton visage mais prisonnier de cette colère tu le l’avais pas remarqué. Te mettant à cheval sur lui, le poing de nouveau brandi, tu posas de nouveau ta question :
« Arrête de m’appeler fiston ! Tu ne m’as jamais appelé comme ça alors pourquoi maintenant ?! Tu n’es qu’un hypocrite ! Tu ne m’as jamais aimé ! J’ai toujours dû me débrouiller tout seul ! Même dans les moments les plus difficiles ! Alors maintenant, tu vas répondre à ma question : où as-tu mis mon argent ? »
C’était bizarre, toute autre personne aurait pris peur, se serait débattu, aurait avouer la vérité, mais pas ton père. Ce dernier affichait un grand sourire qui dégageait de la compatis. Et puis il y avait ses yeux, remplis de nostalgie dont le sang qui dégoulinait de ses paupières, venait alimenter un passé douloureux. Comme s'il aurait voulu revenir en arrière pour effacer toutes ses erreurs. Évidemment, tu avais remarqué tout cela, mais la frustration, la colère, la haine accumulée pendant toutes ces années s’exprimer à ta place. Il n’était plus question de l’assouvir à coup de pinceau ou de crayon, mais à coup-de-poing. C’est ainsi que lâchant un cri désespéré, tu assenas de nouveau ton poing dans le sourire de ton père. Tu ne voulais plus le voir, il fallait qu’il disparaisse de ta vue. Tu en ignorais la raison, mais au fond de toi, tu savais : c’était le même sourire que ton père lâchait à ta mère et toi qu’on vous viviez ensemble. Ce même sourire qui te rappelait tes premiers pas entre ses bras et l’amour qu’il éprouvait pour toi. Mais tout cela avait pris fin il y a bien longtemps. Ton poing était à présent barbouillé du sang de ton père et le visage de ce dernier était salement amoché. Mais pourtant, il gardait toujours ce sourire qui inlassablement te rappelait ta joyeuse enfance. Tu frappas alors, encore, et encore. Le sang te brouillait la vue, la fatigue des coups se faisait ressentir. Mais par-dessus tout il y avait ses cris inconnus qui sortaient de ta bouche. Des cris de sauvages accompagnés de mots qui te faisaient mal rien qu’à les entendre :
« Argh !!!! Tu as détruit mon enfance ! C’est à cause de toi que maman est partie ! C’est à cause de toi que je suis prisonnier de toutes ces filles ! Tu as fait de moi l’enfant gentil et naïf que j’étais en un monstre ! Qui es-tu hein ?! Mon père ? Non ! Tu n’es qu’un connard ! J’ai essayé de t’aimer pendant des années, j’ai essayé de te comprendre, de partager ta douleur ! Et comment m’as-tu remercié ? En me frappant à coups de ceinture ou à coup-de-poing ! Je te déteste…. Je te déteste…. Je te déteste…. »
Tu t’étais arrêté de frapper. Ta colère avait cédé à la tristesse et des ruisseaux tombaient de tes yeux pour s’écraser contre le corps inanimé de ton père. Reprenant peu à peu tes esprits, tu constatas avec horreur ce que tu avais commis. Son visage n’était à présent plus qu’un mélange de bouilli et de peau. Combien de fois l’avais-tu frappé ? Sûrement trop. Tu avais tué un homme, toi, Seiji. À cette idée, tu vomis un flot de bile sur le côté. T’écartant de cette atrocité, de toutes ces violences qui ne t’appartenait pas, tu entendis les murmures de ton père :
« Seiji….Viens près de moi…. »
Te jetant désespérément près de du lui bien que tu sois dégouté de ce spectacle affreux, tu sanglotas :
« Je suis désolé…sniff….Je n’aurais jamais du…m’emporter….J’étais déjà un monstre que suis-je maintenant ? »
D’une voix rauque, ton père cracha un filet de sang que tu te t’empressas d’essuyer avec la manche de ton yukata. Savoir que ton père pouvait parler te réconfortait. C’était une preuve qu’il était encore en vie. Du moins pour le moment.
« Seiji…Tu n’as pas à être désolé…J’aurais dû m’y attendre… C’est ma faute, je n’es pas été un bon père.. J’ai été stupide, bête, et je n’ai pas su te donner une bonne éducation. »
Il toussa puis repris :
« Voilà quelques jours, j’ai rencontré une femme. Elle était intelligent, sage et pleine de bienveillance. Voyant l’ivrogne que je suis elle a essayé de m’aider et m’a tendu une perche que j’ai saisi. Je lui ai parlé de moi, de toi et de tous nos problèmes. On a rie, on s’est embrassé, j’ai redécouvert ce qu’était la vie autre que ma bouteille de saké. Grâce à elle j’ai pris conscience de tout les tourments qui t’habitaient. J’ai alors décidé sur ses conseils de changer. J’ai trouvé un boulot, tenter d’arrêter l’alcool, et j’ai accepté mon passé pour réussir à aller de l’avant. »
Tu l’interrompis :
« C’est donc pour ça que tu étais bien habillé ce matin , c’était pour ton… »
« Chut…Laisse moi finir… J’aimerai que tu saches avant que tu partes, une chose : c’est à propos de ta mère. »
Ton cœur battit à la chamade, tes muscles se contractèrent et tu attendis, le visage dégoulinant de sueur et de ce sang qui ne t’appartenait pas.
« Elle ne nous a pas quitté à cause de mon comportement et de mon penchant pour l’alcool. Mais parce qu’elle le devait. C’était une mission qu’elle avait le choix de refuser ou d’accepter. L’ordre de mission était de la pure folie et les chances de survie y était très faible. Je l’ai imploré de rester avec nous et de refuser. Je lui ai parlé de toi , de ton avenir sans mère si elle ne revenait pas. Mais cela fut vain. Elle n’en a fait qu’à sa tête. Elle était trop dévouée au village et elle a renié ses sentiments envers nous pour accomplir ce qu’on lui avait demandé. Elle a effacer son amour pour toi et pour moi pour Konoha. »
Il marqua un temps d’arrêt. Son regard était vide, absent d’émotion, comme s’il ne débitait qu’une cassette. Et puis il y avait toi, à côté, hagard, tentant de démêler le vrai du faux. Ta mère avait renoncé à ses sentiments, un exploit à tes yeux . Elle avait donc réussi là où tu avais échouer….
« Seiji… J’ai été faible…. N’ayant pas eu l’amour de ta mère, j’ai décidé d’avoir ta haine. Je me suis laissé emporté par mes sentiments mais surtout par mon égoïste. Je n’ai pensé qu’à moi. Te voir parfois plus malheureux que moi me faisait du bien… »
Finissant sa phrase, il cracha un gros caillou de sang. Sa fin était proche, appelé les urgences étaient maintenant trop tard. De toute façon, tu étais bien trop torturé intérieurement pour tenter quoique ce soit. Gardant le silence face aux confession de ton père, tes larmes continuaient à pleuvoir.
« …. Seiji….J’aurais voulu que tu ais raison en disant que j’ai volé ton argent. Mais c’est faux. Cette montre n’est que le cadeau de mes anciens amis. J’ai décidé de le remettre après tout ce temps car c’était pour moi une forme d’acceptation de mon passé. Je n’ai donc jamais touché à ton argent bien que je sache où tu l’ais caché. Aujourd’hui je comprend qu’il est trop tard pour avoir ton amour mais je ne veux plus de ta haine envers moi. La seule chose que je veux de toi c’est ton pardon…Pardonne moi Seiji … »
Ce fut tout. Pas de au revoir. Pas de calins ou d’adieux comme dans les livres. Non, rien de tout cela. Ses yeux étaient restés ouverts et sa respiration s’était peu à peu arrêté pour laisser place au silence lourd et pesant d’un cimetière. Agenouillé prêt de lui, tu refusais tout cela. Tu refusais d’avoir commis un meurtre, d’avoir été la victime d’un mensonge du début jusqu’à la fin. Qui étais tu ? Un meurtrier ou une victime ? Ton père disait vrai mais tu persistais à renoncer à cette réalité. Tu préférais vivre dans le mensonge. A l’écart de tout cela. Les sentiments sont si douloureux pensais tu… Tu comprenais maintenant ta mère et le choix qu’elle avait fait. Tu n’avais pas su être digne d’elle et avait succombé à tes émotions. Tu ne méritais pas d’être son fils !
Dégainant rapidement ton kunai tu te le plantas dans les veines. Détournant les yeux pour ne pas voir tout le sang qui s’échappait de ton bras tu tombas après quelques allers retour, inconscient, sur le cadavre de ton père. Adieux la fragilité des sentiments et bonjour l’immortalité pensais-tu avant de fermer les yeux. Papa, Maman, j’arrive !