Rencontre de choc

Pas de parents à la maison, pas de cousin ou cousines à aller embêter....Le bentô qu'il avait devant lui, il allait le manger tout seul. Mais pas chez lui, vu le temps, ç'aurait été criminel de manger dans la cuisine, et il y avait de nombreux coins sympas où manger dehors. Dont un tout près d'une super adresse quand on voulait un dessert, mais c'était un détail. Panier-repas à la main, il sortit et se mit à courir, d'allée en allé...jusqu'à forcément....

...heurter quelqu'un. Voilà ce qui arrivait quand on ne savait pas marcher ou, en tout cas, ralentir lorsqu'on s'apprêtait à tourner.

Retombé sur les fesses, boite de déjeuner non loin, il fixait l'individu. Un homme aux cheveux longs, un Chikara sans doute puisqu'il était toujours dans ses quartiers, mais qu'il ne connaissait pas. Zut. Il espérait que l'homme ne soit pas trop sévère parce que là, il était clairement en faute. Et il espérait aussi qu'il n'ait pas trop souffert du choc. Enfin, contrairement à lui, il était toujours debout, c'était déjà ça...

Puis ses yeux tombèrent sur le vêtement. Vêtement immaculé. Enfin qui avait sans doute été immaculé avant qu'une belle tâche de sauce ne vienne se poser en plein milieu. Et bien maintenant qu'il faisait plus attention, la boite repas désormais par terre n'était plus tout à fait fermée.

Oups. La belle boulette. Bon, l'homme était un peu en faute aussi, parce s'il avait porté un haut noir, ça se serait pas vu mais.... Oups quoi.

C'était gênant, très gênant, et il n'y avait pas besoin d'être très observateur pour voir qu'il était mal à l'aise.

Il parlait d'expérience. Bon, maintenant...S'il avait de la chance, il pourrait simplement s'occuper de nettoyer, si non...il n'avait aucune idée de la qualité du tissu, du caractère du propriétaire, et pas beaucoup d'argent sur lui.

Tu venais de passer ta matinée dans le bureau familiale, cloîtré, les yeux rivés sur différents papiers. Tu étais habitué à fixer quotidiennement des lignes de chiffres : des quantités, des prix d'achat, des prix de vente, des remises, des avoirs, et tout un tas d'autre chose nécessitant d'être calculé. C'était ainsi qu'une de tes journées sur deux fonctionnait. L'autre moitié était dédié à la rencontre de vos clients et à la recherche de nouvelle fourniture à proposer. Bien évidemment, cela occupait une grande partie de tes journées, cependant, tu trouvais toujours le moyen de te dégager suffisamment de temps afin de t'occuper d'affaires des membres du clan, ou bien encore, des instants de détente que tu utilisais pour méditer sur différents sujets, ou bien encore approfondir certaine de tes connaissances, le nez penché dans un bouquin.

Alors que le soleil était proche de son zénith, tu avais décidé de profiter des rayons ensoleillés du printemps. Tu avais alors prit la route de ton restaurant favori, disposant d'une terrasse extérieur, il te permettrait de jouir de la météo clémente. Tu venais tout juste de franchir l'angle de ta rue, que tu vins te faire percuter de plein fouet. Le choc fit violent, cependant, tu gardas à tenir l'équilibre et à t'éviter la honte qu'aurait été une chute publique. Étonné, tu posas ton regard sur un jeune homme, les fesses aux sols. Tu sentis de suite la gêne qui l'habitait face à cette situation. Alors tu souris afin de détendre l'atmosphère. Rien n'était dramatique dans ce qui venait d'arriver... À l'exception que le jeune homme venait visiblement de perdre son repas, étalé sur le sol et... Sur ta tunique blanche... Durant quelques instants, ton regard changea, une courte vague de colère grimpa en toi, mais tu la fis taire tout aussi rapidement qu'elle venait d'apparaître...



Tu lui tendis la main, afin de l'aider à se relever.



Bien que ton discours se montrait quelque peu moralisateur, ta voix était douce.

Dai fixa l'homme en fronçant les sourcils. Pendant une seconde il avait eu l'impression que celui-ci était vraiment en colère et que lui-même allait vraiment regretter de s'être levé ce matin. Mais c'était passé, et il se dit qu'il avait dû l'imaginer, vu les paroles du Chikara et sa main tendu. Main tendue qu'il saisit, reconnaissant.

Un petit sermon, c'était toujours pénible mais mieux que la moitié des réactions qu'il avait imaginé. N'empêche qu'il n'en menait pas large. Il ne put cependant cacher sa surprise devant la question. D'abord parce qu'il ne voyait pas pourquoi l'homme demandait, ensuite parce que...

Il se coupe en voyant que non, effectivement, ce n'est pas seulement la sauce qui s'est échappée de la boîte. Flûte. Se tournant vers l'homme, il reprend :

Se rendant lui même compte que ce n'était pas du tout clair, il reprit en se grattant la tête, essayant de rendre le tout compréhensible, cette fois :

Le déjeuner de substitution ne serait sans doute pas aussi fourni que celui désormais au sol, vu ce qu'il avait dans les poches et son appétit l'empêchant de prendre le temps de retourner chez lui prendre plus d'argent, mais il devrait suffire à le nourrir à peu près correctement. Sans doute. Pour le dessert par contre, c'était mort.

Décidément, il n'était pas bien réveillé aujourd'hui, mais pour lui, le point principal, c'était le haut tâché de l'homme, pas son déjeuner. Il s'était attendu à devoir laver la tunique lui-même, voire que l'homme, s'il était très chiant, exige un dédommagement. Il avait imaginé à tort apparemment mais mieux valait être sûr d'avoir bien compris. Pour ça, il faudrait déjà que le Chikara le comprenne lui...mais bon.

Le jeune homme semblait gêné par la situation. Quoi de plus normal, ta tenue blanchâtre arborait désormais une tache en son centre. La haute qualité de ton tissu était facilement remarquable et le prix mirobolant imaginable. Cependant, l'argent n'étant nullement un problème pour toi, tu ne tenais guère rigueur de ce genre de détail. Ta seule problématique était l'image que tu renvoyais en arborant une tenue sale. Cependant, tu allais rapidement résoudre la problématique en retournant le haut de ta tunique. Tu étais habitué aux diverses taches d'encre de par ton métier, alors, très jeune, tu avais pris l'habitude de te faire confectionner des habits réversibles, te permettant de t'éviter le genre d'ennui que tu vivais en cet instant.



Tu l'avais au préalable écouté bégayer qu'il disposait de quoi s'acheter un nouveau repas. Cependant, quel genre de grand frère du clan ferais-tu si tu laissais la jeunesse user de leurs économies durement gagnées pour s'acheter de quoi s'alimenter. Non, cela était nullement concevable à tes yeux.





Alors, tu te présentas rapidement.

Dai regarda le Chikara changer le sens de sa tunique, un peu surpris.

Quand il se tâchait, lui, il changeait de haut le plus vite possible et se chargeait de nettoyer l'ancien (ou de laisser ses parents le faire à sa place)....mais il fallait dire que la méthode du brun était très pratique aussi. Un peu plus même, s'il devait être honnête, mais il ne se tâchait pas assez souvent pour commencer à chercher des vêtements pareils.

Son babillage cessa alors qu'il refermait la bouche, laissant le Chikara parler, avant de la rouvrir comme un poisson hors de l'eau. Premièrement, il ne fallait peut-être pas que l'homme apprenne sa définition d'achats utiles -sauf s'il avait lui aussi une passion pour les friandises, les farces et, seule exception, un peu de matériel de kenjutsu. Deuxièmement, il avait du mal à en croire ses oreilles.

Bon. Il savait que normalement on ne faisait pas confiance aux inconnus, et on les suivait encore moins lorsqu'ils disaient "viens, on va aller quelque part tous les deux, je t'offrirai de la nourriture"...mais techniquement, "Takehiko" s'était présenté, donc ce n'était pas un inconnu.

Ses économies et celles de l'homme en face de lui n'étaient certainement pas comparables, mais de là à offrir un repas au premier type qui nous rentrait littéralement dedans... Si l'on éloignait l'hypothèse de l'homme avec un plan plus que louche, il restait la grande générosité.... Puis il se rendit compte que si l'homme s'était présenté, lui n'en avait pas encore fait autant :

La situation plus qu'inhabituelle le laissait encore pas très à l'aise, mais la réaction de l'homme aurait pu être clairement pire, et il n'avait pas l'air d'être bien méchant, au contraire....ça suffisait à le rendre un peu moins nerveux. Ça et la promesse de nourriture.

Le jeune homme qui te faisait face semblait étonné par ta proposition. Ainsi, tu compris qu'il ne te connaissait visiblement pas. Tu étais connu au sein du quartier pour aider chaque membre de ton village, tant financièrement, que par ta présence bienveillante. Et quiconque te connaissait ne trouvait nullement étonnant de se voir convier au restaurant. Tu ne disposais que peu de temps libre dans tes journées, ainsi, tu joignais souvent le temps du repas, qui se trouvait obligatoire, à tes actions bienveillantes. C'était une manière pour toi de ne pas perdre trop de temps.



Tu affichais ton sourire habituel alors que tu reprenais désormais la marche dans les ruelles de Konoha. Le soleil était à son plus haut point et la chaleur de ses rayons te réchauffait agréablement. Tu humais l'air ambiant, profitant pleinement des odeurs qu'offrait le printemps.



La question était simplement de la curiosité mal placée. Mais tu étais ainsi, tu estimais que le savoir était le pouvoir et chaque information que tu pouvais grappiller de part et d'autre étaient bonne à prendre. Même celle venant d'un adolescent du village. Il était étonnant de savoir ce que pouvais procurer comme ressource des questions à l'apparence innocente.

Entendant la confirmation, il recommença à avancer, et sans courir cette fois.

Pourquoi il courrait déjà ? Ah oui, pour....aller manger. Le motif lui semble, avec le recul et les conséquences de sa course, tellement ridicule qu'il songe presque à en inventer un autre pendant une seconde. Presque.

Il se gratta la tête, un peu embarrassé, avant de reprendre, plus intelligiblement :

Il n'avait même pas eu si faim que ça, c'était vraiment juste une envie de se dépenser un peu. Il eut un sourire penaud :

Le ton était déjà incertain, mais il essaya de se justifier :

Le dernier commentaire, bien que sincère, n'était peut-être pas utile quand il parlait à un homme qui, à son avis, n'était pas du tout dans la précipitation, contrairement à lui. Il avait l'impression de multiplier les boulettes.

Tu écoutais le jeune homme tenter de t'expliquer que celui-ci préférait la course à pied rythmé que la lente marche. Tu souriais devant une telle naïveté. Nombreux était ceux qui pensaient que la course était un gain de temps, se trompant pleinement sur la totalité de ce que cela incluait.



Tu t'arrêtais quelques instants, silencieux, au milieu d'une foule naissante dans la rue. Tes yeux se plongèrent dans le regard de ton interlocuteur. Ton visage était amusé. Tu t'apprêtais à lui enseigner une valeur qui te semblait essentielle à quiconque voulait réussir dans la vie.





Tu repris doucement la marche. Laissant un silence après ton cours discours, toujours avec ce même sourire.

Dai se passa une main dans les cheveux en reprenant la marche. Il s'était arrêté avec le Chikara et l'avait écouté. Il ne comprenait peut-être pas encore pleinement les paroles de son interlocuteur, il était encore trop immature, impatient et pas assez sage pour trouver agréable autre chose que ce qu'il qualifiait d'excitant, c'est-à dire certainement pas regarder les fleurs, mais une partie du message avait percé.

Il ne savait plus trop quoi dire et, finalement, ce fut quelque chose qu'il n'aurait justement pas voulu dire à voix haute qui franchit ses lèvres.

Il se sentit presque rougir lorsqu'il se rendit compte que oui, il l'avait bien dit. Sûrement pas la chose la plus polie à faire. Embarrassé, il se hâta de s'expliquer :

Il eut une hésitation, essayant de formuler les choses de manière polie et de ne pas s'enfoncer encore plus.

Une nouvelle pause, le temps de trouver un terme qui convienne à certains de ses anciens professeurs d'académie, entre autres, mais qui reste poli.

C'était sans doute plus poli que chiant.

Il n'allait certainement pas commencer à lui vouer un culte mais, par rapport à ses prédécesseurs, le Chikara avait réussi à le captiver du début à la fin, même s'il n'avait pas été d'accord avec tout. Encore plus embarrassé que quand il lui était rentré dedans, il résista à l'envie de shooter dans un caillou sur le chemin et resta silencieux.