Vous connaissez vos parents vous ? Moi oui. Enfin, les connaître est un bien grand mot finalement. Est-ce que je les apprécie ? Pas le moins du monde. En même temps, à quoi s’attendre lorsque l’on abandonne son enfant entre deux tas d’ordures ? Eh oui… l’alcool coûte cher, et nourrir son enfant aussi. L’on pourrait croire que l’instinct paternel ou maternel ferait son travail, qu’il empêcherait quelqu’un de se débarrasser de son propre sang pour pouvoir assouvir un besoin irrationnel de vivre dans un autre monde. Mais non, ce ne fut pas comme ça que les choses se passèrent. Oh mais ne vous détrompez pas, ils ont au moins eu la décence de m’abandonner seulement lorsque je serais capable de « survivre » tout seul… Une vaste blague. Bref, pas la peine de m’apitoyer sur mon sort, je vais plutôt passer directement aux choses intéressantes et réjouissantes.
Pour beaucoup, l’an 0 marque l’année de la lumière sans fin. Un spectacle étonnant qui restera à jamais ancré dans ma mémoire, mais à côté de la rencontre que j’ai fais cette année là, ce n’était rien. Comment résumer ma vie en deux phrases… j’ai été abandonné vers mes 7 ans, et j’ai passé mon année suivante à fouiller dans les poubelles pour me nourrir. En effet, vous trouverez peut-être cela stupide, mais je n’avais jamais rien volé de ma courte vie, c’était pourtant une solution bien plus simple et… hygiénique, mais ironiquement je gardais une certaine estime de moi même. Plutôt passer pour un simple enfant des rues que pour un voleur. Puis, je savais ce qui arrivait aux gosses pris dans la main dans le sac : direction l’extérieur de la cité. Et là-bas, je n’aurais peut-être pas survécu.
Oh, j’ai oublié de préciser une chose. Mes deux parents sont des Rihatsu, donc, par extension j’en suis un aussi. Néanmoins, ils firent une sacrée erreur en m’abandonnant finalement, puisque, comme de rares personnes de mon clan, je possède du chakra. Nous n’étions pas vu comme des dieux, ni même des personnes extraordinaires, mais nos domaines de compétences étaient forcément bien plus vastes. S’ils avaient su que je pouvais être un investissement sur le long terme… Mais qu’importe, quelqu’un d’autre vit ce potentiel. Ma rencontre avec cette personne fut certainement la plus importante de ma vie, sans cela, mon destin aurait sans doute été tout autre.
C’était un jour comme un autre, je vagabondais à travers les rues, avec mes vêtements troués, mes cheveux gras et ébouriffés, en bref, le parfait portrait d’un gosse des rues mal élevé. Mais ce jour là, ma bonté fut récompensée. Il y avait ce groupe de gens, et surtout cette femme plutôt âgée. Ils traversaient la même rue que moi, accompagné d’un chariot. Celui-ci se renversa subitement, et toutes les marchandises qu’il transportait – dont un tas de fruit ayant l’air délicieux – se déversèrent sur le sol. Deux trois pommes roulèrent même jusqu’à mes pieds, un enfant affamé normal se serait jeté sur l’occasion pour s’en saisir et s’enfuir… mais pas moi. Non, j’étais un peu idiot d’un côté, mais ma bonté était toujours présente. Naïveté et innocence… un mauvais ménage, je ne réalisais même pas à cette époque que mes parents m’avaient tout bonnement abandonnés, je pensais que tout cela n’était que temporaire.
Enfin bref, je ramassais donc ces fameuses pommes avant de bien gentiment les ramener à leur propriétaire. Ce fut là, l’acte qui changea tout le reste de ma vie. L’un de hommes me reprit la pomme des mains sans attendre, mais c’est alors que la femme que j’avais remarqué dans le groupe vint jusqu’à moi. Elle reprit au passage l’un des fruits avant de le tendre dans ma direction, et de son timbre de voix que je trouvas tout de suite merveilleux et réjouissant, elle s’adressa à moi pour la première fois :
« Eh bien mon garçon, tu es en sale état, où sont donc tes parents ? »
Je restas figés, je la regardais les yeux grands ouverts, emplis de curiosité. Mon regard descendit peu à peu sur la pomme que je tenais entre les mains. « De la nourriture, saine ? » pensais-je du haut de mes huit ans. Oui, j’avais remarqué que la nourriture avariée avait tendance à rendre malade, jeune mais déjà observateur ! À mon propre détriment… Je relevais enfin le regard, puis sans une once de tristesse dans ma voix je répondis très sérieusement :
« Euh, partis je crois. Je ne sais pas quand ils vont revenir, alors je les attends. »
J’étais trop petit pour comprendre son regard à cet instant, mais aujourd’hui je savais que c’était un regard rempli à la fois de mépris, mais en même temps de compassion. Elle savait déjà très bien que je n’étais qu’un gosse de plus, entre les orphelins et moi… je n’étais pas unique en mon genre, loin de là. Elle s’accroupit alors pour se mettre à ma hauteur, puis toujours aussi calmement elle me fit la proposition qui changea ma vie :
« Hmm, d’accord. Dans ce cas, que dirais-tu nous accompagner chez nous ? Nous pourrons attendre tes parents là-bas, qu’en dis-tu ? »
« Je ne sais pas trop… et si jamais ils ne savent pas où me trouver ? »
J’aperçus très vite le sourire qui se dessinait sur son visage. La vérité c’était qu’il ne cachait que le désespoir qu’elle avait pour moi à cet instant précis. Elle se relevait alors doucement et recula de quelques pas avant de me tendre la main et d’ajouter :
« Ne t’en fais pas, je connais tout le monde dans cette ville, s’ils reviennent je le saurais. »
Mon hésitation se dissipa très vite, je n’étais qu’un enfant, en somme je n’étais pas difficile à convaincre. Néanmoins, cette fois ma naïveté ne m’apporta que du bien. C’est ainsi que je fis la rencontre de Mariko, celle qui deviendrait l’équivalent de ma mère adoptive. C’est pourquoi, à mes yeux, l’an 0 est une année importante. La coïncidence amusante fut que sans le savoir durant des années, elle et moi provenions du même clan. Mais la découverte des mes origines était une toute autre histoire…