Fruits amers et vérités pourries

Depuis plusieurs jours, Kaguya Sayuri et Chikara Manjiro parcourent ensemble les routes du continent. Leur duo semble improbable : d’un côté, la Kaguya, dont la prestance attire inévitablement les regards, de l’autre, le Chikara, blondinet au caractère abrasif, qui ne cache pas qu’il aurait préféré voyager seul...

Depuis plusieurs jours, Kaguya Sayuri et Chikara Manjiro voyageaient côte à côte. Le tempérament enflammé du blondinet rendait la cohabitation parfois épineuse, mais, contre toute attente, il semblait éprouver une certaine considération pour la Kaguya. Il faisait de son mieux pour ne pas lui manquer de respect… même si, bien souvent, ses écarts de langage trahissaient une maladresse qu’il ne percevait pas lui-même. En vérité, Manjiro aurait préféré parcourir le monde seul. Les Kaguya, avec leur apparence reconnaissable, attiraient trop facilement l’attention, et Emi lui avait déjà enseigné une chose : mettre une garnison de l’Empire à genoux revenait à en affronter deux autres peu après. Or, nul ne pouvait répéter cet exploit indéfiniment. Par chance, Sayuri était une femme pleine de ressources, et cela compensait.

Que cherchait réellement Manjiro sur le continent ? La question demeurait en suspens, car même lui n’avait pas une réponse claire. Ce qu’il savait, c’est qu’un ancien Konohajin roux traquait les Minashigo. L’information lui venait de Hattori Hidemi, qui prétendait l’avoir rencontré. Elle avait ajouté que cet homme savait bien plus qu’il ne laissait paraître. Hidemi, détachée de l’avenir du monde, disait désormais laisser cette responsabilité aux autres ; elle voulait seulement aider ceux qu’elle considérait encore comme des amis. Et selon elle, l’un de ces amis était devenu un Minashigo.

Manjiro, lui, nourrissait une étrange admiration pour ces anciens Shinobi déchus, maudits par leur transformation. Il les voyait comme de véritables combattants, capables de lui offrir ce qu’il recherchait : un affrontement où il pouvait se battre sans retenue. Jusqu’ici, il n’avait croisé qu’un seul Minashigo dans sa vie, et il brûlait d’impatience à l’idée d’en croiser un autre.

Soudain, son regard accrocha une masure délabrée, dissimulée dans une forêt sombre, son bois pourri semblant se désagréger au premier souffle du vent. Manjiro la désigna du menton et lâcha, narquois :

Dialogue de personnage
« Eh ben… vieux clodo, le roux. »

Il avait déjà précisé, quelques jours plus tôt, qu’il ne connaissait pas vraiment cet homme. Il savait aussi que le personnage n’avait guère bonne réputation parmi les Uzumaki. Mais peu importait : il avait promis de ne pas lever la main contre un dôno, et ce roux n’en était pas un. Une réponse, il l’aurait ; de gré ou de force.

Puis, sans prévenir, il tourna la tête vers un arbre voisin.

Dialogue de personnage
« Y a des fruits. J’sais pas si c’est mangeable, ce truc… Mais j’ai la dalle. Et cette baraque, elle pue la mort. »

Délaissant la maison pour un instant, il s’avança vers la plante, son appétit guidant ses pas. C'était la fin du Printemps... Serait-ce des prunes ?

Il y a 2 mois


Sayuri ne répondit pas immédiatement. Elle resta figée un instant, à l’orée des arbres, ses prunelles pâles posées sur la masure décrépite que Manjiro venait de désigner avec ce mépris gouailleur qui lui collait à la peau. L’odeur âcre de bois pourri et de terre humide venait confirmer les soupçons de son compagnon : cette maison semblait abandonnée depuis des années… ou récemment souillée. Dans un monde comme le leur, la différence importait peu.

Elle plissa les yeux, attentive. Un bruissement dans les feuilles. Peut-être un animal, peut-être autre chose. Mais elle ne dit rien. Elle savait que Manjiro ne l’écouterait pas de toute façon ou qu’il le ferait à moitié, pour ensuite faire le contraire, juste par fierté mal placée.

Lorsqu’il s’éloigna en direction de l’arbre, Sayuri lui emboîta le pas, plus par prudence que par envie. Elle ne le disait jamais à voix haute, mais elle savait que laisser ce garçon trop longtemps seul revenait à provoquer une catastrophe prématurée. Et même si elle lui portait à peine plus que de la tolérance, il lui fallait admettre que son instinct de survie n’était pas si mauvais. Ses pas étaient plus silencieux que les siens, plus mesurés. Elle s’arrêta à sa hauteur et observa les fruits en silence.

Des prunes sauvages. Trop tôt dans la saison pour qu’elles soient mûres. Certaines portaient encore la teinte verdâtre qui annonçait un goût âpre et une digestion difficile. Elle tendit la main, en cueillit une, la fit rouler entre ses doigts avant de la lui tendre.

Dialogue de personnage
« T’as envie de passer ta soirée plié en deux ? Vas-y. Croque dedans. »


Un ton sec, mais sans réelle animosité. Un avertissement, en somme. Elle jeta un dernier regard vers la chaumière délabrée.

Dialogue de personnage
« On n’est pas seuls. »


Se chuchotait-elle. Une simple intuition féminine. C’était dit avec calme, sans panique. Une simple constatation. Sayuri avait appris, au fil des années, que le danger était rarement bruyant. Il s’insinuait, lentement, comme cette odeur de moisissure qu’on ne remarquait qu’une fois trop proche. Et cette maison… elle en débordait.

Elle se tourna vers Manjiro, son regard s’ancrant dans le sien, dur mais lucide.

Dialogue de personnage
« Tu veux des réponses ? Alors arrête de foncer tête baissée. Si notre cible est vraiment, elle sait probablement qu’on est là depuis dix bonnes minutes. »


Puis elle s’éloigna de l’arbre, marchant lentement vers la masure sans pour autant s’en approcher directement. Elle traçait un large arc de cercle autour, posant les yeux sur les alentours, attentive au moindre détail.

Dialogue de personnage
« T’as promis de pas lever la main à Emi. Moi, j’ai rien juré. »


Un simple rappel, glissé sans émotion. Elle savait se battre. Et elle savait surtout quand ne pas le faire. Mais il fallait parfois que Manjiro se souvienne qu’elle n’était pas juste une silhouette qui marchait derrière lui.

Il y a 2 mois


Manjiro haussa un sourcil, sans même daigner masquer son amusement. La prune verte, dure sous ses doigts, s’écrasa entre ses dents avec un craquement sec. Le goût atrocement acide lui fit plisser les yeux à peine une seconde, juste assez pour trahir qu’il regrettait un peu son choix, avant qu’un sourire moqueur ne se dessine sur son visage.

Dialogue de personnage
« Vous bouffez du poisson toute l’année, t’en sais quoi des fruits, toi ? »

Il mâchait lentement, ostensiblement, juste pour la provoquer davantage. Le genre de défi silencieux qu’il adressait souvent à Sayuri, comme un gamin qui cherche à voir jusqu’où il peut pousser la limite avant qu’elle ne lui mette une claque.

Puis un cri éclata au-dessus d’eux. Bref, guttural, presque humain. Manjiro releva la tête d’un mouvement vif, la mâchoire encore en train de travailler sa bouchée. Un silence tendu s’installa l’espace d’une seconde, brisé seulement par le bruissement des feuilles.

Son regard accrocha la silhouette mouvante, perchée plus haut dans l’arbre. Une ombre agile, indistincte.

Dialogue de personnage
« …Un singe ? »

Le ton n’avait rien d’effrayé, juste ce mélange d’étonnement et de curiosité bravache propre à Manjiro. Il s’essuya la bouche du revers de la main, jeta le noyau par terre et plissa les yeux, fixant la cime de l’arbre. Un sourire en coin, cette fois sincère, s’étira sur son visage.
Il recula d’un pas, main sur le manche de son arme.

Dialogue de personnage
« Dans tous les cas, j’vais lui demander son avis sur les prunes. »

Manjiro, fidèle à lui-même, éclata d’un rire bref avant de bondir à son tour, ses sandales raclant l’écorce. Le singe détala entre les branches, hurlant à chaque bond, mais l’éclat doré du jeune homme suivait de près, vif, obstiné.

Un craquement, puis un autre. Des feuilles tombèrent en pluie verte autour d’eux.
Il tendit la main, rapide, précis et ses doigts se refermèrent sur la patte droite de la bête.

Dialogue de personnage
« Ha ! Caught you, sale macaque ! »

Il riait franchement, un rire de victoire enfantine. Le singe, lui, cessa de se débattre un instant. Ses yeux, étrangement humains, se fixèrent dans ceux du blond. Puis il leva sa main libre, tremblante, et la posa doucement sur son front.

Le rire de Manjiro mourut dans sa gorge. Une chaleur fulgurante jaillit de la marque, une brûlure violente qui le fit grincer des dents.

Dialogue de personnage
« Qu’est-ce que… ?! »

Il lâcha la bête, tituba sur la branche, la main crispée sur son front désormais incandescent. La douleur irradiait, pulsait sous sa peau. Puis, lentement, la chair s’y mit à bouger.

Un craquement humide.
Une masse organique, gluante, s’étira depuis la marque, comme si quelque chose sortait de lui.

Sayuri, depuis le sol, n’eut pas même le temps de réagir. En un souffle, cette chose enveloppa le torse du blondinet, puis tout son corps, l’avalant dans une étreinte ignoble.

Un cri étranglé, puis plus rien.

Deux secondes à peine.
Un nuage de fumée.
Le silence.

Plus de singe.
Plus de Manjiro.

Seule restait, suspendue dans l’air, une odeur âcre de chair brûlée et de sève fraîche.

Il y a 2 mois


Une dizaine de minutes plus tard…

Dialogue de personnage
« Kōkan !? Où es-tu ? »

Dialogue de personnage
« Quelqu’un est là, Saru. »

Il désigna la Kaguya d’un geste sec. Le singe, un bras agrippé à une branche, s’agita rapidement :

Dialogue de personnage
« Humaine, tu as mangé mon ami Kōkan !? T'es de Kiri, non !? »

Uzumaki Kenshin n’était plus le même qu’autrefois. Son corps, visiblement plus robuste, trahissait pourtant, par certains spasmes, une fragilité inattendue. L’âge ? Non… L’expérience ? Sans doute. Depuis plusieurs années, Kenshin s’était consacré à traquer les anciens de Konoha, désormais transformés en Minashigo, pour leur offrir un dernier souffle digne. Quatre années seulement qu’il avait repris cette tâche, après des mois d’entraînement intensif et une longue période d’inactivité forcée…

Il le savait, il devrait déjà être en train de tenter de fuir ou de tuer cette femme... L'Empire ne pardonnait pas la moindre faute... D'un ton sec, il prit alors la parole :

Dialogue de personnage
« Que veux-tu ? »

Bien qu'il partageait une silhouette avec le lui du passé, Kenshin n'était plus aussi naïf que jadis. Non, il savait dorénavant ce qu'il devait faire pour survivre et continuer sa quête. Il ne pouvait guère abandonner les siens à ce pénible sort et il comptait bien mourir en accomplissant sa dernière mission.

Il y a 4 semaines


Sayuri ne put s’empêcher de frissonner, même si elle avait l’habitude de la tension et des situations périlleuses. L’instant où Manjiro avait disparu dans la fumée avait été trop rapide, trop violent pour qu’elle ait le temps de comprendre ce qui venait de se produire. Son instinct l’avait poussée à s’élancer vers lui, mais en une fraction de seconde, tout avait disparu, englouti par cette masse invisible, dévorante. Elle se tenait désormais dans le silence oppressant de la forêt, l’odeur de la chair brûlée flottant toujours dans l’air comme une insulte.

Elle inspira profondément, tentant de contenir la panique qui menaçait de percer sous sa peau. Manjiro, ce gamin incontrôlable, n’était pas du genre à se laisser avoir sans se battre. Mais sa disparition aussi soudaine ne laissait que peu de chances de le retrouver entier. Qu’est-ce que c’était, bon sang ? Ce n’était ni un jutsu connu, ni une technique classique. Quelque chose de... vivant. Organique. Comme une présence parasite, tapie dans un coin du monde.

Dix minutes plus tard, alors que la Kaguya cherchait dans les environs... Un bruit de pas. Un craquement dans les feuilles. Sayuri se figea, aussitôt sur la défensive. Une silhouette apparut entre les arbres. Un homme. Grand, les traits marqués par l’âge ou la fatigue, difficile à dire. Mais ce n’était pas un vagabond ordinaire, elle le vit à sa posture, à son regard, à la façon dont ses yeux balayaient les lieux avec une précision militaire. Sayuri ne bougea pas, mais ses mains se serrèrent en point instinctivement.

Dialogue de personnage
« Je te retourne la question. »


Elle ne l’avait jamais vu auparavant. Ce n’était ni un dôno, ni un messager de Kiri, ni un criminel notoire dont on aurait dressé le portrait dans les postes de surveillance de l’Empire. Juste un inconnu. Et dans son monde, les inconnus qui apparaissaient juste après une disparition surnaturelle... étaient rarement une bonne nouvelle.

Le singe, à moitié humain, à moitié bête, s'agita dans les branches, lançant des accusations confuses. Il parlait d’un certain Kōkan. Elle ignora la créature. Elle gardait les yeux fixés sur l’homme. Sayuri serra la mâchoire.

Dialogue de personnage
« Mon compagnon a été... avalé. Littéralement. Et toi, tu débarques, comme par hasard, dix minutes après, avec ton singe et ton air de rien. »


Elle ne criait pas. Sa voix était basse, tranchante. Typique des Kaguya. La colère froide, maîtrisée, mais prête à exploser.

Dialogue de personnage
« Je me fiche pas mal de savoir si t’es un ancien shinobi, un chasseur de primes, ou juste un taré qui parle aux animaux. Mais t’étais pas loin, et ça veut dire que t’as peut-être vu quelque chose. Ou pire... que t’étais là depuis le début. »


Elle marqua une pause, son regard s’attardant un instant sur le visage du vieil homme. Sayuri recula d’un pas, prudente, mais pas passive. Elle n’avait pas assez d’éléments pour décider si elle devait l’attaquer ou coopérer.

Il y a 4 semaines


Cette situation avait quelque chose de profondément gênant. Le regard grave du singe, posé sur lui sans ciller, ne faisait que confirmer les doutes de Kenshin. Toujours perché sur sa branche, la créature à la fourrure blanche se balançait lentement, puis prit la parole :

Dialogue de personnage
« Que veux-tu dire par “avaler” ? »

Kenshin redoutait la réponse. Dans le meilleur des cas, le garçon n’était pas loin ; victime d’une invocation hasardeuse du singe invocateur, peut-être. Une telle hypothèse n'expliquerait pas le silence pesant.
Mais dans un autre cas… il pouvait très bien se trouver pris au cœur d’un Fuinjutsu, coincé entre l’entrée et la sortie du sceau.
Kenshin soupira, relâchant la prise sur le manche de son arme.

Dialogue de personnage
« Si je voulais te tuer, je ne serais pas là à te regarder droit dans les yeux. Je suis un ancien de Konoha, comme ma chevelure te le laisse deviner. Uzumaki Kenshin est mon nom. »

Il décida de taire sa douleur, bien que son bras droit, parcouru de veines sombres, tremblât à nouveau, signe qu’un Fuinjutsu l’entravait.

Dialogue de personnage
« Peut-on discuter à l’intérieur ? »

La lumière du soleil lui pesait. Sans attendre la réponse, il prit la direction de sa modeste demeure. À l’intérieur, l’odeur du sel et des fruits fermentés emplissait l’air.
De grandes jarres contenaient des prunes : certaines macéraient dans l’eau salée, d’autres dans l’alcool ou le vinaigre. Kenshin ne se nourrissait pas uniquement de cela, mais ce fruit semblait exercer sur lui un effet curatif.
Parmi les bocaux, d’autres mélanges plus étranges s’entassaient, des liquides violacés, d’apparence instable, dont il valait mieux ignorer la nature.

Il s’assit sur l’une des trois chaises de bois, déposant dans un coin un sac de toile gonflé de champignons fraîchement ramassés.
Le singe, sans mot dire, grimpa sur une autre chaise et s’y installa à son tour.

Il y a 4 semaines


L’homme s’était présenté, Uzumaki Kenshin, comme si ce nom devait suffire à l’apaiser, ou même la convaincre de baisser sa garde. Pourtant, rien dans son visage ne réveillait le moindre souvenir. Pas un fragment, pas une scène floue d’une époque passée à Konoha.

Sayuri ne le suivit pas immédiatement. Il s’éloignait déjà, comme s’il était certain qu’elle allait le suivre. Ce genre d’assurance, ça l’irritait. Dans la hiérarchie de Kiri, une telle attitude valait une mise au sol immédiate. Pourtant, elle resta figée un instant, son regard glissant de l’homme à son étrange créature, puis à l’ombre mouvante des arbres. Un ancien de Konoha ? Peut-être. Il en avait la dégaine : les traits fatigués, la voix trop calme, le genre de mec qui en avait vu trop pour s’embarrasser de justifications. Mais elle aurait dû l’avoir croisé. Ne serait-ce qu’une fois. Lors de ses passages à Konoha pour voir Yu, sa fille.

Elle serra les dents. Il y avait encore cette odeur de brûlé dans l’air. Elle n'avait plus qu'à espérer que Manjiro soit encore en vie même si son sort lui importait peu... D’un pas lent mais assuré, elle s’engagea finalement dans le sillage de l’homme. Et une fois arrivée devant la bâtisse, elle fronça les sourcils. Rustique, pour ne pas dire insalubre. Mais pas abandonnée. Il y vivait vraiment, parmi des bocaux étranges et des odeurs de fermentations qui prenaient à la gorge. Un genre d’ermite alchimiste.

Elle entra à son tour, toujours sur ses gardes. Son regard effleura les murs, les objets, les ombres. L'individu et le singe étaient déjà assis. Sayuri ne s’assit pas. Elle resta debout, droite comme une lame, les bras croisés.

Dialogue de personnage
« Parle. »


Elle planta ses yeux dans ceux de Kenshin. Aucune agressivité directe dans son ton, mais un froid bien distinct.

Il y a 4 semaines


Kenshin sentit le regard perçant de la kunoichi se poser sur lui, comme une lame prête à trancher au moindre faux pas. Il ne fit aucun geste brusque. Juste cette main qu’il passa lentement derrière sa nuque, dans un tic nerveux qu’il ne cherchait même plus à cacher.

Dialogue de personnage
« Bah… disons qu’il est sûrement loin d’ici. »

Un léger rire lui échappa, sans joie. Son ton n’était pas moqueur, plutôt celui d’un homme qui sait qu’aucune réponse ne satisfera vraiment.
Il détourna un instant le regard, observant les flammes trembloter dans le poêle, avant de reprendre, plus bas :

Dialogue de personnage
« J’aimerais pouvoir t’en dire plus. Mais à vrai dire, j’en sais à peine plus que toi. »

À ses côtés, le petit singe leva la tête, visiblement contrarié de tant d’hésitation humaine. Sa voix résonna d’un ton grave, presque professoral.

Dialogue de personnage
« Il est dans le monde des singes. Il a été désinvoqué. Kōkan a sûrement utilisé l’estomac du singe et l’a involontairement retourné dans notre monde. C’est un invocateur. Il a dû se défendre comme il le pouvait. »

Kenshin poussa un soupir.
Il se massa les tempes, comme si les mots de son compagnon lui donnaient mal au crâne.

Dialogue de personnage
« Oui, c’est… plausible. Et si c’est bien ça, il est vivant. Du moins, pour l’instant. »

Il releva les yeux vers Sayuri. Elle ne bougeait pas. Raide, glaciale. Kenshin esquissa un sourire sans chaleur.

Dialogue de personnage
« Mais avant que tu ne décides de me réduire en cendres, permets-moi de préciser une chose : je n’ai rien à voir avec sa disparition. J’essaie juste de comprendre ce qui s’est passé, tout comme toi. »

Il se redressa lentement, s’appuyant contre la table en bois où traînaient fioles et rouleaux.

Dialogue de personnage
« Je vais me renseigner davantage sur place. »

Le macaque disparut soudainement.

Il y a 3 semaines


Sayuri ne répondit pas tout de suite. Ses bras restèrent croisés, ses doigts crispés sur le tissu râpeux de sa manche. L’odeur des fermentations, mêlée à celle du métal brûlé, lui montait à la tête. Elle ne cilla pas lorsque le singe disparut. Une seconde plus tard, elle pivota légèrement pour inspecter la pièce d’un œil distrait. Ce n’était pas qu’elle s’attendait à y trouver quelque chose, c’était simplement pour éviter d’exploser de rage.

Elle était fatiguée. Pas physiquement, mais mentalement. De ces tours d’illusions, de ces demi-vérités, de ces invocations qui apparaissaient et disparaissaient avec leurs réponses vagues et leur suffisance millénaire. Et maintenant, il fallait attendre. Attendre... le retour de ce petit macaque en espérant qu'il apporte de bonnes nouvelles, car la Kaguya n'avait aucune idée de comment rejoindre Manjiro pour venir lui botter les fesses après avoir fait preuve d'indiscipline et de négligence !

Elle eut un petit rictus amer. Si Emi était là, elle aurait levé les yeux au ciel devant sa manière de ronger son frein. Et Manjiro… il aurait déjà trouvé un coin pour dormir ou insulté le singe, selon son humeur. Yû, elle, aurait peut-être trouvé ça fascinant. Peut-être. Mais Sayuri, elle, ne supportait pas l’inertie. Surtout pas maintenant. Elle repensa aux mots d’Emi. À cette conversation étouffée par l’écho du vent, tenue à voix basse, alors qu’elles observaient les ruines d’un monde à l’agonie. Le nom de Konohasakuya résonnait encore dans un coin de sa mémoire, un murmure venu d’un autre temps. Une déesse ? Un esprit endormi ? Le sacrifice d’un être supérieur pour un monde qui se fissurait malgré tout ? C’était trop. Trop nébuleux, trop religieux, trop ésotérique. Et bien trop lent.

Mais Emi croyait à cette absurdité. Et si Emi y croyait, alors… Sayuri n’avait pas d’autre choix que d’essayer d’y croire aussi. Juste assez pour continuer à avancer. Elle tourna finalement la tête vers Kenshin, dont le silence trahissait une fatigue similaire. Il jouait les vieux sages épuisés, les hommes qui « savent mais pas trop », qui « cherchent aussi », alors qu’en réalité il n’avait rien. Pas une piste. Pas une certitude.

Dialogue de personnage
« Tu parais bien plus sage que tu ne l'es... La seule chose que je retiens de ton monologue, c'est que tu parles pour rien dire. »


Elle recula d’un pas, les bras toujours croisés, puis posa son épaule contre le chambranle de la porte. Attendre. Elle allait devoir le faire. Ici. Dans cette foutue cabane ou bien à l'extérieur. Ses yeux se fermèrent un instant. Juste une seconde. Elle sentit le poids invisible de la situation l’écraser. Le monde mourait. Quelque part, une divinité dormait, et il fallait trouver comment lui hurler dessus assez fort pour qu’elle daigne se réveiller. Et pendant ce temps, Manjiro avait disparu dans un monde d’invocations à cause d’un foutu singe. Elle inspira profondément, rouvrit les yeux, et lança simplement, d’un ton sec :

Dialogue de personnage
« J'espère que ton petit compagnon va vite revenir. La patience dans ce genre de moment ne fait pas parti de mon vocabulaire. »


Puis elle se tut à nouveau. Elle n’avait rien à lui confier. Ce qu’Emi lui avait dit, il n’avait pas besoin de le savoir. Pas encore. Peut-être jamais. Elle resta là, droite, dans l’encadrement, à surveiller les ombres qui dansaient sur les murs.

Il y a 3 semaines


Un silence épais s’était abattu sur la clairière. La pluie avait cessé, remplacée par une vapeur légère qui montait du sol, encore tiède de la bataille invisible qui se préparait peut-être. Sayuri guettait toujours, les sens en alerte, mais Kenshin ne semblait plus voir le monde qui l’entourait.

Il sentit d’abord une pression dans l’air ; un changement imperceptible, comme lorsque le vent s’inverse brusquement. Puis, une odeur d’encens humide, d’écorce brûlée et de terre ancienne. Alors, entre deux troncs, une fumée blanche commença à se matérialiser, fluide et vivante.

Elle tournoyait lentement, se contractant, se reformant, jusqu’à esquisser une silhouette familière : celle du singe, agenouillé, tête basse.

Kenshin inspira profondément. Pas de doute. C’était bien lui. Il s’avança d’un pas, sa main hésitant un instant au-dessus du sabre avant de retomber le long du corps.

Dialogue de personnage
« ...Tu as mis du temps. »

La fumée frémit. Deux yeux orangés s’ouvrirent dans le brouillard. Une voix rauque, mais étrangement calme, résonna sans que la bouche du singe ne bouge.

Dialogue de personnage
« Le chemin… n’était pas si évident »

Kenshin plissa les yeux, cherchant à percer le voile. La créature semblait affaiblie, presque translucide, comme si le simple fait d’apparaître ici lui coûtait une énergie considérable.

Dialogue de personnage
« Parle. Où est Manjiro ? »

Un silence s’étira, lourd, jusqu’à ce que la brume s’épaississe autour du singe.

Dialogue de personnage
« Il est dans le monde des singes. »

Kenshin resta figé. Un frisson parcourut son échine. Le Royaume de Sarugami, un lieu dont on murmurait l’existence à Konoha... Kenshin ne le connaissait guère, il avait été invité par le Roi, jadis... Il se souvenait encore du résultat...

Dialogue de personnage
« Tu veux dire… il est mort ? »

Le singe secoua lentement la tête. Les volutes blanches s’étirèrent autour de lui comme un manteau de cendres.

Dialogue de personnage
« Non. Pas mort. Mais… introuvable. Pour revenir, il doit être invocable. »

Kenshin fronça les sourcils. Le mot résonna étrangement dans sa tête. Invocable… Il lui fallait donc signer un pacte. Impossible sans...
Le regard du singe se troubla. Il détourna la tête, évitant de croiser les yeux de l’homme.

Dialogue de personnage
« Il doit… réussir les épreuves.
Je crains… la réaction de la Reine. »

Kenshin soupira... La Reine des Singes. Gardienne du seuil, gardienne des pactes brisés. Elle était l'unique responsable du pacte depuis la disparition du Roi. Cette dernière n'acceptait aucune nouvelle signature depuis...

Avant-hier vers 06h