[PV] Impressions

Seijuro avait cogité quelques jours sur les derniers événements. La nouvelle était surprenante, mais il semblait qu'il avait été mûrement réfléchi de l'intégrer à la section Ruto... Il serait donc sous les directives de Kitto Shinji, ce shinobi de puissance ayant abandonné contre Keisan durant la finale du tournoi de paix... Pourquoi avait-il abandonné ? Il était l'un des Kitto dont on vantait le plus la force, et pourtant il n'était visiblement pas la plus fine lame. Keisan avait, lui, été admis pour la section Eta. Il était sans doute bon de supposer que les instances supérieures avaient préféré séparer les deux hommes qui marchaient peut-être trop dans la même direction pour le prétendu pacifisme des Kitto. Keisan avait cependant été extrêmement impressionnant durant ces combats lors du tournoi. Seijuro ne semblait pas être en mesure de l'affronter pour le moment, et de toutes manières il n'en avait pas l'intention. Il le voyait plutôt comme un binôme, un duo d'avenir pour les prochains affrontements. Quelle était la meilleure direction à prendre pour compléter cet homme vétéran des combats ?

C'était sur ces pensées que Seijuro avait décidé de rendre visite à son acolyte Kitto. Il n'avait toujours pas récupéré son échiquier, et estima que l'occasion était bonne. Les deux hommes n'avaient eu d'occasion pour discuter à nouveau, pour échanger et partager leurs impressions sur les nouvelles directions que prenaient leurs destins respectifs. Serait-il seulement chez lui ?

Toc toc toc.
Il était arrivé sur le seuil de son appartement. Une visite surprise.

        La scène du pion s’écrasant sur le Roi revenait en un flashback infini, puisant tout l’espace de la mémoire du quarantenaire. Pourquoi l’homme a la queue de cheval n’avait tout simplement pas fait chavirer sa pièce. Seijuro adressait un message. Le tout était de savoir lequel. Le subordonné écrasant le maître. Il pouvait avoir plusieurs significations. Un ultime affront pour l’arbitre qu’était Kazami, ou plus largement le refus de considérer des hommes et des femmes comme étant supérieurs pour un simple grade superficiel. Une image pour symboliser la liberté de penser et d’agir des deux Kitto. Et enfin, l’idée finale d’un coup d’état traversait les réflexions du barbu.

        La réponse lui taraudait l’esprit, si bien qu’il avait reconstitué le jeu a l’identique dans son petit salon. Sur une table basse, l’échiquier était sorti, le jeu figé à cette étape cruciale lors du tournoi. Son adhésion à la section Eda lui permettait de travailler son esprit quotidiennement, mais il conservait toujours des sujets personnels. D’une certaine façon, il vivait encore une partie de son mercenariat, plus exactement la partie la plus plaisante. Celle où il avait toujours prit plaisir d’avoir été un mercenaire. Mais ce village ne comprenait pas qu’il faisait cela plus par envie que par un quelconque ordre. Son libre-arbitre était puissant.

        Depuis son retour, il redécouvrait Konoha. Les quelques repères dont il se souvenait s’étaient fait balayés par le renouveau de la génération actuelle. L’ex-vagabond avait rejoint les Kitto, apprenant à vivre à leurs côtés, et avait rejoint avec eux Konoha, apprenant encore une nouvelle fois une nouvelle façon de vivre. A présent, il recommençait. Et il ne pouvait s’empêcher de voir a quel point le Genjutsu de la Prêtresse de l’An -9 s’avérait faux. Ce n’était peut-être pas frappant pour les autres Konohajins qui s’était progressivement dirigé vers cette voie, mais pour un homme a qui ont avait promis une promesse, et dont il en voyait le résultat opposé soudainement, c’en était choquant. Il n’avait jamais accordé sa confiance en cette femme, la promesse d’une paix et JEUNESSE éternelle lui paraissait lointain. En plus de cela, des doutes naissaient en l’homme depuis la dernière mission – secrète qu’il avait reçu.

        Un son lourd provenait de la porte d’entrée. On toquait a son domicile, petit, mais suffisant pour une seule personne. Sans ranger l’échiquier, il se dirigeait vers le seuil de l’appartement avant d’ouvrir et découvrir Seijuro. Un air enjoué parcourait immédiatement le quarantenaire.


        Le barbu se mettait sur le côté pour le laisser passer et pénétrer dans sa demeure modeste. Quand ce fut fait, il allait droit vers un placard, prendre une bouteille et deux verres avant de demander :

Keisan lui ouvrit rapidement la porte, il semblait à la fois surpris et enchanté de la visite de Seijuro. L'invitant à entrer tout en allant chercher de quoi se rincer la gorge, le quarantenaire ne tarda pas à lancer une discussion autour du sujet même de la visite du plus jeune des deux Kitto. Seijuro prit place sur une chaise, regardant avec un regard presque envieux l'échiquier... Keisan semblait en faire bon usage.



Seijuro restait sur l'instant très évasif, son intérêt se portait sur le jeu que Keisan semblait avoir installé. Un bon moment ne s'écoula avant que Seijuro ne comprenne et ne se souvienne... Son ami semblait analyser le dernier moment, le dernier instant de leur affrontement spirituel sur ce jeu. Toutes les pièces semblaient être à leur place respectives... Pourquoi le faisait-il ? Etait-ce parce que dans le fond, il avait reconnu sa défaite et souhaitait trouver une faille ? Ou était-ce que cette configuration même de l'échiquier lui permettait de se rappeler précisément les instants qui vagabondaient lors de leur combat dans l'arène ? Respirant sereinement, Seijuro se souvenait de ce moment privilégié... Assis dans le centre de l'arène, des centaines de regards attentifs à la prochaine action... Une légère brise d'harmonie défilant en spirale... Il reprit.



Il fixait désormais ce pion qu'il avait délaissé lors du fameux jour. Et il regarda le roi, qu'il avait décidé d'épargner. A ce moment exact, il n'aurait su dire quelle place aurait-il prit sur l'échiquier ? La situation était-elle toujours inchangée ? Ou alors, cette promotion et le regard qu'on pouvait lui accorder l'avait-il fait prendre de l'échelon sur ce noble jeu ? Se ressentait-il encore comme ce minuscule pion oublié, portant pourtant sur sa frêle fragilité tout l'élan nécessaire pour assaillir et faire tomber le roi adverse ? Il n'aurait en aucun cas eu envie de répondre à cette question avant d'avoir converser avec Keisan. Il continua d'observer le jeu...



Seijuro sortit de sa besace une petite fiole de sake. La bouteille était d'une beauté sans pareille, une couleur de verre teintée d'un marron à la profondeur séduisante, des inscriptions de dorure calligraphiées apprêtaient le flacon à une présentation ravissante.