Le futur Raikage eut un instant de silence, lourd, qui fit lever la tête à la petite fille et papillonner de ses grands yeux dorés. L'avait-il entendue ? Masashi reprit enfin son souffle avant de répondre, mélancolique, un discours très imagé mais sans vraiment de sens pour la gamine qu'était Shizuka. Elle savait que son rôle était d'épouser Masashi et de lui donner des enfants, qu'elle était encore trop jeune pour cela, que le rôle de sa mère fut de veiller sur eux lui parut logique. Mais pourquoi par les Kamis n'était-elle pas là ?
La petite choisit de ne pas répondre à son grand frère, de faire comme si elle n'avait rien entendu. C'était une réaction adulte, certainement les premiers choix de la Shizuka qu'elle allait devenir quelques années plus tard. Elle se sentit soudainement aussi mélancolique que son grand frère. Elle voyait au loin une mère porter son enfant, le choyer, lui apprendre à marcher. Shizuka se demandait si sa mère avait fait cela pour elle, lui avait appris des choses. Elle ne se rappelait même pas de sa chaleur, ni de sa voix.
Ils arrivèrent bientôt au temple, et alors que Masashi posa un pieds sur la première marche, il eut un temps de latence. Shizuka en profita pour le serrer fort, visiblement inquiète puisque c'était la deuxième fois que cela lui prenait et qu'elle ne comprenait pas ce phénomène. Il posa un genou à terre.
Elle se faisait du soucis. Peut-être était-il malade, ou bien était-ce une vieille blessure qui l'élançait. Peut-être travaillait-il trop. Shizuka se souvenait que leur père avait souvent été sévère avec lui, malgré le mutisme dont il avait toujours fait preuve.
« "Tu veux que j'aille chercher Chihi..." »
Il posa son index sur son nez, légèrement écrasé par le geste, elle loucha dessus de surprise. Il lui dit qu'elle ressemblait à maman, cela la fit sourire, puis rire. Ils reprirent leur route.
Les marches menant au sanctuaire étaient nombreuses tant celui-ci était haut. Shizuka n'avait qu'une envie: voir sa mère là-haut. Peut-être qu'elle l'attendait et que ces marches n'était qu'une épreuve, un rituel pour pouvoir la contempler, lui parler, l'aimer... Alors la jeune fille courrait sur le premier escalier, le deuxième fut un peu plus dur avec la fatigue, le troisième vraiment difficile. Elle arrivait enfin au quatrième et...
« "Grand...Grand frère...J'en peux plus..." »
Elle avait chaud et soif. Très très soif. Elle voyait la grande silhouette de son frère une demie-douzaine de marches plus loin. Celui-ci les gravissait comme s'il s'agissait d'une promenade de santé. Il était fort. C'était un guerrier. Pas elle.
Shizuka manqua de s'écrouler.