De nombreuses minutes s’étaient écoulés depuis que l’Uzumaki avait était grièvement blessée, jusqu’à cette table d’opération. Blessé par son propre Hokage, le représentant de son clan, celui de son sang. Celui qu’il admirait, qu’il voyait comme un héros, celui qu’il avait été fier de servir, même si la plupart de ses services étaient des missions de secondes zones. Une perte de sang-froid, une situation géopolitique critique, une responsabilité immense… Il y avait de nombreuses raisons qui pouvait donner sens au geste d’une des ombres de la feuille. Mais tous convergeaient vers la même conclusion :
Un Ninja aussi puissant soit-il, reste un humain.
De la chance dans son malheurs, Seitô fut emmené jusqu’à l’une des pionnières de l’Iroujutsu, un médecin de légende : Uzumaki Kazami. Rencontre hasardeuse, ou réel coup du destin, c’était probablement la seule qui avait une chance, la dernière chance, de le sauver, et peut-être par la même occasion, d’empêcher un soulèvement populaire, une crise de confiance politique, qui pouvait provoquer, par association avec l’attaque prochaine de Gekido et par une réaction en chaîne, la destruction du village de la feuille. Certains disait que les plus grands brasiers commencent avec la plus petite étincelle, et ils n’avaient jamais eu autant raison qu’aujourd’hui.
Autre coup du sort, l’Uzumaki avait une réputation non-usurpée concernant sa tenacité. En plus des techniques qui permettaient cet exploit, son corps lui-même semblait s’accrocher désespérément à la vie. Le plus dangereux ici n’était pas l’arrêt cardiaque -car Kano veillait bien à ce que cela n’arrive pas-, mais bien l’hypoxie cérébrale : un manque d’oxygénation du cerveau menant à l’apoptose des neurones. Une sorte d’autodestruction réactionnelle des cellules nerveuses.
Dans un sursaut de conscience, Seitô se sentit flotter au-dessus de la salle d’opération. L’environnement était clair, il se sentait enveloppé dans une douceur chaleur qui le maintenait ainsi dans les airs. Il regardait la scène, il regardait cette femme effectuant des actes médicaux avec une complexité et une précision inégalée. Il regardait Kano le suppliant de s’accrocher. Il pouvait même apercevoir le responsable, épuisé au fond de la pièce, observant la scène avec un air grave. Il regardait ce monde, s’affairer à reconstituer son corps, et à lui sauver la vie.
S’accrocher ? Oui, mais à quoi ? L’Uzumaki s’approcha instinctivement de son corps. Il semblait dormir, paisiblement, alors que son torse était sanguinolant. Il le regardait, comme s’il se regardait dans un miroir, mais ce qui lui apparaissait lui semblait si étranger. Si bien qu’il approchât sa main fantomatique de sa joue. Dès que cette dernière toucha cette peau si tiède, il réalisa que cette chaleur étrangère l’enveloppant était peut-être sa propre chaleur corporelle. Et à peine l’avait-il réalisé, que son corps et l’environnement autour de lui se brisa en milles morceaux, et qu’il se fit happer dans un océan de ténèbres.
Lorsqu’il reprit cette sorte de demi-conscience délirante, Seitô était désormais dans un océan. Tantôt froid, tantôt chaud, il flottait dans cette immensité pourpre. Il ne savait pas vraiment s’il faisait du surplace, où s’il était en mouvement. Il ne savait pas vraiment s’il descendait, où s’il remonter vers la surface. D’ailleurs, où était-elle, la surface ? Il tourna avec lenteur le regard, en haut, à gauche, à droite, puis en bas. Il était lent, et il se sentait lourd. Pourtant il flottait ? Cette sensation indescriptible de légèreté et de pesanteur, il n’aurait pas su comment la décrire. Ni même si ce qu’il ressentait était possible.
Soudain, une lumière apparue dans la pénombre. Il y tombait, irrémédiablement. Où était-ce elle qui était attirée par lui ? Il s’agissait d’un immense vitrail lumineux, mais les dessins de ce dernier n’étaient rien d’autre que des souvenirs de sa vie, des projections idéalisés de moi futur, et du présent. Il s’agissait de son histoire, passée et à venir.
Il pouvait y retrouver tous ces meilleurs souvenirs. Même ce qui lui semblait autrefois difficile, avait ici un goût doux-amer. Il était apaisé en regardant ce magnifique tableau.
Puis, il le toucha de sa main, comme hypnotisé par cette lumière si apaisante. Et il s’écrasa brutalement sur la glace. Il ressenti une vive douleur à la poitrine, comme s’il étouffait, comme s’il mourait à petit feu. Ou bien était-ce justement le signe qu’il était en vie ?
Les souvenirs se brouillèrent. Comment s’appelait-il déjà ? Comment le garçon aux cheveux blonds l’avait-il nommé ? Comment était-il arrivé ici ? Et qui était-il ? Sa mémoire se brouillait. Il était perdu. Les bouts de verre formèrent sous ses yeux des petits papillons de lumières, qui commençaient à valdinguer dans cet abysse de l’oubli. Perdu dans cet océan de ténèbres et de luciole, le jeune garçon se recroquevilla sur lui-même. Il pleurait. Il ne voulait pas qu’on l’oubli. Il ne voulait pas oublier.
« J'ai peur... S'il vous plaît... Quelqu'un... »
« Ça va aller Seitô… »
Qui avait parlé ? Un homme ? Une femme ? Quelqu’un ? Quelque chose ? Ici ? Là-bas ? Quand ? Avant ? Maintenant ? Après ? Y'avait-il un après ? N'était-il pas seul ici, ou était-ce un reflet de sa propre conscience ? Un fragment de ses souvenirs ? Il s’appelait donc Seitô ? Maintenant, ça lui semblait évident.
« Tu vas survivre, allez tiens bon… »
Quoi ? Survivre ? Tenir bon ? Mais tenir bon quoi ? Le garçon chercha au plus profond de son être, rassemblant ses dernières forces et son courage pour enfin se décider à ouvrir les yeux, et à chercher cette fameuse voix qu’il entendait, lui sommant de survivre.
Les papillons de lumières se rassemblèrent, pour en former qu’un. Une forme difficilement nommable, discernable. Plus intense plus majestueux, presque un brasier intense. Le garçon essaya de le toucher, et il se rendit compte que son corps commençait à se décomposer en de petits fragments scintillants.
Il avait peur. Il ne voulait pas mourir. À n’importe quel prix.
Il se précipita vers cette lumière. Qu’est-ce que c’était ? Il ignorait. Mais lorsqu’il le toucha, la lumière se démultiplia et l’envahis. Lui, et l’océan pourpre. Comme s’il avait accepté quelque chose. Comme s’il avait choisi, et avait attrapé cette main tendue. Le chemin à suivre était inconnu… Mais il le suivrait. Quoi qu’il lui en coûte.
HRP : Je laisse entre les mains du MJ mon destin de Shinobi ♥