Le froid et tout ce qui en découle. Qui s'abat sur nos corps sans défense, prêt à ronger nos âmes jusqu'à la fin. Inéluctable saison qu'est l'hivers, synonyme pourtant d'un printemps en chemin, pressé de recouvrir nos vies d'une si belle et agréable douceur. Avec le temps j'ai appris à accepter l'hivers. Une parenthèse enchantée dans ce monde si vide de sens ou le temps d'arrête comme pour donner à nos existence un répit, un instant. Un moment à part, ou nous devrions tous en profiter pour laver nos âmes et nos corps meurtris.
Après un long chemin à arpenter les rues que le froid vide peu à peu, j'arrive devant ce bistrot ou j'aime à venir de temps à autres. Noyer ma solitude dans un bon whisky. J'attrape le mégot encore fumant de ma cigarette, et le jette à terre pour le piétiner et l'éteindre. Rapidement, j'apporte une autre clope à ma bouche et l'allume.
L'intérieur de l'établissement est complet. Dans un brouhaha intarissable, la plèbe se chahute et se bouscule aux rythmes des cris de soulards et ivrognes, venus tout comme moi, étancher leur soif de vie dans une quotidien bien triste et monotone. Je connais mon dégout pour la foule, et la proximité. Malgré le froid, aujourd'hui je resterai dehors. Je m'installe à un table de libre prêt d'une fenêtre et fait signe au serveur de m'apporter deux whisky. Comme à mon habitude, l'un sans glace et l'autre avec.
Aujourd'hui c'était le rendez-vous les intellectuels, à ma droite un homme solitaire plongé dans sa lecture. Le serveur arrive, déposant les deux verres sur la table. A l"instant vient un troisième homme. Un grand brun qui s'installe et qui lui aussi pose sur la table un livre. Existe-t-il une force supérieur, insaisissable qui incitent secrètement les curieux et savants a venir siroter de l'alcool, plongés au milieu d'un torrent de pages et de mots au beau milieu de l'hivers. Coïncidence amusante... Le calme apaisant qui règle sur cette terrasse vient contraster avec les hurlements provenant de l'intérieur du bar. Un calme bienvenue qui pourtant, très vite, est brisé. Le dernier arrivé alpague amicalement l'autre homme.
« Bonjour mon brave, dite moi qu'elle est donc ce livre que vous lisez ? Haha.~ »
Bien qu'ici pour profiter des bienfaits de l'alcool en solitaire, je prête une oreille attentive à cette discussion. Il est vrai que je me mélange rarement au monde des hommes, celui des vivants en tout cas, il ne m'est pas dénué d'intérêt pour autant. La plupart du temps je trouve mon bonheur dans la solitude est dans l'errance, et ma passion pour la lecture n'est que le lien invisible d'un monde irréel qui me raccroche ici bas.
« Euh, je ne l'ai pas encore commencé, mais c'est un livre sur les fouilles archéologiques des ruines de Tâ »
Ce bouquin, je l'ai lu. J'ai passé ces 15 dernières années au milieu des pages et des mots. N'importe quelle oeuvre aurait pu être citée je l'aurai connu. Je jette un coup d'oeil à la couverture du livre qu'il tient dans sa main, puis lui lance :
« C'est un bon livre, quoiqu'un peu classique dans la forme. »
Je cendre ma clope à terre puis la rapporte à ma bouche, aspire une grande bouffée, ouvrant profondément mes poumons, j'expire. Quel plaisir.
« Si vous aimez la bonne lecture, je vous conseil celui d'Iruzen, il traite du même sujet mais d'un point de vue bien moins manichéein »
Une gorgée de whisky glacé, et j'enchaine en me tournant vers l'autre homme, qui vient juste d'arriver. Son livre il ne l'a pas encore ouvert, mais je suis bien curieux de voir ces gouts. Cela m'en dira long sur le gens d'homme qu'il est.
« Et toi l'ami ? que lis tu ? »