Un an après...

Genji se trouvait là, assis sur les débris de l'ancien ponton du port qui existait autrefois. Il y a un an de ça, c'était ici qu'il avait dispersé les cendres de son meilleur ami "malade". Ce lourd silence qui durait depuis une année entière pesait énormément sur la conscience, mais aussi sur le coeur de l'aventurier. Il s'était occupé de son camarade des années durant et l'affectionnant comme son propre frère de sang.

Une bouteille de sake à la main, il déversait le liquide dans deux verres en terre cuite avant de poser l'un des deux sur un petit bateau en bambou qu'il avait amené jusqu'ici. La solitude et la tristesse d'un homme. Voilà le tableau qui pouvait s'offrir à n'importe quel spectateur qui le regardait. Son verre en main, il trinquait avant de boire cul sec ! Puis, dans un moment où il exprimait son affection pour le défunt, il déposait à l'eau le bateau.


Genji regardait droit devant lui, laissant son regard se perdre dans l'horizon et le soleil couchant. Le bruit de la mer venant s'écraser contre les rochers lui rappelait un peu son ancien village, Kiri. Là aussi, il avait du faire de nombreux deuils il y a des années de cela... Il se souvint du carnage qu'il retrouvait en rentrant au village ne trouvant pas Bakura, une Gaikotsu qu'il considérait un peu comme sa soeur de coeur. Mais le plus chagrinant pour lui fut la disparition d'Akiko, sa véritable petite soeur. Alors, en ce début de soirée, Genji se posait de nombreuses questions concernant sa vie d'aventurier. Il n'avait pas vu passer les années et espérait encore et toujours à la survie des enfants Gaikotsu disparus à cette époque là.


Il soupirait.


Il se servit un second verre.

Genji titubait à moitié en tentant de se relever. Il ne tenait toujours pas l'alcool, mais pour fêter sa première année de séparation avec son meilleur ami il avait décidé de boire là où il avait enterré la dépouille. Ou plutôt, là où il l'avait dispersé les cendres.










Sa tête tournait dans tous les sens et la migraine survint.




Un conseil qui rappelait à l'aventurier que son meilleur était mort à cause de sa propre folie et du monstre qui l'habitait. Ca faisait un point commun supplémentaire entre toi et lui.








Vous l'aurez sans doute compris, c'est le bordel monstre dans sa tête. La discussion entre les "trois hommes" continuaient longtemps, bien trop longtemps...

Plus les minutes défilaient et plus Genji ne se sentait pas dans son état normal. Des visions, des hallucinations vinrent le perturber, lui faisant tourner la tête, cligner des yeux à de multiples reprises. Bref, l'aventurier était dans un mauvais trip et toutes ses peines remontaient à la surface. C'était... c'était comme s'il pouvait revoir toutes les personnes qui lui étaient chères à ses yeux. Pouvant leur parler, il y avait de bonnes comme de mauvaises retrouvailles...


Il s'allongeait sur le côté sentant que ses tripes ne tarderaient pas à l'emmerder. Genji goûtait-il à la folie pure en ce instant ? Lui qui souhaitait seulement faire ses "retrouvailles" avec son meilleur ami... Il s'était complètement saoulé la gueule.


Dans quel contexte pouvait-il bien sortir cette phrase ? Aucune idée. Fallait pas qu'il boive comme un trou, il serait pas comme ça. Après une bonne sieste ou une bonne nuit, Genji devrait à nouveau avoir l'intégralité de sa tête.


Oui... Laissons ce pauvre garçon déverser toute sa haine, sa rancœur et sa colère envers la vie. Demain est un autre jour, peut-être en sera-t-il de même avec le Gaikotsu ?

Le lendemain

Genji avait un mal de crâne. Ses derniers souvenirs concernant l'anniversaire de mort de son ami n'était autre que cette bouteille qui l'avait bu en son honneur, lui dédiant ainsi un discours fraternel avant de se saouler avec du sake brut.

Il s'était inconsciemment remis en question à l'aide de cette boisson fortement dangereuse quand nous en abusons. Rien que de devoir se lever lui était difficile, mais il parvient à le faire quand même titubant brièvement avant de reprendre le contrôle de son corps.



Heureusement pour lui, il n'était pas dans les zones à risque. Le bord de mer était beaucoup plus respirable que le reste des terres désolées. Mais grâce à cette remise en question forcée et cessant de se lamenter, le Gaikotsu prenait enfin la décision de chercher plus sérieusement les siens. Du moins, ce qu'il en restait...


Un dernier salut face à l'étendue magnifique de l'eau au levé du soleil, puis Genji tourna les talons pour retrouver ce qu'il avait perdu : sa famille.

Emmaiko était un jeune homme doté de capacités intellectuelles remarquables, mais il avait manifestement des difficultés à se repérer géographiquement. À l'instant présent, il ne savait pas du tout où il se trouvait. Tout ce qu'il pouvait affirmer, c'est qu'il était entouré d'eau et qu'un ponton se dressait au loin. Une personne, à première vue humaine, était assise dessus. Emmaiko se demandait si cette personne était dangereuse. Que faisait-elle à fixer le vide sans bouger ? Peut-être était-elle morte ? L'esprit d'Emmaiko était assailli par de nombreuses questions et il envisageait tous les scénarios possibles.

La solution la plus simple aurait été de l'attaquer à distance, puisqu'elle lui tournait le dos. Cependant, ce n'était pas le souhait du jeune homme qui avait besoin de se repérer davantage et de disposer d'une base solide pour poursuivre ses investigations et découvrir le monde qui l'entourait. Peut-être serait-il judicieux de commencer son périple en entamant une interaction sociale non violente ? Emmaiko se mordilla la lèvre tout en s'approchant prudemment de la personne.

L'homme sirotait un verre, très probablement rempli d'alcool. À côté de lui, sur un bateau en bambou, se trouvait un second verre. Sans attendre, Emmaiko utilisa sa capacité spéciale pour allonger son bras et saisir le verre, qu'il se hâta de boire d'une traite. "À la tienne !" grimaca-t-il en avalant d'un seul coup, n'étant pas habitué à ce genre de breuvage. "Ça fait longtemps que tu es ici ? Es-tu perdu comme moi, ou sais-tu où nous nous trouvons ?" L'homme en face de lui ne semblait pas être dans son état normal. Emmaiko restait sur ses gardes malgré son apparence décontractée.

L'atmosphère s'emplit d'un silence pesant, seulement interrompu par les doux clapotis de l'eau contre le ponton. Emmaiko attendait la réponse de l'homme, incertain de ce qui se profilait à l'horizon.

Alors que Genji se tournait tranquillement, il constata que l'un des deux verres avait disparu... Quelqu'un était sûrement venu durant son sommeil, ce qui déplaisait énormément au Gaikotsu.

Mais une question persiste, pourquoi la personne ne l'avait pas attaqué dans son sommeil ou encore pourquoi ne lui avait-elle rien volé ?
À l'instant même où l'aventurier se posait cette question existentielle, il vit une ombre qui lui paraissait humaine.

Genji restait subitement sur ses gardes, sans pour autant montrer les dents. S'il avait compris une chose, c'est qu'il est stupide de sortir les armes sans avoir évaluer la situation de plus près. Alors, dans cet état d'esprit en plus d'être imbu de sa personne il lâcha un :


Il ne lui restait plus qu'à faire preuve de patience et de s'adapter en fonction de la réponse du drôle d'animal en face de lui.

Dans un monde où l'amitié était étrangère à Emmaiko, il ne savait pas comment réagir lorsque quelqu'un se permettait de l'appeler « ami ». Dans son passé, l'amitié était perçue comme une source potentielle de trahison par son père. Face à cette phrase, Emmaiko se sentait provoqué, et il savait que cet individu ne resterait pas impuni s'il continuait à le traiter de haut.

rétorqua-t-il sans ménagement, ignorant les conséquences potentiellement dangereuses de ses paroles envers un inconnu. Peu lui importait. Les mots avaient du poids, et aborder le sujet de l'amitié était une mauvaise idée, surtout compte tenu de son passé, même si l'homme en face d'Emmaiko l'ignorait. Par certains gestes, l'homme semblait inoffensif, mais sa sérénité pouvait masquer une force que l'on ne pouvait pas encore évaluer. Ainsi, Emmaiko choisit soigneusement ses mots, bien qu'il n'ait déjà pas été courtois.


avoua-t-il, lançant son verre vide qui atterrit près de son interlocuteur. Pour Emmaiko, cet acte était anodin, mais n'importe qui aurait pu y voir une provocation. Malgré cela, il continua d'avancer, essayant de chasser le goût désagréable de l'alcool de sa bouche.

Ok. Genji venait, pour la 1009ème fois, de tomber sur un détraqué. Il savait qu'avec ce genre d'individu il ne valait vraiment pas faire de gestes brusques. Le moindre coup de pression ou mot de travers pouvait faire dégénérer la situation.




Se rattrapait-il. Un imbécile perdu et agressif. Voilà le tableau que lui offrait la vie en récompense d'avoir veiller sur son vieil ami "malade". Décidemment, le Gaikotsu songeait de plus en plus à écrire un livre de sur sa vie depuis l'attaque des Kenketsu.




Un peu louche cette histoire quand même. Seuls les détraqués ou les désespérés venaient ici. Pas les gens dit "normaux". Quel genre de surprises lui réservait l'inconnu, surtout que Genji remarquait qu'il ne cessait de marcher dans sa direction balançant le verre d'alcool irrespectueusement.


Disait l'aventurier en souriant. Au moins ça le rassurait sans vraiment le rassurer.

Emmaiko scrutait l'homme avec méfiance, se demandant s'il était réellement un voyageur comme il prétendait l'être. Son apparence négligée semblaient contredire cette affirmation. Néanmoins, Emmaiko avait sollicité son aide et espérait qu'il serait capable de lui apporter une assistance quelconque.



Le sourire de l'homme demeurait imperturbable, comme s'il trouvait amusement dans la situation. Peut-être était-il sincèrement intrigué ou peut-être cachait-il une incompréhension derrière cette attitude. Emmaiko ne pouvait s'empêcher de se demander si sa décision impulsive de jeter le verre après l'avoir bu avait été judicieuse. Pourquoi avait-il pris cette initiative ? Peut-être était-ce une tentative maladroite de se débarrasser de sa frustration.



lança Emmaiko d'un ton cynique, s'approchant à moins de cinq mètres de l'homme. Malgré sa prudence initiale, il commençait à relâcher sa garde, se laissant emporter par la conversation qui prenait de l'ampleur. Bien qu'il ne soit pas totalement rassuré en présence de cet inconnu, le sourire niais de l'homme lui donnait davantage l'impression d'une personne inoffensive que d'une menace réelle.

Le décor qui les entourait ne manquait pas d'attirer l'attention d'Emmaiko. Les reflets des lumières se mêlaient aux éclats de verre sur le sol, créant une atmosphère étrange et presque poétique. Les détails étaient importants pour Emmaiko, qui observait chaque élément avec une acuité particulière.

Pourtant, malgré la curiosité grandissante d'Emmaiko, il ne pouvait s'empêcher de se rappeler que le monde était rempli de personnes mal intentionnées, prêtes à mentir et à manipuler pour piéger leurs cibles. Il restait donc sur ses gardes, prêt à réagir au moindre signe de danger.

C'est bien ce que Genji pensait; cet individu ressemblant à un jeune homme n'était vraiment pas net dans sa tête. Il se demandait à quel point il pouvait être dangereux pour ne pas répondre à sa question. "Quel lieu cherchait-il ?" et surtout "que me voulait-il vraiment ?" L'inconnu continuait à avancer étant à cinq mètres de Genji.
Tandis que le garçon visualisait autre chose que sa personne, le Gaikotsu pouvait laisser paraître une grande peine, celle de la perte de son ami "malade". L'individu en face de lui ne pouvait le savoir et cela devait être dans son comportement une telle désinvolture.


Peut-être devait-il enseigner une leçon de vie au jeune face à lui. Son comportement et attitude passaient du coq à l'âne, de quoi rester sur ses gardes et de ne pas engager le combat futilement en cas de malentendus.




L'aventurier tentait de sourire, mais il reprit son air sérieux.












Peut-être que cette courte histoire n'atteindrait même pas le jeune garçon qui devait être atteint de troubles psychiques au vu de sa façon d'être. Mais au moins, Genji tentait de sauver une autre âme égarée en restant méfiant tout de même. Il ne voulait pas retomber dans ce cercle vicieux qui avait duré plus d'une dizaine d'années...

L'atmosphère était lourde tandis que l'homme venait d'avouer son crime avec une froideur déconcertante, arborant même un sourire narquois. Emmaiko, quant à lui, s'était toujours considéré comme une personne capable d'être abominable, mais il ne s'attendait pas à être confronté à un individu capable de commettre un meurtre tout en cherchant à se trouver une bonne excuse pour justifier son acte.


demanda Emmaiko, sachant bien qu'il n'obtiendrait pas de réponse satisfaisante. Il trouvait simplement pitoyable que cet homme cherche à faire de son crime un trophée, alors qu'il n'avait rien d'extraordinaire ou de valorisant pour cet homme brisé.

Cependant, Emmaiko avait une raison de plus de s'intéresser à cet homme. Il avait désespérément besoin d'informations sur son père, qui était un Minashigo, ainsi que sur sa mère dont il ne savait rien, si ce n'est qu'il était son fils et qu'il pourrait potentiellement lui ressembler. Plus il observait cet homme, plus il était convaincu qu'il possédait une connaissance profonde de ce monde complexe. De plus, sa capacité à tuer suggérait une certaine force et Emmaiko pensait qu'il pourrait être un allié précieux dans sa quête.



Cette rencontre marquerait sans aucun doute un tournant décisif dans le voyage d'Emmaiko, et il sentait que les réponses qu'il cherchait se trouvaient peut-être entre les mains de cet homme trouble.

Intéressant... Le jeune homme ne semblait avoir aucune once de méchanceté, mais également aucune once de bienveillance. Il ne se donna pas la peine de prince des pincettes, car il ne jugea que de moitié Genji.

Le Gaikotsu semblait plus que satisfait de cette réponse épineuse. "Au moins, celui-là ira loin" se disait-il.


Souriait-il de façon narquoise. Il ne se cachait aucunement de taquiner le jeune inconnu face à lui. Un jeu dangereux auquel il se prêtait. Et lorsque le blanc bec répondu enfin à la question tant attendu de l'aventurier robuste...


Le visage de Genji montrait clairement un réflexion intense avant de fixer le garçon.


D'un ton solennel et plus que sérieux, l'homme à la chevelure blanche ajouta :




En regardant derrière, vers l'horizon azur il continuait dans sa lancer.


Etait-ce une sorte d'avertissement ? Probablement. Le Yuukan est très connu pour ne pas être tendre avec les vagabonds... Et cet individu dont Genji ne mentionnait même pas le nom faisait parti de ces menaces.