Manjiro était toujours étendu au sol, le souffle lourd, les côtes douloureuses, mais ses lèvres se fendirent en un large rictus. Puis, sans prévenir, un éclat de rire jaillit de sa gorge. Un rire cru, incontrôlable, presque dément. Face au spectacle de la carcasse osseuse qui se reconstituait une fois de plus, il ne pouvait que s’esclaffer : ce monstre refusait de mourir, et cette absurdité ne faisait qu’attiser sa fureur et son excitation.
Il le savait pourtant. S’il voulait mettre un terme définitif à ce combat, il ne suffirait pas de fracasser encore et encore les os de cette créature. Non… il fallait la pulvériser intégralement, briser sa structure jusqu’à ce qu’aucun fragment ne soit capable de se régénérer. Chaque éclat devait voler, s’écraser contre les parois de l’arène, se réduire à rien.
Le colosse d’os se redressa lourdement, ses articulations grinçant dans un vacarme sinistre. Manjiro l’imita. D’abord un coude qui s’enfonça dans le sol, puis un genou, et enfin son corps entier se redressa dans un mouvement vif, brutal. Il roula ses épaules, fit craquer sa nuque, et planta son regard incandescent dans celui de l’abomination.
Un murmure franchit ses lèvres, teinté d’un amusement sombre :
« Le clan Chikara, hein… »
Il leva la main devant lui, observant ses doigts trembler sous l’effort, ignorant complètement que la créature levait la sienne dans un geste imitatif. Ses pupilles se rétrécirent, et il souffla, presque pour lui-même :
À sa paume, une sphère de chakra commença à tourbillonner, compacte, concentrée. Elle se gorgea de son énergie avec une voracité insatiable. Très vite, une flamme écarlate vint se mêler à la rotation, enveloppant la boule d’un éclat rouge incandescent. Le Kōhen Rasengan prenait forme : fruit de son héritage Chikara et de l’entraînement acharné mené aux côtés de Kaguya Emi, capable de fusionner son chakra avec le feu pour donner naissance à une arme dévastatrice.
La lumière rouge pulsait, emplissant l’air d’une chaleur suffocante. Manjiro esquissa un sourire démentiel.
Dans une explosion de mouvement, il bondit. Son corps fendit l’air en une charge fulgurante, ses pas résonnant comme des coups de tonnerre. Le bras gigantesque du monstre se leva pour l’écraser, mais Manjiro y planta son Rasengan de feu. L’impact fut titanesque : l’os éclata en une gerbe de fragments incandescents, projetés aux quatre coins de l’arène. Sans ralentir, porté par son élan, il poursuivit sa course et frappa directement le crâne de la bête.
Le Kōhen Rasengan hurla dans l’air avant de s’abattre, et l’instant d’après, la tête entière de la créature vola en éclats. Le sol trembla sous la violence de l’explosion. Des os tranchants fendirent l’air, certains traversant le corps de Manjiro dans une douleur brûlante qu’il n’avait pas anticipée.
Mais son cri couvrit tout le reste.
Un rugissement de triomphe et de folie, alors que l’arène se retrouvait noyée dans un nuage de poussière, de flammes et d’éclats d’os. Manjiro retomba lourdement quelques mètres plus loin, le corps lacéré, le souffle court, incapable de contrôler la surpuissance qu’il venait de libérer. Mais son sourire, lui, ne vacillait pas. Il le savait, Emi ne craignait pas la chaleur...
Son état était lamentable : ses vêtements n’étaient plus qu’un amas de tissus déchirés, son torse percé par plusieurs éclats encore fichés dans sa chair, ses mains brûlées par l’excès de chakra qu’il avait canalisé. Le sol s’imbibait lentement de son sang. À peine conscient, il demeurait pourtant debout, titubant, comme par défi. Il aurait besoin de soins dans les jours à venir, non pas seulement pour survivre, mais pour éviter des séquelles irréparables.