Un entraînement donc ? Voilà ce qui allait lui permettre de prendre son mal en patience, d'attendre pour pouvoir voir son meilleur ami. Mais aussi, pour se changer les idées. Le jeune garçon avec lui avait raison : l'entraînement pourrait lui permettre de soit se défouler, soit de lui faire penser à quelque chose, afin d'évacuer tout ce stress, toute cette tension. C'était d'ailleurs un sentiment que Kano avait du mal à gérer, n'étant pas habitué aux situations réellement angoissantes. Lui qui vit d'ordinaire dans son confort la plupart du temps, le voilà qu'il s'était perdu. Il s'est égaré, il n'avait personne pour le guider. Au fond de lui, il le savait : il se reposait beaucoup trop sur Seitô, pour un peu tout et n'importe quoi. Et maintenant qu'il était hors course, il ne pouvait ni le remettre en état, ni continuer d'avancer.
Une pression si intense, qui compressait son coeur et son être tout entier. Les paroles du second Chikara le fit sortir de ses pensées.
« ... C'est normal. Je me dois d'aider mon prochain... »
Pour rendre ce monde meilleur. C'était également une étape, d'être celui qui illumine la voie, et guide les hommes. Même si le blondinet n'était réellement pas en forme, il restait toujours avec ses objectifs en tête. D'autant plus que, si Seitô n'était pas là, c'était aussi à lui de prendre la relève le temps qu'il se rétablisse. C'était tout de même dur. Comment sourire et être source d'inspiration lorsque tout va mal ? Kano ne connaissait pas la réponse, il devait l'apprendre.
Ne pas s'excuser ? Difficile, surtout dans son état d'esprit actuel, mais il se contentait d'hocher la tête. Et il sentit son coeur légèrement se réchauffer lorsqu'il lui expliqua qu'il commençait à mieux cerner le truc, grâce à ses quelques conseils.
« C'est curieux. En t'entendant, j'ai l'impression que ta mère et mon père réfléchissent de la même manière. Moi aussi il m'a déjà menacé de sévir, si je ne réussissais pas à maîtriser une technique de notre clan. Je comprends pas pourquoi ils sont comme ça. Enfin, si mes conseils ont pu t'aider, c'est que c'est un bon début, ça me fait plaisir. »
Oh oui. Son père était assez à cheval sur son apprentissage de ses jutsus claniques, passé un moment. Fort heureusement, il a fini par changer de disque lorsqu'il a fini par comprendre que le blondinet ne souhaitait pas plus que ça se spécialiser là-dedans, et que cela ne lui disait trop rien. Bien qu'il l'ait laissé en paix, leur relation n'a fait que se dégrader suite à ça, déjà qu'elle n'était pas au beau fixe. Cependant, comme d'ordinaire, il n'y prêtait que très peu d'attention. Moins il le voyait, et mieux il se portait !
Il le regardait ensuite faire, à continuer son entraînement. Kotaro utilisait ses fils, et s'entraînait donc à les contrôler à plus basse quantité. Et il semblerait que deux fils soit actuellement son point de départ, et sa limite. Au-delà, il parvenait pas à contrôler ses fils.
« C'est un bon début ! Comme je te disais, lorsque je les ai utilisé pour la première fois en situation réelle, j'en étais au même stade que toi. Dans le feu de l'action et l'adrénaline, j'ai réussi à me surpasser, et à en créer un troisième. »
Le jeune Chikara refit les mêmes mudras que précédemment, afin de créer dix fils de chakra, parfaitement identiques. Malgré lui, il l'avait bossé cette technique...
« Concentre toi sur chacun de tes fils, que le mouvement de tes doigts soit en accord parfait avec le mouvement que tu souhaites donner à ta technique. Ne vois pas tes fils de chakra comme quelque chose qui émane de tes mains, mais plutôt comme une prolongation de tes doigts. Ce chakra est le tien, il fait partie de toi. Détermine ce que tu veux en faire, et réalise ton action comme si tu demandais à ton corps de lever la jambe, ou donner un coup de poing... Démonstration. »
Le garçon se positionna face à l'un des mannequins, et utilisa de ses fils pour attraper chaque extrémité du pantin de bois et de paille, comme s'il cherchait à ligoter sa cible.
« Tu peux essayer d'ordonner à tes fils une seule et même action, afin de te faciliter la tâche au départ, et de prendre l'habitude. Là par exemple, plusieurs de mes fils se sont attaqués à la même partie du mannequin. Et avec la pratique, tu dissocieras plus facilement chacune des actions de tes fils... »
Le jeune garçon lui expliquait comme il le pouvait. Il n'était pas très pédagogue, n'ayant jamais réellement appris quelque chose de la sorte à qui que ce soit, mais il fallait bien un début à tout.
« Qu'est-ce que t'en penserais, toi, Seitô ? »
Ces mots résonnaient dans sa tête, comme s'il cherchait son approbation. Est-ce qu'il s'y prenait bien ? Est-ce qu'il pourrait transmettre un peu de son savoir à quelqu'un dans le besoin ? S'il était là, il aurait cherché à le faire sans doute, dans la mesure de ses moyens. Sans doute par un procédé moins scolaire, et sans doute plus dans l'action qu'autre chose. Quoique, lorsqu'il explique quelque chose, on se rend compte d'à quel point il peut tenir des discours assez profonds ; un sacré parallèle avec son attitude de fanfaron de première.
Néanmoins, là, il n'était pas là. Il ne pouvait pas l'aider, car il n'était pas là. Il aurait pu l'être... mais le destin en avait décidé autrement. Les mains de Kano se resserraient une nouvelle fois, mais les fils ne se stoppèrent pas ce coup-ci. Les fils qui entouraient chaque membre du mannequin se resserraient également sur leur proie, comme s'il cherchait à l'étouffer. Et si Seitô n'était plus le même, à cause de ça ? Et s'il se mettait à chercher vengeance, alors qu'ils s'étaient promis une toute autre vision du monde ? Non... l'Uzumaki ne devait pas sombrer dans la haine et la rancœur, il se devait d'y résister et de garder ce sourire si symbolique et inspirant. Il devait rester cette lueur, celle qui le guide dans l'obscurité. Mais s'il ne devait pas y sombrer, pour Kano c'était de plus en plus difficile de rester sans rien faire, et de ne songer à rien y faire. Si quelqu'un devait prendre ce fardeau sur ses épaules, c'était bien lui, et pas Seitô.
« ... C'est... C'est pas juste ! »
Le ninja au bonnet se mordait la lèvre, les yeux humides, alors qu'il tirait de toutes ses forces sur ses fils. Sa main droite se délivra de sa proie, pour mieux l'attaquer ensuite. Ces fils bougeaient frénétiquement, fouettant le mannequin que fixait Kano, avec une hargne et une rage de vaincre inégalée.
« Pourquoi ça s'est passé comme ça... Ça aurait du être un bon moment, et ça s'est transformé en cauchemar !! »
Les yeux rouges de l'enfant fixaient avec colère le pantin qui n'avait rien demandé. Les coups fusaient, dans une violence sans pareille. Le bruit des fils claquant sur le bois se faisait de plus en plus intense et bruyant, si bien qu'ils commençaient à montrer des signes de faiblesses. Lui qui ne se battait jamais, qui n'aimait pas ça, exprimait pour la première fois sa frustration et sa haine par la violence. En face de lui, ce n'était pas la tête d'un mannequin d'entraînement qu'il voyait, mais la tête du Hokage. C'était à lui qu'était destiné cette colère, et la violence de ses coups. C'était lui qui avait attenté à la vie de son ami, à tel point qu'il ne sera peut-être plus jamais comme avant. C'était à lui d'en subir les conséquences.
« Prends ça ! Et ça ! ET CA ! ET CA ! Pourquoi ?! Je te hais !! ... »
Il continuait d'exprimer sa colère et sa haine, en rouant de coup l'outil de leur entraînement. Actuellement, Kano ne saurait dire s'il se sentait soulagé, mieux, ou encore pire. Tout était flou dans son esprit, il ne souhaitait qu'une seule chose : le faire souffrir. Ses mains n'étaient pas faites pour blesser, mais pour donner la vie ? Eh bien, il y avait une exception à tout.