Alors que le garçon ne cherchait qu'à essayer de le calmer, son discours eut un tout autre effet. Sa main fut chassée violemment de son épaule, alors qu'il lui hurlait dessus. Il lui mentait, c'est ce qu'il pensait ? Ainsi, malgré toute sa bonne volonté et la présence qu'il avait pour lui, il arrivait tout de même à penser que lui, son meilleur ami, pourrait lui mentir ? Qu'il pourrait l'abandonner ? Le garçon ressentait des frissons dans son dos, en entendant ses propos glaçants. Son regard était devenu hostile, comme s'il fixait avec effroi un ennemi, un monstre qui lui voudrait du mal. Le coeur de Kano battait à toute allure à cet instant, n'ayant jamais vu autant d'hostilité dans son regard, et encore moins dirigé contre lui.
Bien sûr qu'il se souvenait. Bien sûr qu'il savait ce qu'il lui avait fait. Il voulait simplement le calmer. Et le voilà qu'il l'accusait de trahison. Une douleur le prenait dans la poitrine, si bien qu'il crut qu'elle allait exploser. Comment pouvait-il penser ça ? Après tout ce qu'il avait fait pour lui ? Après tout ce qu'ils ont traversé ensemble ? Après ces nuits à rester à son chevet, à l'encourager, à le soutenir, à l'aider, à tenter de lui redonner espoir, à le prendre dans ses bras lorsqu'il s'effondrait, à endurer les crises de son humeur dégringolante... il osait lui dire qu'il le trahissait ? Après tout ça ? À croire que tout ce qu'il faisait pour lui n'avait aucun sens. Qu'il n'y avait aucun espoir. À cette pensée, le blondinet se mordait la lèvre intérieurement, si bien qu'il sentait le goût du sang sur sa langue. Ses poings se serraient, et son regard exprimait une profonde tristesse et détresse en le regardant.
Pas lui ? Comment pouvait-il penser une seule seconde qu'il se laisserait aussi docilement retourner la cervelle, et se liguer contre lui avec la personne qu'il détestait le plus. Il était visiblement détruit, ravagé par la tristesse. Kano quant à lui, se sentait tout autant détruit, mais un sentiment bien particulier montait en lui. De la colère. Envers son ami, envers lui-même. Tous ses efforts étaient vains. Il s'était même un moment mis en posture défensive, comme s'il pensait qu'il allait l'attaquer. C'en était trop. Il pourrait l'insulter. Il pourrait le frapper. Il pourrait le briser, en milles morceaux, détruire ce qu'il lui restait. Kano le savait, il avait ce pouvoir sur lui. Il pouvait le faire, le briser et en finir une bonne fois pour toute, las de tous ces jours, ces semaines et mois à perdre son temps avec des efforts futiles.
Devant lui, devant son silence, Kimino saisissait l'occasion pour lui apposer son sceau, alors que Seitô s'écroulait, pleurant à genoux sur le sol. Il lui suffisait d'un seul geste. D'une seule parole. Et tout sera terminé. Il sera brisé.
Le garçon s'approchait de lui, avec un regard lourd de sens. De la tristesse, de la colère... mais aussi une incertitude à chaque pas qu'il faisait. D'un pas lourd, il se mit juste devant lui. Il y était. Il pouvait faire ce qu'il voulait de lui, et en finir définitivement. Et pourtant.
Il se laissait tomber sur ses genoux, et le prit dans ses bras. Même s'il se débattait, il ne le lâchait pas. Il allait devoir lutter pour se défaire de cette emprise, si tel était son désir. Le garçon le serrait fort contre lui, s'assurant qu'il ne s'échappe pas, mais tentait tant bien que mal, malgré l'horreur qu'il ressentait dans sa poitrine, de ne pas pleurer. Le Chikara le savait, il était interdit de pleurer en sa présence, il se l'était promis, il ne devait pas le faire. Pour lui, il devait rester une figure forte, la personne qui le guiderait vers un avenir radieux, où il n'aurait plus à subir ça. Pleurer, c'était montrer sa faiblesse. Et à l'heure actuelle, Seitô n'avait aucun intérêt à percevoir ses faiblesses. Le pilier qu'il était devenu se devait d'être inébranlable.
« Jamais je ne te mentirai. Jamais je ne te trahirai. Jamais, tu as compris ? Je suis là. Je suis avec toi. »
Le serrant dans ses bras, il ne prêtait même plus attention à Kimino qui devait sans doute en avoir marre de la situation actuelle... mais il lui avait demandé de le calmer. S'il n'avait pas réussi la première fois, alors il réessayerait. Autant de fois que nécessaire. Car plus qu'un ordre donné par son sensei et Hokage, c'était son devoir en tant qu'ami.
« Tu peux pleurer, ou décharger ta haine sur moi. Je resterai quand même. Alors, prend le temps qu'il te faut, mais calmes toi. »
Il le serrait un peu plus, ses yeux devenaient humides malgré lui. Il clignait des yeux, tentant de s'en débarrasser.
« C'est pour toi que je fais tout ça, Seitô. »
Une dernière phrase libre d’interprétation, peut-être la comprendrait-il différemment de ce qu'il pensait lui ? De toute manière, il ne pouvait pas mal l’interpréter.
Il repensait à ses murmures, et se permit un petit sourire, bien qu'il ne pouvait le voir. Il voulait que ça s'arrête ? Kano n'attendait que ça également.
« Je suis avec toi Seitô, je suis là. Tu arrêteras de souffrir, bientôt tu retrouveras le sourire. Fais-moi confiance. Et puis... Tu n'as rien gâché. Ecoute-moi. Suis moi. Et tu retrouveras tout ce que tu penses avoir perdu. »