Seule, la maîtresse de maison finissait de nettoyer et de ranger sa demeure. Cela faisait une heure que l'ombre avait quitté les lieux. Son départ n'avait pas réellement ému la femme téméraire, mais il lui laissa un goût amer en bouche. Cette rencontre inopportune et mouvementée avait heurté l'esprit de la quarantenaire. Parler de projet politique et d'avenir du clan, elle en avait perdu l'habitude. Après tout, ce genre de discussion appartenait à son passé. Ce n'était qu'avec son défunt mari qu'elle se permettait de telles pensées. Depuis sa mort, elle taisait ses ambitions. Le caractère bref de cette discussion lui rappela alors, avec nostalgie, son époux et combien il lui manquait. Le visage éteint, elle laissa perler une larme.
Puis, d'un revers de main, elle balaya ce misérabilisme et se relança dans l'action. Son âme s'éveilla de nouveau, ses iris opales reprirent des couleurs et son corps se mit en mouvement. En quelques secondes, Kagero retrouva sa volonté flamboyante et sa fougue légendaire. D'un pas ferme, elle rejoignit le sous-sol et reprit l'entraînement. Qu'il soit sportif ou médical, la kunoichi désirait se montrer plus utile pour son clan. Pour cela, elle avait acquis la certitude qu'il fallait gagner en puissance. Si comme elle l'avait spécifié à l'inconnu, être leader ne l'intéressait pas, l'opportunité de devenir une conseillère avisée et respectée la séduisait davantage. C'était peut-être dans ce rôle qu'elle finirait par s'épanouir.
Tandis qu'elle renforçait son corps et son mental, la belle Miwaku repensa à cet échange. Elle avait secrètement espéré pouvoir attirer cet Azamuku dans sa demeure, afin de garder un œil sur cet électron libre quelque peu inquiétant. Malheureusement, bien qu'en acceptant son présent, il refusa sa dernière proposition. Cet échec, elle se l'expliqua par son manque de subtilité et sa trop grande impulsivité. Elle avait raté l'occasion de mettre en cage cet oiseau un peu trop affranchi à son goût. Mais bon, peut-être que le lien qui s'était tissé cette nuit, serait suffisant pour que cet homme revienne à la rencontre de la Geisha.
Enfin, elle repensa à la boîte et à son contenu. C'était l'ultime héritage de son amant : un trésor, constitué au prix des larmes et du sang, dans l'unique but de constituer un conseil Miwaku fiable et fier des valeurs du clan.
« Shun... J'ai confié nos écrits à un inconnu. J'en suis désolé. Mais je crois qu'il sera plus à même de réaliser notre rêve. Avec son statut et ses connaissances, notre clan a peut peut-être renouer avec sa gloire d'antan. Je ne pourrais pas dire que je lui fais confiance, mais dans ce monde, parfois, il faut faire des paris risqués... »