Kazami n'avait jamais vu Kotaro dans cet état. La force de sa colère était écrasante, la jeune femme devait contracter ses muscles pour se tenir droite. Sa simple intonation lui donnait l'impression de se faire écraser à coup de marteau géant. Lorsqu'il la plongea dans son genjutsu, elle tomba à genou. Impossible de résister à une telle force, à de tels sentiments.
« Arrêtes ... pitié ... »
La vision de Konoha en flammes de Kotaro broya le coeur de la kunoichi. Les souvenirs du Kitto se mélangèrent aux siens, créant une sorte de scène cauchemardesque. Elle entendit des voix hurler, ne sachant plus s'il s'agissait de l'illusion de Kotaro, de ses propres souvenirs ou de la réalité au présent. Pendant un instant, elle vacilla, proche de perdre de connaissance. Puis elle refusa cette faiblesse, hurla en se tenant la tête. De toutes les tortures qu'on avait pu infligé à l'Eisenin, celle-ci était la pire. Elle la mettait littéralement à genoux, éclatant son âme et le peu de bonheur qui lui restait. Elle voulu lui crier dessus, l'insulter ... Mais rien ne sortait. Pire même, son esprit s'enlisa dans les abysses de sa conscience ...
« C'est l'heure. L'heure de sauver Konoha mes amis. »
Une pièce sombre accueillait de nombreuses personnes, tous s'étaient masqués le visage. Ils hurlèrent à l'annonce de Gekido. Ce dernier, légèrement en hauteur sur une petite estrade, brillait de mille feux. Elle l'admirait. Il avait une force et un charisme que l'on rencontre pas tout les jours. Il était celui qui allait sauver Konoha, celui qui changerait le monde ... Le rouquin descendit de son piédestal pour rejoindre sa belle. Quelle chance elle avait ! D'être aimée d'une telle personne !
Lorsqu'il fut à sa hauteur, il glissa une main dans son dos, amicale, amoureuse. Elle profita de cet instant, comme s'il n'y avait rien ni personne autour d'eux. Puis elle leva les yeux vers son amant.
Le froid.
Ses yeux étaient glacial.
Ce n'était pas son bien aimé qui la regardait, c'était elle. Enoshima.
Dans un sursaut de surprise, la jeune femme fit un mouvement de recul. En moins d'un instant, le regard de l'homme changea. Redevint celui d'un amoureux, inquiet de sa réaction.
Le souvenir s'embrume, Kazami est à présent dans le village, face à cinq adversaire.
« Vous êtes dans le mauvais camp, mes frères ! Les Chikara vont détruire Konoha si nous ne faisons rien ! »
Une silhouette apparait à ses côtés, de long cheveux blonds et un air tendre. Nakatsu. Son premier petit amis décédés. Tués de ses mains. Il ne cessera donc jamais de la hanter ?
"De ce que je vois, c'est vous qui êtes entrain de détruire le village."
Le coeur de la jeune femme s'emballe, se réveille de ses souvenirs, face à Kotaro qui lui criait dessus. La nausée lui donna un haut-le-coeur.
C'est ainsi qu'il la considérait. Le fond de la pensée du Kitto. Une égoïste, qui croit tout savoir. Cette révélation lui fit l'effet d'une claque mais aussi beaucoup de peine. L'ami qu'elle essayait de récupérer la méprisait au plus haut point. Comment en étaient-il arrivés là ?
Kotaro ne lui laissa pas le temps de répondre et lorsqu'elle peina à remonter son regard vers lui, elle se pris un second genjutsu en plein visage.
Immense solitude. Une image un peu floue d'elle-même seule au milieu d'un désert, sans personne d'autre. Aucun ami, personne à qui parler, à qui se confier. Juste elle-même. En face d'elle, à quelques pas, se dessinait la silhouette de Kotaro. Les mains dans les poches, il marchait. Elle lui couru après, l'appelant. Il ne se tourna pas, continuant simplement son chemin. Puis elle essaya de lui agripper le bras, et sa main le traversa comme un fantôme.
Etait-ce là le sentiment profond de Kotaro ? La solitude ? Kazami avait peur d'y croire, car si c'était le cas, elle en était entièrement responsable. Lorsqu'elle quitta à nouveau le monde imaginaire, sa vision était toujours troubles. Elle compris rapidement que c'était parce qu'elle pleurait. Partager les sentiments de son ami lui l'avait plongée dans une douleur qu'elle n'avait jamais connue, contre la quelle il ne semblait exister aucun remède.
Les dents serrés, le visage face au sol, elle souffla :
« Si je laisse ma culpabilité m'envahir, jamais je ne survivrais. »
Depuis le début elle avait refusé de se laisser emporter par ce sentiment. Probablement le pire qui existe. Elle avait l'impression que si elle le laissait s'installer, jamais elle ne pourrait se relever. Et à quoi cela servirait-il ? Il ne changerait pas ses actions, pas son passé. Il la consumerait juste.
« Je suis ... tellement désolée ! »
Elle savait que ces paroles n'auraient probablement pas d'impact sur son ami mais elle avait besoin de le dire. Même si le genjutsu était fini, elle sentait encore la solitude en elle, comme si celle de Kotaro avait réveillé la sienne. Malgré tout, il quitta les lieux après avoir lancé un ultimatum à la jeune femme.
Elle voulu le retenir, lui supplier de rester, lui demander de l'aide. Mais rien ne sortait. Sa gorge était serrée, comme si une épée la traversait. La solitude l'avait plongée dans les abysses, un trou noir où elle se retrouvait seule avec ses propres démons ... Elle hurla en martelant le sol de ses poings, impuissante.
Arriverait-elle à s'en sortir ?
Qui avait-elle à présent ? Plus personne ne la soutenait. Elle avait tué ou rejeté chacun de ses amis. La
solitude l'envahissait. D'un coup, un scalpel était dans sa main droite, sans qu'elle ne sache comment il était arrivé là. Il visait ses veines de l'avant-bras. En était-on arrivé là ? La grande Eisenin, au bord du suicide pour quelques paroles lancées par un vieil ami ? Comment pouvait-elle avoir été mise à genoux par de simples paroles, alors qu'elle avait combattu des centaines de ninja ? Etait-ce ce qu'elle valait à présent ?
La lame se posa contre la peau. Elle était légèrement froide, presque douce. L'acier semblait l'attirer, l'hypnotiser comme lors d'une anesthésie générale. Le geste semblait simple, rapide. Elle n'avait qu'à appuyer un peu et tout était finis. La douleur qu'elle ressentait sans cesse allait s'envoler. Aussi simplement que ça.
Une voix semblait lui murmurer de le faire. Et cette voix, elle la reconnu dans un sursaut : Enoshima. Refermant son poing sur le manche du scalpel, tout son corps se raidit. Ce démon était la cause de tout ces soucis. C'était lui le responsable, lui qui lui avait murmurer à l'oreille ... Levant ses yeux aux ciels elle promis en murmurant :
« Je ne mourrais pas tant que je n'ai pas détruit cette chose. »