Épisode amnésique

Tu avais donc échoué, pour une énième fois à maintenir ton ennemi dans sa camisole psychique. Mais ce qui était une première, était le fait que celui-ci venait de s'en prendre à ton ami. Le seul être cher que tu possédais, lui, avait tenté de le tuer. Sur ton visage, se lisait le désarroi qui t'habitait. Tu étais à bout de force. À bout de forces de lutter contre toi-même. Est-ce que ton existence avait encore une raison d'être ? Tu avais passé la quasi-totalité de ta vie enfermée dans un manoir qui tombait doucement en ruine, et ce, pour éviter un drame... Qui finalement, à failli avoir lieu au sein même de ce manoir... Quelle triste ironie...



Tu voyais cette cohabitation comme un combat de longue haleine. Cependant, tu perdais régulièrement des batailles et son territoire s’agrandissait contre ton gré. Tu tentais de rester vigilant au signe précurseur de son apparition, mais visiblement, cela ne se montrait plus suffisant...



Tu réfléchissais à sa proposition. Tu avais constamment refusé de quitter ton manoir, par la crainte du débordement. Peur de reprendre connaissance avec le sang d'autrui sur les mains. Cela était déjà arrivé une fois, et alors, tu t'étais promis de ne plus jamais laisser un tel drame se reproduire... Cependant, étais-tu seulement capable de tenir une telle promesse avec le monstre qui vivait en toi... Peut-être finalement que Genji avait raison... Ce que ce monstre désirait était simple... La liberté ! Alors, tu te mis à espérer profondément qu'en acceptant de quitter cette bâtisse en ruine, cela apaiserait ton ennemi et peut-être terminerait tu tes vieux jours en paix... Pour autant, tu croyais en cela qu'a moitié.



Ton air devint plus sinistre...

Pour une fois que Genji n'usait pas d'un ton sarcastique et qu'il se montrait sincère dans ses mots. Il hésitait intérieurement à déposer une main amicale sur l'épaule de son camarade, mais il se souvenait que ce dernier n'aimait pas le contacte physique et ce, peu importe la forme.

Il se retint de son geste en écoutant Kodoku le remercier d'être à ses côtés, puis lui demandait la faveur d'un air grave de l'éliminer si le Gaikotsu ne pouvait plus contenir son camarade... Soupirant longuement, il ne pouvait refuser la demande de son ami. Il savait très bien que ce n'était pas la solution qu'il préférait, mais hélas il n'avait pas d'autre choix, pour le moment.




Au moins, il avait gagné cette première bataille, celle de faire sortir cet homme hors de ces murs. Un long combat de dix ans qui finissait par payer. Maintenant, il gardait espoir de pouvoir un jour soigner le Minashigo, mais cela restait encore à voir...

Tu observais ton ami de ton regard triste. Un regard qu'il avait déjà vu bien trop souvent. Tu ne comprenais pas réellement la raison pour laquelle Genji continuait à venir te voir ici. Une promesse. Il t'avait fait une promesse. C'était honorable de sa part que de la tenir, puisqu'il aurait tout aussi bien pu t'abandonner et tout en aurait été terminé ici.

Tu observais sa main hésitante à venir au contact avec toi. Ton regard se figea quelques instants, tu craignais que celui-ci ne te touche. Tu avais pour horreur les contacts physiques pour la simple raison que tu craignais que cela ne réveille la bête qui somnolait en toi. Mais heureusement, Genji n'en fit rien, conscient que ne n'appréciait nullement ce geste, bien que se cachait derrière cela qu'un signe affectif. Cette saloperie d'ennemi intérieur t'avait bouffé jusqu'au entrailles, te privant même du contact charnel...



Bien que tes paroles étaient des remerciements des plus sincères, ton expression, elle, paraissait peu enjoué. Quel paradoxe existait entre le fait que tu te devais de remercier ton ami pour accepter de t'ôter la vie ? Un sarcasme des plus amusants...

Alors, Genji annonça votre départ. Tu allais quitter ton manoir. Chose que tu n'avais pas faite depuis des dizaines d'années. Tu suais à grosse goutte, mélange d'excitation et de peur. Qu'allait-il arriver de toi ? Toi qui n'avais plus connu le monde extérieur et ses plaisirs... Allais-tu réussir à contenir la bête qui vivait en toi ? Tu l'espérais...



Bien que tu tentais de te montrer serein, ta voix quelque peu tremblante te trahissait... Tu avais peur...

Que pouvait bien trouver Genji comme solution pour que son camarade puisse avoir la chance de s'épanouir ? De nature docile, la bête l'habitant ne demandait que la guerre et le sang...


Si déjà Genji l'emmenait dans le monde extérieur il se doit bien d'au moins satisfaire ses désirs enfouis depuis de nombreuses années. Il n'était pas dupe et voyait bien que le changement risquait d'être beaucoup trop radicale pour le Minashigo. Le tout, c'est de ne pas le brutaliser et de le laisser seul en "liberté". Une liberté où le Gaikotsu sera sa chaine pour limiter la casse en cas de coup bas de la part du monstre...

Les plaines étaient votre point de départ et resteraient votre enclos dans un premier temps. Cela te rassurait. Tu appréciais l'idée qu'en cas de dérapage de la part de ton ennemie, tu ne te trouverais pas trop éloigné de ton manoir, prêt à t'enfermer à nouveau pour une vie solitaire. Cette solution te semblait la plus convenable, à tel point, qu'un léger sourire se dessinait sur ton visage ridé et marqué par des cicatrices.



Ton ami te questionna sur ce que tu désirais. Plus précisément, sur ce que tu désirais voir. Tu ne pus répondre de but en blanc. Tu ne t'étais jamais permis d'imaginer une telle chose, pensant que tu ne découvrirais jamais le monde extérieur. Prisonnier à vie au sein de ta propre maison et ce, afin de rendre service à la population générale.

Après quelques instants de réflexion, un de tes rares sourires habita ton visage, tu étais prêt à lui répondre.