La fin d'une quête

Tout ce charabia paraissait insoutenable pour Makoto. Elle ne comprenait plus rien, mais elle le sentait partir à petit feu... Elle devait convaincre l'autre macaque pour perpétuer le pouvoir de son seigneur des ténèbres ? Impossible. C'était bien la première fois que son Prince lui demandait l'impossible. Elle savait que c'était perdu d'avance et qu'il rechignait à vouloir le sauver.




La voilà qui déversait ses larmes. Triste. Et en colère de voir que cet homme est aussi égoïste.


La Kenketsu se voyait perdue, sans plus aucun repère et sentant l'énergie de son bien aimé disparaitre lentement dans ses bras... Elle n'avait même pas la volonté de fusiller le Gaikotsu du regard. Elle se contentait de ses derniers moments avec l'homme qu'elle aimait. C'était tout ce qui lui restait.

La colère venait se mélanger à sa tristesse. Non seulement, il perdait son ami, mais il devait changer sa dernière résolution. Il avait suivi cette sangsue dans l'idée de mettre fin au Prince. Et voilà que Rei lui demandait de l'aider. C'était forcément une vaste blague. Il attrapa alors cette maudite dague. Il n'avait qu'à la jeter pour mettre fin à tout cela, mettre fin à cette mascarade. Pourtant, il ne s'y résolut pas.

Les mots sanguinolents firent étrangement écho à ceux d'Usagi. Lui aussi l'avait encouragé à changer les Kenketsu. Qu'avait-il fait durant toutes ces années ? Avait-il trouvé un seul Kenketsu qui valait la peine d'être sauvée ? Pas vraiment. Pourtant, Rei pensait aussi qu'il devait le faire. Avait-il les épaules assez larges pour cela ?


Faire confiance une nouvelle fois ? C'était peut-être encore une erreur de croire Rei. Peut-être que le Prince avait manigancé ça de toute pièce. Si c'était le cas, peut-être serait-il libéré de ce destin qui se joue de lui depuis bien trop longtemps. Prenant une longue inspiration, la lame pénétra sa chair...

Il était impossible de réellement connaître la personne à l'origine de cette réponse, mais les deux êtres semblaient accepter ce funeste sort. Au cœur de ce lac mystique, en un lieu que seuls quelques élus avaient pu découvrir au fil des siècles, gisait cette crypte étrange et sombre, un endroit où le temps semblait s'écouler à un rythme différent. Cette crypte, un sanctuaire de secrets et de désespoir, était la dernière demeure du Kenketsu, condamné à une existence immortelle.

La crypte était un mausolée insondable, généralement perdu dans les profondeurs insondables du lac. Ses murs étaient taillés dans une pierre noire et humide, recouverte de lichen. Les chandelles éternellement allumées qui éclairaient les coins sombres de la crypte émettaient une lueur sinistre, créant des ombres mouvantes qui semblaient danser aux rythmes des marées.

Les eaux du lac entouraient la crypte, l'isolant du monde extérieur. Mais ce qui rendait cet endroit véritablement unique, c'était le mystère des marées. De manière inexplicable, la crypte disparaissait sous les eaux à chaque marée haute, comme si le lac lui-même cherchait à engloutir les souffrances du Prince. Les marées étaient le reflet de l'éternité du vampire, une métaphore de sa vie sans fin, une existence liée aux cycles de la nature. Chaque fois que la crypte réémergeait des eaux, il espérait se libérer de son existence maudite, mais chaque fois, son espoir était anéanti par le refus des mortels. Cette fois-ci, alors qu'il semblait enfin trouver une fin correcte à sa maigre existence, l'humain semblait le lui refuser. Il l'acceptait.

Proche de Makoto, le Prince commençait à voir les effets de sa mort sur le corps de Makoto... Ses doigts ne tarderaient pas à tomber en poussières...

C'était quoi cette scène ?! Makoto ne comprenait plus rien. La seule chose qui restait dans ce champs de vision n'était autre que les doigts de son bien aimé devenir poussière.



Tandis que le décor se mouvait au rythme de la vie du défunt, la Kenketsu ne bougeait plus, admirant tristement le départ que lui réservait son amant. Une colère noire s'emparait de la jeune femme lorsque le corps se dissout entièrement. Une douleur silencieuse dont seuls les sanglots et sa bouche béante montraient l'intensité de sa peine.

Elle s'effondrait, plus rien n'avait de sens pour la jeune femme désormais. Perdue, triste, seule, coléreuse et souffrante, la voilà qui se mettait à gémir de douleurs, usant d'un vocabulaire familier qui ne souhaitait que la fin de ce monde.

Makoto venait de tout perdre, TOUT. Sans lui elle n'était rien, sans lui la vie ne valait pas la peine d'être vécu...

Un genoux à terre et grimaçant, la douleur envahissait son être tel un brasier consumant tout ce qui l'entoure. Malgré toute la détermination qui lui permit de s'automutiler, elle n'était rien en comparaison de la décharge qui le parcourait. D'autant plus que son esprit souffrait tout autant.

Alors que son propre sang encore chaud se mêlait à l'eau froide du marais qui pénétrait la crypte ainsi qu'à ses propres larmes, l'albinos ne put détacher les yeux de cette triste scène. Tandis que Makoto voyait son cher Prince disparaître devant ces yeux, lui ne voyait que Rei s'éteindre de la même manière.

Alors que le silence du lieu était perturbé par la peine et la rage de Makoto, le Gaikotsu resserra sa poigne sur le pommeau de l'arme, comprenant trop bien ce qu'elle vivait. Ce sentiment de tout perdre. Dohko, Usagi, Genichi, Soshi et maintenant Rei... Tant de proches qu'il ne pourrait plus jamais revoir. Certains n'étaient plus, d'autres le condamnant à encore plus de souffrance si leurs chemins se croisaient de nouveau.

Dans les ténèbres du lieu, il serait si aisé de disparaître. Il avait l'occasion d'abandonner une nouvelle fois. Disparaître dans ce lieu de mort était si simple maintenant. Il lui suffisait de déplacer quelque peu cette lame.


De nouveau, sa volonté vacillait. Tout pouvait si facilement prendre fin.

Le savoir... Une forme immatérielle indélicate et irraisonnable de la vie. Il n'était pas possible de réellement admettre l'existence de ce dernier. Il était là sans être là, il se transmettait sans exister. Le savoir n'était qu'un mythe, une fantaisie humaine et une démonstration imperturbable de la volonté d'exister en tant qu'être unique. De nombreux individus imaginent que récupérer une énorme quantité d'expérience permettait de gagner en sagesse, en force ou en capacités diverses et variées... C'était faux. Le savoir était intangible et inexistant. Il ne se consultait pas comme on pouvait le faire avec un livre. Il n'était pas une chose qui pouvait se comprendre.

Rei n'était plus et l'éternel Prince Kenketsu n'existait plus. Quasi instinctivement, l'ancien singe comprendrait qu'il était nécessaire de sortir rapidement et de laisser la crypte dans cet état. Il ne le savait pas, c'était comme cette impression d'avoir vécu ce moment par le passé. Comme si son cerveau s'ouvrait à une vision inédite. Le visage de la belle se mit à craqueler. Elle aussi, elle ne tarderait pas à comprendre que le savoir n'était pas quelque chose d'aussi simple à admettre, car il ne suffisait pas dire "Je le sais, il me l'a dit". Non, Kitai allait devoir réfléchir un peu plus... Il allait devoir comprendre et trouver sa voie.

Il était le seul à pouvoir ramener des disparus, il était le seul à pouvoir lier les faibles face aux forts et il était surtout le seul à être maître de son Destin dorénavant...

Alors que l'esprit du singe se vidait peu à peu, à l'image de sa détermination à vivre, il observait cet endroit. Cette crypte lui apparaissait étrangement plus familière qu'auparavant, sans qu'il n'y ait de véritable raison. Il n'avait jamais foulé ce sol jusqu'à présent. À ce mystère, une autre pensée s'éveilla en lui. Pas de Red ni de Saru cette fois, le lieu lui disait de partir. Les deux n'avaient pas leur place en ce lieu. Composant quelques mudras, il retira d'un geste le poignard encore planté dans sa chair et plaqua son autre main sur la plaie. Solidifiant son propre sang afin de fermer la plaie. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas usé de cette technique.

La quiétude du lieu toujours perturbée par la peine de la jeune femme. Il ne s'attarda pas à observer son état physique. Il savait. Son corps était le reflet de la disparition du Prince. Un phénomène qui aurait dû avoir lieu il y a quelques années déjà.



Le poignard précédemment atterri devant la jeune femme en pleurs. La lame était encore rougie par le sang du singe, se diluant peu à peu dans l'humidité du sol. L'eau ne tarderait pas à reprendre ses droits.



Kitaï s'était déjà déplacé en direction de la sortie. Sa voix était calme et il n'avait nullement baissé sa garde, s'attendant à ce qu'elle tente sa vie sous le coup de l'émotion.



Ce nom s'était affiché comme une évidence dans son esprit. Si la jeune femme prenait cette option, il devrait lui transmettre le présent d'Usagi. Autrement, seule la mort l'attendait.

Le prince est mort... Le prince n'est plus. Le prince n'est que poussière. Le prince ne sera plus jamais là. Le prince a abandonné Makoto. LE PRINCE A DELAISSE MAKOTO. Est-ce la faute du prince ? Est-ce la faute de Makoto ? Non... NON. NON NON NON NON NON NON !


La Kenketsu était rongée par son chagrin d'amour, alors que tout se bougeait autour du duo qui restait désormais. Disparaitre, se venger ou honorer la mémoire d'un être cher ? Qu'elle était la meilleure option ? Makoto était incapable de réfléchir, sa tête lui faisait mal et son coeur tambourinait à lui déchirer la poitrine !


Son instinct fut plus fort qu'elle et elle s'élançait sans réfléchir sur le singe le kunai en main. Elle ne se contrôlait plus, le chagrin submergeant sa raison. Elle n'était plus rien sans le prince, le prince lui manquait déjà terriblement... Elle savait pertinemment qu'elle ne le verrait plus jamais !

Avançant d'un pas calme, le singe avait tous ses sens en éveil. Une sensation étrange que son esprit avait du mal à comprendre. C'était comme si de nombreuses réflexions qu'il aurait pu se poser s'accumulaient. Ainsi, quand bien même Makoto n'avait pas encore réagi, il était certain de sa réponse. Il ne connaissait cette vampire que depuis une journée à peine, mais des éléments la concernant lui venaient à l'esprit. La façon dont elle parlait du Prince, dont elle le regardait. Tout cela lui indiquait qu'elle ne pourrait le laisser partir simplement. La rage sourde qu'il avait éprouvée lorsqu'il pensait que Rei était blessé, voire mort, à cause de ce "Minashigo". Bien que les Kenketsu ne soient vus que comme des monstres assoiffés de sang par les Gaikotsu, ils restaient néanmoins des êtres sensibles pouvant facilement se laisser aveugler par leurs émotions. Il lui fit alors face.



La colère l'aveuglait visiblement et les mouvements de Makoto trahissaient son envie de meurtre. Il n'y avait rien d'élaboré, et même s'il n'avait plus vraiment l'envie de vivre, il ne souhaitait pas mourir tout de suite. La mort signifiait refuser les dernières paroles de Rei. S'il la laissait le tuer, elle mettrait fin à la volonté de son être aimé. Restant sur la défensive, le singe chercha à frapper le poignet armé afin de libérer une décharge électrique dans le but de la désarmer.



Le Prince avait-il confiance en Kitaï ? Nullement. Son choix s'était probablement résolu par dépit et un manque d'options flagrant. Pour autant, il avait une vague idée de ce qu'il attendait de sa propre mort.



Il ne laissa passer aucune émotion dans sa voix. Ces dernières semblaient encore anesthésiées par le chagrin qui le rongerait pendant encore un moment.



Pourquoi lui laissait-il une dernière chance ? Le temps était un adversaire intraitable, et il ne pouvait laisser le moindre avantage à ce dernier. Malheureusement, il ne pouvait pas jeter le moindre atout aussi stupidement.

L'assaut de Makoto avait échoué. La douleur qu'elle pouvait ressentir au poignet n'était rien comparé à la déchirure du peu d'amour qu'elle pouvait encore éprouver. Elle ne chercha pas à rétorquer une attaque de plus, bien trop dévastée et déboussolée pour vouloir réellement attenter à la vie du singe.


Elle se contrefichait bien de la blessure à son poignet, ne s'apitoyant que sur son propre sort... Elle était là, les genoux au sol, les bras las et le visage déformée et rongée par l'immense tristesse de la disparition de son Prince. La vampire avait réellement perdue tout ses moyens. Elle n'était pas en état de répondre à l'homme face à elle.

Elle ne bougea plus et ne cessa de pleurer pour exprimer sa grande douleur. Son amour de toujours, celui qu'elle a mis tant d'années à retrouver, celui avec qui elle a partagé qu'une seule année de sa vie avec lui, pour au final accomplir sa volonté et le perdre... Quelle raison avait-elle pour vouloir continuer de vivre maintenant ?


Son subconscient parlait pour elle. Son désir profond à cet instant n'était autre que de vouloir rejoindre celui qu'elle aime et sans qui sa vie n'a plus aucun sens.

Les actes on des conséquence est le singe en voyait un sous ces yeux. Sa quête d'extermination du Prince provoquer la tristesse chez un autres. Ainsi était la vie. Les choix on toujours des connaissance et la culpabilité qu'il ressentait n'y changerais rien. La vie continuais et il devait avancer. Le temps n'est jamais un allié.


Il tourna définitivement le dos à Makoto. Alors que le chagrin emplissait son cœur, ce lui ne tarderait pas à disparaitre sous les eux. Si la noyade ne l'envoyait pas rejoindre l'éternelle, sa disparition ce chargerait du reste. Cela aussi, le singe le savait avec une certitude insoupçonné. Les Kenketsu allait tous disparaitre. Tel une prophétie gravé dans le marbre, les informations apparaissait tel une malédiction dans son esprit. Un présent combiné de Rei et du Prince dont la raison lui échappé.

Une fois à l'extérieur, il observa son masque puis le ciel. Que faire à présent? Ces dernière année avait tourné autour de l'élimination du Prince. Rei était mort. Il n'avait aucune piste quand à Nasana. Même s'il la retrouver, Genichi n'était certainement plus de ce monde à ce moment. Yogi le suivrait à coup sur. Ce gamin était totalement perdu.


Libre de laissait tout les vampires disparaitre, de laisser cette femme atteindre son but. Il soupiras. L'aide de Makoto n'aurait pas était superflu, mais la convaincre était une cause perdu. Si jamais elle souhaitait vivre, elle n'aurait d'autre choix que de le trouver. S'éloignant de la crypte, cette dernière semblait dévoré par les eau de Taki. Emportant les dernier instant du Prince dans l'oubli.