La petite Kuromoku s’approcha doucement du Kirishitan, ses pas à peine audibles sur le sol humide. Une odeur âcre de mousse et de pourriture flottait autour d’elle, comme un voile qu’elle traînait partout où elle allait. Sa main, rongée par les champignons qui, depuis des années, avaient lentement transformé sa peau en une écorce vivante, se leva avec lenteur. Elle posa cette main étrange, presque végétale, sur l’épaule de Tomohiko, avec une douceur inattendue, presque maternelle.
« N'ai crainte mon enfant... »
« Ce n'est pas la mort qui t'attend... »
Alors que les racines se refermaient lentement, telles des doigts de bois noueux en prière silencieuse, Gadendiraito sentit la terre vibrer sous elle. Le sol frémissait à présent d’un rythme inquiétant, quelque chose d'inquiétant approchait. Gadendiraito ne bougea pas. Les racines poursuivaient leur étreinte, protectrices ou funéraires, cela dépendait du point de vue. Tout autour d'elle, la forêt retenait son souffle. Ce n’était pas la mort, non. C’était autre chose. Quelque chose de plus vaste. De plus ancien.
« Viens, il est temps pour toi de nous rejoindre... »
Du haut de son mètre cinquante, la petite femme attrapa le jeune garçon avec une délicatesse presque irréelle. Ses bras frêles, recouverts de mousse et de cicatrices anciennes, l’enveloppèrent dans une étreinte lente et silencieuse. À mesure que ses bras se refermaient sur lui, des lianes surgirent du sol, serpentant le long de ses jambes, de son torse, jusqu’à ses épaules. Elles grimpaient avec une fluidité organique, comme si elles savaient exactement où se poser. Leur texture était tiède, presque vivante, dégageant une odeur de terre mouillée et de feuilles en décomposition.
Le rituel avait commencé.
Bientôt, les lianes formeraient un cocon végétal, un berceau tissé de sève et de silence. Ce n’était pas un emprisonnement. C’était une offrande. Une lente fusion. Dans l’idéal, si les esprits acceptaient, l’âme du garçon serait absorbée, transmise, diluée dans les fibres du vivant. Il deviendrait mémoire. Racine. Un écho du passé, tissé à nouveau dans le fil du présent. La petite femme murmurait maintenant des mots oubliés, une langue que seul le sol et les cieux semblaient comprendre.