Le temps était comme suspendu, les secondes s'étiraient pour devenir des minutes. Ce sentiment s'ancra alors dans la chair de la Miwaku, provoquant diverses secousses. Tout le corps de Kagero tremblait d'impuissance. Enchaînée par ses doutes, la Geisha se retrouvait en plein dilemme. Arrêter ces brigands était aisé. Néanmoins, les chances de parvenir à ce résultat, tout en protégeant ses proches, étaient limitées. Encore une fois, la kunoichi se mit à maudire sa faiblesse. Pourtant, comme pour défier cette répétition malsaine, la brune serra ses poids et s'apprêta à engager les hostilités.
C'est alors que des créatures faites d'eau fauchèrent les criminels les plus frêles. Instinctivement, la guerrière dirigea son regard vers l'origine de ces jutsu. Il s'agissait de Soshi. La joie put se lire sur le visage de la mère au cœur tendre. Son sourire franc et radieux agissait tel un phare dans l'obscurité. Cependant, en observant le comportement félin de cette jeune femme, Kagero vit germer en elle de l'inquiétude. Cette puissance et cette insensibilité étaient des armes dangereuses. Cruelles même, si on ose imaginer les sacrifices qu'elles demandent. Durant le même temps, la rixe nocturne s'acheva, l'ancienne Kaya ayant mis à terre le dernier assaillant.
Saisissant la main salvatrice, la quarantenaire hocha de la tête en direction des deux autres Miwaku.
« Kyoko, Kaede, je vous présente Soshi. »
« Ces yeux... Ce vert émeraude... Mon fils possédait les mêmes iris, je les reconnais. Ma tendre enfant, que ton chemin fut long pour revenir parmi nous. Je suis tellement heureuse de te retrouver. Et comme le dirait si bien ton père : ma petite fleur, je suis fier de toi. »
La grand-mère avançait lentement, aidée par sa canne. Voutée et fatiguée, elle contemplait sa descendance avec bienveillance. Lorsque l'ancienne cita Shun, elle caressa doucement la joue de Soshi, maintenant à sa portée.
« Je vois... Tes pupilles ont peut-être la teinte que celles de ton père, mais leur éclat provient, sans aucun doute, de ta mère. J'espère que tu n'as pas hérité de son sale caractère ! »
Et tandis que la vieille Miwaku se perdait dans un long rire solitaire, une petite silhouette se faufila parmi les adultes. L'enfant s'empressa alors d'interpeller la sauveuse.
« Sœurette ! Tu es vraiment trop forte ! Tu m'apprendras à voler ? Et à dompter des requins volants ? J'espère que tu aimes le poisson ! Avec grand-mère, on en a acheté plein pour ton arrivée à la maison ! D'ailleurs, on a pris plein de choses ! Des fruits, des sucreries, des légumes... C'est même moi qui ait choisi le menu de ce soir ! Je vais même aider à la cuisine, Maman me l'a promis ! »
Comme pour venir au secours de la nouvelle venue, Kagero posa sa main sur l'épaule de Kyoko et lui intima gentiment de se calmer.
« Kyoko... Laisse Soshi respirer un peu, tu veux bien ? Vous aurez tout le temps de discuter plus tard, ne t'inquiète pas. »