Bon, c’était dommage pour le vouvoiement, mais on y peut rien. Puis j’ai l’air d’être beaucoup plus vieux qu’elle après tout. Elle aborda la question de ma famille, chose que je souhaitais ne répondre qu’à moitié, étant donné que les questions sur mon père pourraient lever encore plus d’interrogations. Et je voulais faire profil bas dans une ville sans ninja. Il fallait ruser.
« Oh, et bien… Je viens d’un petit hameau perdu dans l’empire de Kumo. Enfin, c’est encore tout récent le fait qu’on y soit, mais ça n’a pas vraiment changé grand-chose à nos vies. Il y a peu de chance que tu connaisses l’endroit. »
Je jouais avec mes baguettes dans les mains, essayant de trouver une réponse appropriée. Autant lui dire que je ne souhaite pas lui parler de mon père. Comme ça, je n’aurais pas à mentir !
« Ma mère y habite depuis sa naissance. Elle n’a eu que moi, je suis fils unique. C’est bien dommage, d’ailleurs. J’aurais bien voulu avoir des petits frères ou sœurs, même si je m’occupais des enfants du village pour soulager les parents. Et quant à… »
Heureusement, coup de chance pour moi, car le serveur arrivait avec nos commandes. L’odeur, tout comme l’apparence, était alléchante. Je commencerais par la soupe, pour m’ouvrir l’appétit et éviter d’aborder directement les plats lourds sur l’estomac. Le bol de soupe de Shõnin semblait délicieux aussi. Je m’en commanderais sans doute un la prochaine fois que je passerais ici. Peut-être demain midi, même si je devrais acheter en gros au marché pour me faire mes propres plats. C’est beaucoup plus économique.
« Merci beaucoup. Bon appétit ! »
J’imitais sa prière, remerciant qui qu’il soit en haut de nous avoir prodigué cette nourriture. Je n’avais pas l’habitude de prier activement, mais j’imagine qu’il doit y avoir quelqu’un au ciel pour nous. Du moins, ma maman me l’a dit. Et l’occasion s’y donnait bien.
« Hmmmm ! C’est succulent ! Bien meilleur que ce que proposait l’auberge d’où je viens. Il faudra que j’aille féliciter le cuisinier après ça. Et lui demander des conseils aussi ! »
La soupe était habilement assaisonnée, les légumes se laissant la place l’un l’autre pour donner un goût subtil. Le tofu, bien ferme, dégageait un arôme qu’on ne trouvait pas dans les cuisines de mon village. C’était donc ça, des ingrédients de qualité. Je finissais ma cuillerée avant de continuer la conversation.
« Sans être indiscret, tu comptes rester combien de temps à Tekunoroji ? Pour ma part, je compte y rester quelques semaines, voir un mois ou deux. La neige rends tout les voyages trop pénibles., j'attends que le printemps arrive. »