Les minutes défilaient une à une mais Sakkaku ne revenait pas. Emi soupira. Bien qu’elle n’ait aucune affection à son égard, il restait son frère. Il s’était encore sûrement fourré dans une histoire louche, rien d’inhabituel en somme. Mais son comportement allait finir par lui coûter la vie. Bien qu’encore jeune, la Kaguya n’était pas stupide. Personne à l’exception de Sakkaku ne faisait des allers retours en pleine nuit à la maison, autant dire qu’il n’était pas le plus discret. Sans compter l’argent qu’il possédait sans jamais partir en mission… Il fallait être aveugle pour ne pas s’en rendre compte. Même leur paternel le savait sûrement, cela faisait sans doute partis des raisons pour lesquelles il le méprisait plus que les autres. Emi se redressa finalement, elle en avait marre d’attendre. L’homme qu’elle avait assommé était toujours inconscient, probablement pour un long moment encore.
Elle hésita un instant entre laisser son frère se débrouiller, ou tenter d’aller l’aider au risque de s’attirer encore plus de soucis… Elle soupira à nouveau, foutu lien familial. Elle se dirigea alors vers la maison à laquelle elle avait précédemment frappé. Mais cette fois elle fit le tour et remarqua qu’il y avait une petite cour derrière le logement. Elle grimpa le muret, et c’est là qu’elle vit Sakkaku. Ce minable était au sol, le visage ensanglanté. Quoiqu’il est tenté, cela avait échoué. La jeune Kaguya s’infiltra donc dans la cour, les hommes qui l’avaient mis dans cet état étaient rentrés, laissant l’occasion à Emi de s’approcher du corps bien amoché de son frère.
« Tss… Je te jure, c’est la dernière fois que je te donne un coup de main. »
Il était encore à moitié conscient, et avait bien du entendre ce que sa « sauveuse » du jour venait de lui dire. Quelle fierté pour la famille que de voir la gamine traîner son frère dans les rues de Kiri. Elle n’avait pas le choix, elle ne pouvait pas le porter, tant pis pour la dignité de Sakkaku. Elle fit la route jusqu’à chez eux, où bien entendu, leur père les attendait de pied ferme, il était déjà au courant.
Dit-il alors qu’il se tenait là les bras croisés. Emi savait déjà pertinemment qu’aucune réponse ne lui conviendrait. Alors, en sœur exemplaire, elle rejeta directement la faute sur son aîné.
« Vous le lui demanderez lorsqu’il sera en état de parler ! Je ne veux rien avoir à faire là-dedans ! »
Emi voulut alors saisir cette opportunité pour repartir et aller vaquer à ses occupations… mais ce n’était pas au goût de son père que de se laisser parler de la sorte. Bien que pour une fois, elle fut chanceuse.
« C’est un peu tard pour ça…
Où vas-tu ? Il est bientôt l’heure du repas. Va-t-on encore une fois devoir se contenter de ton siège vide ? »
Il était plus… Calme que d’habitude. Peut-être en avait-il assez de constamment devoir inculquer la « discipline » à ses enfants. Ou alors ne jugeait-il pas Emi responsable pour une fois, elle qui servait pourtant facilement de bouc émissaire. Comme s’il lui fallait une raison pour s’énerver de toute façon… La main sur la poignée de porte, Emi répondit alors avec une légère hésitation :
« Je… J’avais prévenu mère que… »
« Ne te justifie pas, cela risquerait simplement de me faire changer d’avis. Si ta famille ne t’importe que si peu, va-t-en. Nous ne serons que mieux en ton absence. »
Des mots durs, surtout envers une gamine de son âge. Mais c’était pourtant là sa meilleure humeur. Emi resta figée un instant, elle avait du mal à croire qu’elle avait obtenue « l’autorisation » de sortir et plus important, manquer le repas et tout ce qui tournait autour…