Bien qu'éphémère en réalité, l'attente fût longue. Elle parût interminable. Luttant contre mon corps et mon esprit tourmenté je passe par tous les stades, témoignages d'un sevrage violent bien qu'involontaire. A ce stade pour moi, les secondes paraissent des minutes et les minutes sont des heures. Des heures qui m'emprisonnent sans merci dans une remise en question intestine et introspective. Je me mens à moi même, ne voulant regarder la vérité en face je tâche de rester fier et digne dans ce combat contre ma dépendance qui est devenue pour moi une amie, un visage familier au coeur de cette tempête nauséabonde qui inonde mon âme.
Mes mains tremblent, mon coeur parait s'extirper de ma cage thoracique. Chaque battement résonne en moi comme le glas d'une fin inéluctable qui sommeille en mon for intérieur depuis tant d'année déjà. Et soudain, au coeur de ce raz de marrée, tout s'arrête. Il est là, mon sauveur, mon héros, celui qui pourra m'apporter ce don j'ai besoin, il va me rendre mon amie, mon alliée, celle qui m'aide et me soutient et croit en moi. Mon champ de vision presque aveugle, j'entend sa voix, qui vient percer le silencieux vacarme qui inonde mon âme.
C'est le coeur haletant que je me retourne, dans une gestuelle peu assurée, à l'image de mon état mental.
« Oui c'est bien moi pour le ... »
Dans un dernier élan de conscience, mon corps s'arrête. A ce moment là je sais que mon esprit à compris. Cet homme, ce sauveur, ce héros. Ca ne peut pas être lui. Le garçon qui se tient en face de moi ne correspond pas à la description que m'avait fait mon contact. J'attend un homme sombre, dont le corps terrassé par la vie témoigne des stigmates d'années de souffrance. Pourtant je me trouve face à un petit garçon, frêle et menu, à la chevelure grisonnante. D'un geste hasardeux, je rabat plus encore ma capuche sur mes yeux, tentant vainement de dissimuler mon visage.
« Mon patron ne veut pas que vous restiez ici, vous faites fuir la clientèle. »
Je n'ai pas le temps d'assimiler toutes les informations, qui est-il ? Son patron ? La clientèle ? Mon esprit se focalise sur une seule donnée essentielle. Ce n'est pas l'homme que je cherche.
« Ecoute gamin, j'ai pas vraiment le temps de jouer avec toi, j'attend un ami »
Ma main se pose sur son crâne, le tapote légèrement le haut du front. Je tente malgré tout de lui adresser un regard amical pour le rassurer et l'inciter à déguerpir rapidement. Si l'homme que je t'attend m'aperçoit avec un étranger, cela pourrait poser problème pour la transaction. Peut-être même qu'il nous a déjà vu et qu'il est déjà parti. Ou bien pense-t-il que je lui ai tendu un piège ? Mon esprit s'enflamme, submergé par un typhon de question toutes plus irrationnelles les unes que les autres. Une paranoïa latente s'installe et déchire mon âme. Je sue, j'ai chaud, j'ai froid, j'ai peur.
« Allé, du balais maintenant ! »