Finalement, la demoiselle l’avait laissé faire. Elle n’avait pas cherché à se défaire de son étreinte, à s’échapper de la demande désespérée de soutiens que le jeune garçon ne savait pas exprimer. Les mots ne lui venaient pas, les gestes non plus. Il n’était plus véritablement capable d’agir correctement, les conventions sociales, la pudeur, la timidité, la peur du rejet. Il ne restait rien de tout cela au moment ou Kotaro avait pris Kanashisa contre lui. Ce n’était que la plus pure expression de sa peine, mais aussi le cri le plus désespéré de trouver quelqu’un qui arriverait à penser ses blessures et à comprendre sa peine. Ou simplement même, au-delà de comprendre sa peine, de l’écouter. Il ne demandait pas grand chose, mais se l’était toujours refusé par peur de blesser les gens plus qu’il n’était blessé lui-même. Qui aurait bien pu l’écouter de toute façon ? Haneko était bien trop jeune et jamais il n’aurait osé lui faire cela. Mei ? Faire ça à sa propre mère ? Impossible, s’il y avait bien une personne qui souffrirait d’une telle scène, c’était bien elle et plutôt mourir que de faire pleurer sa mère. Hikaru ? Il était un homme, et même s’ils étaient proches au point de se dire leurs secrets les plus inavouables, il gardait une certaine virilité et ego masculin sûrement mal placer, mais il était pour lui hors de question de craquer de la sorte devant lui. Alors qui restait-il finalement ? Kanashisa. Elle, elle était là pour lui. Il ne se connaissait pas depuis longtemps, mais il avait une connexion avec elle, quelques choses d’étrangement familier. Le sentiment de solitude peut-être ? Celui d’être différent. Kanashisa était une outcast, la fille bizarre qui parle aux fantômes, dont la maison est hantée, qui n’a plus de parent, qui est trop grande, trop mince, trop… Bizarre. Kotaro qui lui était trop bronzé, trop sunajin, trop bâtard, trop efféminé, trop… Différent. Mais cette étreinte ne pouvait évidemment pas durée. Kanashisa se défit de l’enlaçade désespéré du jeune homme, le regardant tristement.
Elle s’excusait de lui faire du mal ? Ce n’était pas elle qui lui faisait du mal. Certes, à cet instant présent, c’était ce qu’elle incarnait. Elle permettait à cette douleur de s’exprimer, elle avait réveiller ce douloureux souvenir de son père. C’était difficile pour lui de l’assumer, mais il était le seul fautif de cette douleur. Il n’avait pas cherché vraiment à s’en séparer et n’avait même jamais pensé que cela pourrait se faire. Elle culpabilisait pour quelque chose dont elle n’était pas responsable et ça Kotaro le savait, il le sentait, il le voyait. Mais alors qu’elle prenait sa main, Kotaro la regardait doucement, les yeux encore pleins de larmes qui semblait ne jamais pouvoir s’épuiser. Elle commençait alors à lui livrer les paroles de son défunt père. Tout cela semblait si… surréaliste. Impossible. Comment pouvait-elle savoir ? Elle parlait aux morts ? C’était inconcevable. Mais la douleur qu’il ressentait, il voulait s’en débarrasser. Il voulait y croire de tout son cœur que cela était possible. Les mots qu’il entendait le blesser encore plus, à chaque compliment, à chaque phrase. Les mots qu’il avait toujours rêvé d’entendre de la part de son père absent, les mots qu’il avait toujours espérait recevoir. Il était fier de lui. Il lui demandait de prendre soin de sa mère et de sa sœur, mais surtout, ce furent ses derniers mots qui mirent un coup de grâce au jeune garçon. Malgré leur absence de lien de sang… Satoru avait toujours considéré Kotaro comme son propre fils et ces mots-là… Était ceux que tout enfants adopté rêverait d’entendre. Il avait récemment trouvé ses racines avec son père biologique, mais la déception fut si dure qu’il en avait brûlé de rage au sens propre du terme, alors entendre cela… Rien ne pouvait lui faire plus de bien.
« Je… j’ai tellement de choses à lui dire. »
Le garçon essuyait ses larmes qui continuait de revenir encore et encore. Il prit alors une grande respiration pour tenter de se calmer, pour tenter de se concentrer sur ce qu’il voulait lui dire, sur ce qu’il devait lui dire même, tout simplement. Ses pensées étaient confuses et désordonnées, mais il devait en être capable, si Kanashisa ne le trahissait pas… C’était alors bel et bien sa dernière chance de lui dire les choses telles qu’il les ressentait.
« Papa… j’aimerais que tu ne partes jamais et que tu continues de veiller sur nous mais c’est égoïste de te demander ça. L’appel de l’autre monde doit être doux et je veux que tu puisses enfin te reposer après toutes ses années. Tu as été et resteras toujours mon père. Tu ne m’a pas conçu, mais tu as su être là quand d’autre ne l’ont pas été. Tu n’a jamais été forcé de t’occuper de moi, tu l’as fait, car tu l’avais décidé. Tu t’es marié avec ma mère malgré tout ce que l’on disait sur elle, tu en as fait une femme heureuse et une mère pour la seconde fois. Tu as fait d’Haneko et moi des enfants respectueux et brave. Je… Je ne sais pas… Je ne sais pas comment te dire à quel point je suis fière d’être ton fils papa… Savoir que je suis le fils d’un héros de konoha, qui s’est sacrifié pour sauver des vies, celle de ses enfants, mais aussi de ceux qui tentaient de les tuer. Je… »
Les larmes étaient revenues de plus belles et sa voix n’avait cessé de dérailler à cause de l’émotion. Il oublierait certainement des choses. Mais il n’aurait pas de regret, car même s’il n’arrivait pas a tout lui dire, il lui disait déjà plus sur l’instant qu’il n’en avait jamais dit jusqu’à présent. Il ne devait juste pas s’en vouloir et vivre avec cette ultime chance qui lui était offerte.
« Papa, je t’aime… S’il te plaît ne nous oublis pas une fois dans l’autre monde… »