Le suplice d'un vampire

Masaru n'avait pas l'air convaincu par le discours de Kiyomori. Le vampire n'arrivait pas à deviner sa décision du petit matin. Elle devrait attendre. Mais elle n'était guère une personne pressée. Elle avait attendu pendant des années et la patience était certainement devenue sa plus grande alliée. La politesse conduisit Masaru à lui laisser son lit. Un peu gênée, elle s'empressa de répondre :



Prenant un ton quelque peu amusée, Kiyomori quitta la pièce en attendant le réveil de son ami. « A demain ». C'était une expression bien humaine qui la ramenait à de vieux souvenirs. Elle qui n'avait plus connu le jour ni la nuit depuis si longtemps...

La nuit fut courte et agitée et le jour était loin de se lever quand, n'arrivant plus à fermer l’œil, Masaru se leva pour de bon en commença à empaqueter le peu d'affaire dont il disposait. Allant retrouver Kiyomori dans l'autre pièce il se demanda l'espace d'un instant ce qu'elle avait bien pu faire pour s'occuper, il s'imagina un instant la Kenketsu s'émerveiller en redécouvrant les étoiles, les bruits et les senteurs de la nuit. Dès qu'il l'eut retrouvé, il la mis au courant de leur destination.



Au fond, et bien qu'il ne l'avouerait pas, il se sentirait extrêmement déçu si elle décidait de l'abandonner maintenant. Mais il avait bon espoir : si elle ne tenait pas à lui, ne serait-ce qu'un peu, elle n'aurait jamais cherché à l'empêcher de se rendre à Kiri.

Le vampire s'était assurée de ne plus entendre Masaru, avant de se nourrir du second corps, assommé plus tôt par son camarade. Kiyomori s'était promenée dans la bâtisse durant cette nuit-là. Mais sans jamais trop s'éloigner. Les lieux étaient immenses et elle ne voulait pas perdre Masaru. Elle craignait de le voir partir en douce à Kiri dès le petit matin. Elle aimerait pouvoir l'en empêcher. Elle s'était finalement assise en tailleur sur un rochet près du marais. C'est là qu'elle avait attendu le réveil de Masaru. Elle redécouvrait le vent qui glisse sur la peau, les étoiles qui parsèment le ciel. Elle devenait d'un coup très nostalgique. Elle reprenait peu à peu goût à la vie.

Le jour n'était pas encore levé lorsque Masaru vint à elle.



La question était plutôt simple : Masaru avait-il l'intention d'aller à Kiri ? Son discours n'était pas très clair à ce sujet. Un peu comme s'il avait évité d'en parler. Kiyomori trouvait tout cela un tant soit peu suspect, mais c'était peut-être à tort...

Kiyomori était toujours là, postée telle une sentinelle devant son repaire. Dire qu'il avait tant attendu de soutien pour finalement presque le rejeter quand celui-ci s'était présenté à lui. Pendant vingt ans il avait fait ce qu'il pensait nécessaire et ce pour pas, ou peu, de résultats. Il était donc temps de laisser sa chance à la vision de quelqu'un d'autre.



Malgré cette derrière passe peu encourageante, avoir enfin but, objectif clair, faisait un bien fou au moral du quarantenaire. Cela faisait aujourd'hui 16 ans, jour pour jour, qu'il avait quitté Kiri, c'était le jour idéal pour entreprendre un nouveau voyage.

La mission posséderait donc un caractère plutôt périlleux. Kumo était certainement l'une des régions les plus dangereuses de réputation que la brune connaissait. Les ninjas de ce pays étaient peu hospitaliers avec les voyageurs. Et même plutôt agressifs. Il était préférable de ne croiser personne. Elle ne se dégonflerait pas pour autant, et accompagnerait Masaru à travers ce périple. Kiyomori ressentait un certain contentement à l'idée d'avoir été écoutée. Elle espérait que sa folie de la veille n'avait été que passagère et que Masaru ne se découragerait pas de nouveaux après seulement quelques jours de recherche. Elle ferait son possible pour être une bonne camarade de route dans tous les cas. Elle se redressait pour montrer à son ami qu'il était temps de partir.



Et elle suivait Masaru dans ce nouveau périple. Elle était assez enthousiaste à l'idée de redécouvrir ce monde et ses paysages.

Ils seraient donc deux. Deux pour braver les épreuves qui ne manqueraient pas de leur barrer la route, surtout dans une région si peu accueillante. Et pourtant, Masaru pouvait, pour la toute première fois de ses quarante-deux années d'existence, compter sur quelqu'un. C'était une sensation aussi extraordinaire que dangereuse, pour la première fois, il avait quelque chose à perdre. Kiyo était trop vite devenue trop importante à ses yeux. Au lieu d'endormir son coeur, ces années solitudes avaient ramollies sa carapace.



Avant qu'elle ait eu le temps répondre, il serait déjà élancé vers cette nouvelle étape de sa quête, pour le moins inattendue quelques jours encore auparavant.