Kinchū n’est pas seulement le nom de la capitale : c’est celui de toute une région administrative, vaste, fermée, et rigoureusement contrôlée, centrée sur les institutions du pouvoir impérial. Véritable nœud de l’Empire, cette province fonctionne comme un cœur politique, battant au rythme lent mais implacable des décrets, des rituels, et des cérémonies officielles.
Le territoire de Kinchū est encerclé de montagnes basses, aménagées en postes de surveillance et en forteresses d'observation. Nul ne pénètre sans laisser trace, nul ne sort sans motif légitime. Même les routes y sont surveillées : longues lignes droites bordées d’arbres disciplinés, sans halte, sans marché. Chaque croisement est marqué d’un autel au pouvoir impérial, où l’on attend, souvent longtemps, une permission de passage.
Les villages y sont peu nombreux, parfois à peine des garnisons agricoles. Ici, l’agriculture est collective, gérée par l’État.
Les écoles y enseignent l’histoire officielle. Les enfants, en uniforme terne, apprennent dès le plus jeune âge la récitation des édits du Tennō, l’usage ritualisé de la langue, et la révérence codifiée devant les emblèmes impériaux. Les dialectes régionaux y sont proscrits : seule la langue du pouvoir est tolérée.
À l’horizon, on devine parfois la silhouette oppressante de la capitale, émergeant comme une montagne façonnée par l’homme. Et dans les villages de Kinchū, chaque maison regarde dans cette direction.